Xiu Xiu (dites chouchou) sortira son quatorzième album le 24 février. Loin de coller au style du groupe (qui s’est fait connaître pour ne justement pas en avoir), il est considéré par son penseur comme le plus pop de leur discographie. Le penseur, c’est Jamie Stewart, cerveau auquel se greffe de manière très variable d’autres membres.

Leur dernier album en date était une reprise de la BO de Twin Peaks. Une reprise sépulcrale qui aura rappelé au bon souvenir des fans l’album Nina, 13 reprises des morceaux emblématiques de Nina Simone. A l’aise dans tous les styles, Jamie nous sort là son album le plus pop selon lui, mais surtout le plus intéressant de ce début d’année.

D’entrée de jeu la noirceur du compositeur nous saute au visage avec The Call, à mi-chemin entre Joy Division et David Bowie. Efficaces synthés et salaces guitares, la voix perchée et torturée finit de nous achever. Nous n’en sommes qu’au premier morceau. Certains s’arrêteraient même dès lors. Mais viens Queen of the Losers, ses chants prophétiques, ses lasers sidéraux et sidérants. Épique à souhait. L’heure est au questionnement avec le morceau suivant, Wondering, et la véritable entrée dans la pop susmentionnée, un morceau plus abordable qui laisse respirer les inspirations du groupe américain, l’écoute se fait plus agréable, plus mélodique, on perçoit petit à petit le cheminement de l’oeuvre. Un sentiment confirmé par Get Up, magnifique ballade électronique empreinte de mélancolie suicidaire. Magistral.


Tout le génie du groupe tient dans le track suivant, Hay Choco Bananas. Grosse basse et mélodie claire, le morceau attire l’oreille jusqu’au basculement, la seconde partie du morceau prônant la cacophonie ordonnée du groupe, un bref passage dans le calme avant la tempête et ce break joliment orchestré par les cowbells, et le morceau part vers les sommets du noise cher à Stewart. Culminant.

On croit entrevoir la fin lorsque se termine le larsen au même titre que le morceau. Sonne alors le vent du murmure de Jenny GoGo , sixième morceau du dix titres. Des chants d’outre tombe proférés au rythme de la caisse claire, on ne retiendra que la langueur du désespoir qui s’y repaît.

Ne vous y méprenez pas, At Last, At Last n’est pas le dernier morceau du disque. Le plus calme et le plus mélodieux, oui. Mais seulement au début, car dès le premier couplet passé, Jamie joue encore sa vie et chante du haut de la montagne de son talent assaillie par un chœur de zombies et de scies musicales. Flippant.


Vient le morceau titre, Forget, on cherche le faux pas. Les instruments rebondissent autour de la basse, la voix y glisse, épique. L’appel à l’oubli prend tout son sens, l’album tient ses promesses, on veut bien signer pour l’oubli si Jamie insiste. On se met à danser.

Les premières notes de guitare sèche de l’album, et les seules, se font entendre sur le magnifique Petite, Jamie y dévoile sa voix de tête, le fantôme de David Bowie y apparaît, Ian Curtis jouxtant son épaule. On comprend enfin ce que Jamie Stewart cherchait : il invoque les morts, il les rappelle à la vie. Car la vie est faite d’oubli, assurément, et ça l’américain l’a compris. Il nous délivre alors de façon magnanime de cette culpabilité, celle si blessante d’oublier.

Faith, Torn Apart clôture l’album en 8 minutes, et nous dit au revoir sobrement, d’un geste nonchalant de la main. Ou plutôt dit-il adieu, j’ai encore oublié.


Forget sortira le 24 février sur Polyvinyl Recordings.