LE SHOOTING

CRÉDITS PHOTO/SHOOTING :

PHOTOGRAPHE : Daria Senin – STYLISTE : Émeline Piot

L’INTERVIEW

Peux-tu me parler de ton parcours ?

J’ai été élevé par ma grand-mère qui m’a initiée au piano et au classique, et très vite je suis tombée amoureuse du jazz. Je suis partie l’étudier à la Berklee College of Music à Boston, et je suis rentrée ensuite en France pour y poser mes premières pierres.

Cela fait maintenant plusieurs années que tu es dans la musique, après 3 EP solo depuis 2014 et de nombreux singles, tu t’apprêtes enfin à dévoiler ton premier album. Comment appréhendes-tu ce nouveau projet, avec tout ce qu’il représente ?

Forcément un projet aussi important qu’un premier album ça s’accompagne d’une appréhension. Mais c’est aussi beaucoup d’excitation et beaucoup d’envie. C’est un projet que je chéris, donc je tâche de l’offrir de la meilleure des manières, c’est pour ça que ça prend du temps. C’est mon projet de cœur, d’amour… il s’appelle “Home”, et j’ai qu’une hâte c’est qu’il soit dans vos oreilles, qu’il soit un refuge pour vous comme ça l’a été pour moi.

Il s’agira de ton premier projet excédant les 5 titres, pour quelles raisons avoir privilégié le format EP jusque là ?

Je trouve que les formats EP c’est super pour tester des choses ! Ça fait vraiment parti de mon évolution et de ma recherche artistique. Je pense aussi que je ne me sentais pas forcément prête à composer chaque maillon d’un projet entier. Puis l’envie à grandi en moi tout doucement et on en est là (rires).

Pourrais-tu me parler de ton processus créatif ?

Le processus créatif est toujours différent, je pense que ça dépend vraiment du moment de vie dans lequel t’es lorsque tu crées. Pour “Home” je suis parti pendant deux ans, j’ai eu la chance de m’entourer de ma famille choisie et je l’ai co-composé note par note entièrement avec mon meilleur ami, mon frère Ankit Suri. Cet album il a été rempli de voyages aux quatre coins du monde, de nuits blanches, de discutions infinies transformées en morceaux et il est actuellement en mix, dans les mains et dans les oreilles du grand Neal Pogue. C’est très important pour moi de nommer toutes les personnes qui font parties de cette histoire.

“Ray” ton dernier single est un titre très rap, une instru sur la base d’un sample et un couplet de pur kickage. Tu as toujours mêlé influence jazz, soul et hip hop dans tes morceaux. Est-ce que ce nouveau titre est une manière d’annoncer que cet album aura une influence hip hop encore plus marqué que tes précédents projets ?

Ouais je pense que le fait d’avoir sorti “Ray” en premier single c’est une façon de faire le pont entre les sonorités un peu plus soul d’avant, notamment grâce à ce sample absolument incroyable de Ray Charles. Moi qui suis une férue des reprises en plus comme j’ai pu le montrer, j’avais envie d’annoncer la suite comme ça. Après je pense que tout est intrinsèquement mêlé, c’est ça la force et la richesse de notre génération aujourd’hui, tous les genres se nourrissent entre eux sans cesse.

Tu chantes et rappes presque exclusivement en anglais, as-tu déjà envisagé de futurs morceaux en français ?

Il y a quelques surprises dans l’album, où le français est venu instinctivement.

Le succès de “All in you” a été un véritable tremplin pour ta carrière. 6 ans après la sortie de ce titre, comment décrirais-tu ton évolution sur le plan musical mais aussi personnel ?

“All in you” ça a été et ça restera un moment mémorable, à tous les niveaux. Je pense que le point clé qui a évolué en moi et du coup dans ma musique, étant donné que les deux sont inextricablement liés, c’est d’arrêté de rechercher la note parfaite et plutôt d’aller vers la note la plus juste. Accueillir les failles, la vulnérabilité, faire entendre ça en fait.

Tu as déjà collaboré avec des artistes d’horizons très différents (on parlait de Synapson, je pense aussi à Grand Corps Malade ou plus récemment au groupe de James BKS avec lequel tu t’es produite en décembre dernier). Avec quel artiste aimerais-tu collaborer pour expérimenter de nouvelles sonorités et de sortir de ta zone de confort ?

