Véritable étoile montante d’une french pop à la fois classique et follement moderne, Louise Verneuil mêle avec brio références françaises et anglo-saxonne sur son très réussi premier album Lumière Noire réalisé par Samy Osta (Feu ! Chatterton, La Femme, Juniore…), un disque à la fois vibrant et intime à l’image du single “Love Corail”. Rencontre avec la belle Louise…

Tu es originaire de l’Ariège, tu as a passé ton adolescence à Nice, ta grand-mère était Gitane andalouse, la Gibson de ton oncle et ton père qui reprenait les Beatles : tous ces éléments sont importants dans ton parcours musical ? Que t’a apporté ta famille et cette jeunesse ensoleillée ?

Je suis une artiste autodidacte arrivée à Paris à l’âge de 22 ans pour faire de la musique. Paris a été le paysage de cet album, de ce projet, de ma vingtaine mais j’ai puisé dans mes souvenirs, mon héritage et mes valeurs pour créer ces chansons et cet album.
L’amour de ma famille, ce nid familial je ne le quitte jamais vraiment. Mon père m’a donné ma première guitare, ma mère mes premiers fredonnements, mon oncle mes premiers vinyles. Tout le monde chante et les dîners se finissent très souvent en guitare et mélodies.
Dans Lumière Noire je parle de mon arrière grand-mère « Emerencia », une andalouse, première femme affranchie de ma mémoire.
Jusque dans la réalisation des chansons, ou dans « L’Evadée-Belle » on retrouve des tambours maghrébins et des guitares espagnoles.
Tout est là, les racines, l’amour tout ce qui ne nous quitte jamais vraiment. Et ceux qui ne partent jamais vraiment aussi.

Tu débarques dans notre paysage musical à la manière d’une belle amazone indie pop-rock, quelles sont tes icônes et tes influences (musicales ou autres) féminines majeures ?

Déjà il y a toutes les femmes de ma famille. Des femmes fortes, libres, féminines. J’ai pris leurs noms pour les garder avec moi et me donner de la force.
Ensuite il y a beaucoup d’auteurs, compositrices, muses. Je pense a Karen Dalton, a Joni Mitchell, Billie Holiday, Marianne Faithfull, Anita Pallenberg, Frida Kahlo, Nico, Françoise Hardy, Anna Karina, Françoise Dorleac. Des amoureuses, des bêcheuses, des solitaires, des caractères, vifs tranchants, inspirantes, inspirées… Beautés, sublimes mais aussi survoltées. J’adore la folie, le sourire, même cachés derrière la mélancolie.

Tu es à la fois auteure-compositrice autodidacte : comment as-tu démarré dans la musique ? Quel a été le déclic pour toi ?

Le déclic, c’est que je n’étais pas heureuse en arrivant à Paris. J’ai décodé mon mal-être en puisant dans mon rêve le plus fou, celui de faire de la musique. J’écrivais déjà depuis petite mais jouer d’un instrument et composer dessus et venu au fur et à mesure. Quand il m’a manqué des chansons, je n’ai pas eu d’autres choix que de les faire moi même…

Ton album Lumière Noire a-t-il été plus inspiré par Londres ou Paris ? Portes-tu ces chansons en toi depuis longtemps ?

Paris. Lumière Noire c’est le passage à l’âge adulte, celui de jeune fille à jeune femme. Ces dix chansons ont été choisies pour représenter un moment de ma vie, des moments vécus, des chagrins d’amour, des déceptions sentimentales, des moments de solitudes dans mon petit appartement, loin des miens. Parfois, quelques chansons ont plus de 6 ans. Mais il fallait cette catharsis, il fallait rester à tout prix authentique, fière de mon parcours, donner cela de moi au public, à ma musique pour bien me présenter.

Quels sont les thèmes principaux de ton album ? Où puises-tu ton inspiration ?

Les thèmes sont ceux de la vie d’une femme. Les déboires sentimentaux, la sensualité, l’abandon, l’ivresse des souvenirs, s’affranchir aussi d’un modèle féminin établi, puiser dans ses ressources, ses bonheurs, ses malheurs.
L’amour dans toutes ses nuances reste le thème principal mais Lumière Noire c’est aussi trouver du positif dans le négatif, de l’éclat dans chaque défaite, de la beauté dans la mélancolie. C’est au final une vraie philosophie.

Tu publies ton premier album la trentaine victorieuse : c’est un vrai luxe de prendre son temps ?

Dans cette société où l’on se lasse de tout, où l’on consomme tout pour le consumer, il était important de renouer avec une certaine tradition, un vrai héritage de musique française. Prendre le temps pour se trouver surtout, pour savoir dire non, ne pas regretter les échecs et les choix, apprendre de ses erreurs. Cela a été dur, la patience m’a appris la patience, parfois je n’ai pas eu le choix mais au final, tout m’a guidé pour être là aujourd’hui. Je suis persuadée que tout à un sens.

Que t’a apporté ton passage à The Voice avec Bertignac ?

Honnêtement, l’émission n’était pas pour moi. Je me suis retrouvée dans cette machine de guerre, maquillée et coiffée comme une jolie poupée sans pouvoir vraiment m’exprimer, décider, digérer. Trop jeune, trop sensible, trop mimi, catégorie détestée par le grand public et mise en scène par la chaîne. Heureusement, Louis m’a pris un temps sous son aile et m’a permis d’y voir clair sur le travail du texte notamment. Je me souviens avoir mis beaucoup de temps à lui avoir fait lire mes chansons et il a été le premier à me dire de chanter mes mots (maux) après 10 refus de chansons envoyées par d’autres. Ce que j’aime chez lui c’est qu’il sait trouver en nous la cohérence. J’étais une chanteuse, et après lui je me suis assumée en tant qu’auteure.

