Entre variété française, rap, rock, jungle et gospel, les milles vies de Lucien Kimono ou l’art de l’hybridation.

Nous connaissions Lucien depuis son troisième EP Hayao’s Garden sorti chez Cracki Records en 2019. À l’époque, il nous faisait découvrir une musique électro-pop sucrée et colorée teintée d’une certaine nostalgie (en témoigne son morceau Le Mékong). Voilà donc sans doute le motif primordial, l’impulsion première qui initie le mouvement musical de Lucien Kimono : une certaine nostalgie propre à l’exotisme qui n’est pas sans rappeler le thème camusien du déracinement ou encore L’amant de Marguerite Duras.

 

©Simon Depardon

“Sur un plan esthétique, Lucien change de direction en intégrant à son propos artistique les codes et textures de la musique rap (plus précisément le phrasé, le rythme et le mixage très dry et puissant de la trap) comme dans Jamais là ou encore 1000 vies (…)”.

 

Pour son nouvel album 1000 vies (sortie le 11 mai), Lucien délaisse les synthés type Supertramp et les saxos suaves de Hayao’s Garden pour proposer une musique hybride sans doute plus mature et plus punch que celle de ses projets précédents. Sur un plan esthétique, Lucien change de direction en intégrant à son propos artistique les codes et textures de la musique rap (plus précisément le phrasé, le rythme et le mixage très dry et puissant de la trap) comme dans Jamais là ou encore 1000 vies, titre éponyme de l’album qui intègre notamment de l’auto-tune. Cela dit, 1000 vies n’est pas qu’un album de rap, on y trouve des choeurs gospel dans Eunice et Grace (titre au rythme presque jungle) ou encore des guitares saturées très “Donald Glover” dans Weird Fruit et Hero (titres dit “bangers”).

 

©Marie Perennès

 

Il se dégage entre ces neufs morceaux un certain goût pour le “break” et le jeu sur les silences “pré-drop”: la production est léchée et très fluide bien qu’on pourrait lui reprocher de parfois mimer le discours commun du tout-venant musical pour feindre benoîtement une simplicité tout en sophistique. Ceci étant, ce nouvel album ne manque ni d’audace, ni d’inventivité et annonce une période riche en idées sonores novatrices pour Lucien Kimono. Chers lecteurs, retenez ce nom, ce producteur musical n’a pas dit son dernier mot.

 

Texte / Samuel Matous