L’incroyable producteur, rappeur et compositeur de Détroit aurait eu 50 ans ce mois-ci. Son décès prématuré a chamboulé le monde du hip-hop, pour lequel il était une icône incontestée. Dix-huit ans plus tard, l’héritage qu’il nous a laissé continue de séduire les experts du sample et du beat.

 

Né à Détroit, James Dewitt Yancey, plus connu sous le nom de J Dilla, a baigné dans la musique dès son plus jeune âge, avec une mère chanteuse d’Opéra et un père bassiste de jazz. À l’école, il commence le beatmaking et rencontre TS et Baatin avec qui il forme le fameux groupe Slum Village. Très vite, on les catalogue comme les nouveaux A Tribe Called Quest. D’ailleurs, quelques temps après, le groupe en question écoute les démos de J Dilla et impressionné par son talent lui implore de prendre part au nouvel album.

 

Slum Village

 

Début des années 90, son talent de producteur acquiert une réputation et il produit des sons pour des vedettes comme Janet Jackson, The Pharcyde, Erykah Badu, Common ou encore Busta Rhymes.  En 2001, il quitte Slum Village et commence à produire en solo avec le label MCA Records. Sa maîtrise du sample se perfectionne, les frontières entre les genres ne l’effrayent pas : passant du jazz au funk, du rock à la soul, il reprend des titres de James Brown, Dizzie Gillepsie, Ahmad Jamal, The Isley Brothers, Jackson Five, etc.

Pendant toutes ces années, son acolyte n’est autre que Madlib, l’autre génie du sample, avec qui il se lie d’amitié et ensemble, ils créent le projet JayLib. De cette collaboration nait une émulation qui se fait ressentir dans leur art.  Les limites n’existent plus, leur objectif est le même : renverser les codes du hip-hop.

 

J Dilla (en fond) et Madlib

 

Mais on ne peut pas parler de J Dilla sans parler du disque Donuts, la plus grande œuvre de l’artiste, sorti le 7 février 2006, trois jours seulement avant sa mort. Quelques années plus tôt, il est diagnostiqué d’une maladie du sang et soucieux de mettre ses idées en musique avant d’être rattrapé par le temps, il enregistre Donuts. Les morceaux s’enchaînent et dépassent rarement les une minute trente. À travers les titres, on navigue entre des samples et des boucles infinies. C’est un projet qui porte son âme de producteur, qui survole toutes ses influences.

C’est un manuel à la production hip-hop, un cadeau post-mortem qui a révolutionné l’art du beat. Sur papier, c’est la suite de ses albums précédents, en vérité, c’est autre chose : c’est un disque qui deux décennies plus tard a toujours sa place en haut de l’empire. Le rêve de tout artiste finalement.

 

 

Alors, dix-huit ans après sa mort, que reste-t-il de Jay Dee ?

Il reste l’image de ce producteur, rappeur, compositeur, chanteur aux prises de risques, il reste des titres mémorables (Fuck tha Police, So Far to Go, The Look of Love), des disques de prestiges (The Shining, Welcome 2 Detroit, Donuts), mais surtout le modèle d’un producteur qui a continuellement réussi à faire bouger les têtes. Qui aura vécu sa passion pour la musique jusqu’au bout.

 

J Dilla

 

Texte Charline Gillis