Tu vis entre Londres et Paris, comment gères-tu ce grand écart géographique et culturel ?

Justement c’est très inspirant. Il y a une grande liberté à Londres et beaucoup de poésie à Paris donc le choc est sublime à vivre.
Je peux passer d’un état à un autre très rapidement seulement en prenant le train et je me sens libre d’être excitée après un départ ou une arrivée.

Comment s’est fait le choix de Samy Osta pour la réalisation de ton EP et ton album ? Peux-tu nous parler de votre collaboration ? Que t’a-t-il apporté et comment avez-vous travaillé ensemble ?

Samy est une de mes plus belles rencontres. Je suis allée le voir dans son studio et nous sommes devenus rapidement très amis. Nous avons passé un an en studio pour réaliser Lumière Noire.
Samy a été incroyable, dans sa manière d’apporter sa pate sans me brusquer, sans dénaturer les chansons. Il a insisté pour que je joue du piano, de la guitare sachant qu’a l’époque je ne pensais pas en être capable.
Il faut savoir que les chansons à leur arrivée étaient complètement « messy ». On a repris leurs ossatures, on les a secouées parfois, eu des moments de folie et de rire aussi et on a gardé l’essentiel.
Il m’a permis de m’épanouir et de me réaliser en tant qu’artiste. C’est un vrai beau moment suspendu dans le temps et avec une liberté folle qu’on a vécu.

Ta musique est à la fois délicieusement surannée, pourtant à la fois aussi intemporelle mais également follement moderne : quel est le secret de mélange aussi surprenant que terriblement accrocheur ?

Je me suis écoutée tout au long de ces années, j’ai fait des choix toujours audacieux, jamais simples. Je pense qu’il n’y a pas de secret, il n’y a que de la vérité.
Cet album il est comme je suis, comme je l’ai été ces huit dernières années, Je laisse maintenant les chansons faire leur chemin et arriver au cœur des gens.

Ta voix mêle accents rauque, un coté feutré et des envolées cristallines : tu as toujours su que tu serait chanteuse ?

J’ai été terrorisée de chanter devant des gens jusqu’à mes 20 ans. Je m’enfermais des heures avec ma guitare dans ma chambre, je chantais avec ma brosse a cheveux mais incapable de le faire devant un public. Mes parents devaient insister longuement pour que j’ouvre la bouche. C’était seulement dans le petit univers familial que je lâchais prise. Je pense qu’il y avait tellement de vérité dans cette façon de m’exprimer que j’étais remplie de pudeur. Avec le temps j’ai gardé cette sensation mais l’ai apprivoisée pour enfin ne plus avoir peur. Parfois, cela me prend à la gorge, souvent même mais c’est toujours bon signe.

Ton clip « Love Corail » exacerbe un univers très 60’s/70’s et DYI qui rappelle les films homemade Super 8 : tes inspirations visuelles et musicales vont-elles de pair ?

Oui il y a toujours un clin d’œil aux années 60. 70. Mais là s’arrête la comparaison. J’adore mêler l’ancien au moderne, dans ma musique comme dans le visuel. Mais je n’ai pas le sentiment de m’être trompée d’époque surtout avec les batailles quotidiennes auxquelles nous faisons face. Chaque liberté durement gagnée est toujours une lutte permanente.
Je me permets dans mon travail de faire des références à une ancienne technique de cinéma car cela est le cinéma que j’aime. Je reste toujours à l’écoute de qui je suis et je ne cherche en aucun cas à suivre une mode. Mais travailler en analogique surtout en vidéo demande encore une fois de la patience et aussi de la réactivité face à des résultats que l’on ne voit qu’une fois le film développé. Ca décuple la créativité et c’est un résultat unique. C’est cela qui me plait.

Tu arbores un chic naturel et sexy : quel est ton rapport à la mode ? As-tu des designers ou griffes fétiches ?

Je suis une grande fan de la mode française. Des créateurs comme Saint Laurent, androgynes et féministes, tout en sensualité, l’intemporalité et le chic de Chanel, la radical iconique de Paco Rabanne, le monochrome et les matières de Courreges. Je m’habille aussi énormément en fripes pour une question de budget, d’originalité mais aussi d’éthique encore une fois dans cette société d’ultra consommation. Ma mère était une amoureuse des friperies et des brocantes donc depuis toute petite, je baigne dans cet univers ancien à piquer des blouses à Manou, ma grand mère dans son placard qui sentait la naphtaline.
Je ne peux pas parler de mode sans citer mon meilleur ami depuis plus de 20 ans qui a fondé sa marque Studio Clandestin dans le même souci de changer les mentalités et les habitudes. Il a créée un concept en plus de ses créations de Laboratoire où l’on peut nous même envoyer nos vieux vêtements et en faire de nouveaux modèles.

Pour vous procurer l’album :

https://louiseverneuil.lnk.to/LouiseVerneuil_LumiereNoire/

1) Désert
2) Blue Sunday
3) L’Evadée Belle
4) Fugitif
5) Le Beau Monde
6) Nicotine
7) Emerencia
8) Lumière Noire
9) Love Corail
10) A mort Amant