Ça c’est toujours une question compliquée (rires). Il y a tellement d’artistes avec qui j’adorerais collaborer, la liste est longue. N’importe quel artiste qui travaille avec le cœur et pour qui créer est un voyage, je suis là ! Je pense que chaque artiste que je rencontre m’apprend quelque chose et me donne envie de chercher ailleurs. Même les gens avec qui j’ai déjà travaillé ou ceux avec qui je travaille fréquemment, l’important c’est toujours de sortir de sa zone de confort, encore plus avec les gens qui te connaissent justement.

L’image a de plus en plus d’importance dans la musique, les marques de mode s’intéressent désormais aux artistes et en font de véritable égérie. Qui influence le plus l’autre d’après toi, la mode influence la musique, ou la musique influence la mode ?

Je pense que les deux s’influencent en retour, que ce soit les différentes collabs qu’on a pu voir, je pense à la cover de Björk faite par Alexander McQueen que je trouve complètement dingue ou ce qu’on voit en ce moment avec Travis Scott et Dior. Les deux se parlent et se nourrissent toujours !

D’un point de vue purement personnel, as-tu le sentiment que la mode a une influence sur ta musique ?

Je pense que oui dans le sens où chaque scène que je joue j’aime y aller en mettant mon “bleu de travail”, j’aime incarner chaque mot que je chante armée du costume ou de la pièce que je porte. La mode te permet d’être en confiance vis à vis de qui tu es, de ce qui te fait vibrer, des convictions que tu as… c’est un moyen d’expression à part entière.

On sent que tu as une vraie vision esthétique, que tu fais attention aux détails et que tu ne te cantonnes pas à un style. Comment expliques-tu cet attrait pour l’esthétique ?

Déjà d’un point de vue professionnel, l’image et la partie visuelle est tout aussi importante que la musique. Chaque détail compte, ça doit être cohérent et en cohésion avec le son. Mais pour ce qui de l’esthétique d’un point de vue plus personnel, je vais surtout vers ce que je sens, ce qui me ressemble… vers ce qu’il me plait finalement. Parfois je me sens bien en mettant des vêtements d’homme, parfois en mettant des vêtements de femme, l’important c’est vraiment comment tu te sens.

As-tu l’impression que la manière dont tu es habillé à une incidence sur ta manière d’aborder un morceau ?

Oui, complètement ! Je sais par exemple que lorsque j’enregistre, je vais privilégier un jogging, un t-shirt ample, des grosses baskets… Quand on a fait la session Rhythm c’était aussi un vrai challenge et je trouvais que c’était totalement cohérent avec le morceau que j’incarnais.

Si tu devais être habillé par une marque ou un créateur pour tes tenues de scène, à qui penserais-tu ?

Alors pareil, j’ai pleins d’idées ! (rires) Mais en soit, n’importe quel créateur, même en herbe mais avec une vraie vision, qui aurait une vraie lecture de ma musique, qui aurait sa propre lecture et qui y ajouterait sa couleur. J’aimerais une vraie collaboration, un échange, la musique c’est du partage de toute façon.

La personnalité qui représente le mieux l’idée que tu te fais d’une carrière réussie ?

J’en ai pas mal en tête. Les premières qui me viennent c’est d’abord Rihanna, parce que tout ce qu’elle touche se transforme en or, elle a su instaurer une liberté totale d’être, de créer, de faire, elle a toujours défendu et représentée avec fierté ses origines… c’est une sacrée icône à pleins de niveaux. Je pense aussi à Kanye West, musicalement à chaque album il a su prendre des risques, il a fait évoluer son voire le son en général. Et je pense aussi à Amy Winehouse, parce que pour moi une carrière réussie finalement c’est quand t’arrives à laisser une trace de ton passage, quand t’arrives à émouvoir les gens même quand tu es parti.

Quand pourrons-nous te retrouver sur scène pour présenter ton album ?

Très très vite j’espère ! (rires) Avant ça il y a un super clip qui sort, il va falloir être à l’affut !

Anna Kova : Ray (dernier single)