Le Wu-Tang Clan. Meilleur groupe de hip-hop de tous les temps pour about.com, meilleur groupe de rap qui n’ait jamais existé pour Rolling Stone Mag, groupe le plus influent de ces dix dernières années pour NME. Pas de doute, l’exposition qui leur est consacrée à La Place, le centre culturel hip-hop de Châtelet, est tout ce qu’il y a de plus légitime.
Du 5 au 18 mai, La Place accueille l’exposition WU LAB, dévoilant une collection d’objets uniques encore jamais dévoilés. Le groupe mythique de rap américain formé en 1992 par RZA fêtera ses 25 ans en 2018. C’est à cette occasion que Olivier Annet N’Guessan, journaliste et acteur de l’industrie du hip-hop, et John Mook Gibbons, cousin de RZA et PDG de Wu Tang Management, ont imaginé une exposition rétrospective sans précédent.
Le Wu-Tang Clan
C’est en 1993 que le monde découvre les neuf samouraïs de Staten Island avec « Protect Ya Neck » , single de leur premier album devenu légende : Enter the Wu-Tang (36 Chambers). Le groupe créé par le producteur RZA devient rapidement le fer de lance du hip-hop, chacun des neuf membres accédant à une notoriété évidente leur permettant de faciliter des élans solo. Le premier à se lancer est RZA, suivi par Method Man, puis Ol’ Dirty Bastard, Raekwon puis GZA. Viendra quelques temps plus tard l’album considéré comme le meilleur projet solo extrait du Wu-Tang, Ironman signé par Ghostface Killah. La légende est lancée.
Le groupe ne cache d’ailleurs pas ses intentions financières, déclinant une ligne de produits dérivés estampillés Wu-Tang. Mook, cousin de RZA et mécène des deux premiers albums, devient le PDG de Wu-Tang Management. Le marché est inondé de produits, les ventes explosent de 1993 jusqu’en 2000, relancées il est vrai par la publication en 1997 du second album, Wu Tang Forever. Puis c’est la chute des ventes. Les spécialistes incriminent la saturation commerciale du groupe, en solo ou en clan, et en dommage collatéral, chacune des carrières solo des membres prend de l’ampleur. On annonce la mort du Clan.
Pourtant, les membres se réunissent de nouveau au 36 Chambers, le studio new-yorkais qui a vu éclore le groupe. En résulte The W, troisième album du groupe, très bien accueilli par la critique. Le groupe avait finalement raison avec leur sophomore, Wu Tang (is) Forever. Le groupe ne descendra plus jamais de sa place de mastodonte du hip-hop. L’élévation est exponentielle, malgré les démêlés judiciaires outrageusement médiatisés aux Etats-Unis, le groupe émoustille les jeunes gens jusque dans le Poitou où un certain François Durpaire découvre les cultures asiatiques et américaines au même moment. Le message est global, des américains s’inspirent de l’Asie pour inspirer un campagnard français. Le Wu-Tang devient synonyme de mondialisation. Car au centre de tout cet engouement réside la genèse du groupe, son nom venant d’un film hongkongais de 1983 : Shaolin vs. Wu-Tang.
Yung-Kit et Fong-Wu sont amis, bien qu’appartenant à deux écoles de kung-fu rivales : Shaolin et Wu-Tang. Une amitié lourde de menaces pour le prince Hao qui soupçonne une alliance visant à le renverser. Ainsi, il décide d’ordonner le meurtre du maître de Wu-Tang, afin de provoquer la vengeance de ses disciples contre ceux de Shaolin.
C’est en usant les sièges des cinémas new-yorkais que RZA et Ol’ Dirty Bastard assistent à la projection de ce film qui leur fait l’effet d’une révélation. L’esthétique entière du groupe tournera autour des samouraïs, des shurikens, des arts martiaux mais également de leur quotidien américain : la drogue, les blocks, les gangs, la police, les inégalités. C’est ce melting-pot qu’on retrouve dès le premier single « Protect Ya Neck » , l’instrumental mêlant bruits de lame fendant l’air, de shurikens virevoltant et de bruits de la rue. Les huit premiers membres se partagent les versets, traitant de kung-fu, des échecs, des comics, de la fumette, des films de gangster ou de la rue. Le propos est argotique, les références sont urbaines. Mais le fond transpire de cette essence asiatique qui ne quittera jamais l’ADN du groupe. Comme pour crier cette envie d’ailleurs.
L’univers Wu-Tang
Ce n’est pas un secret, RZA est un mégalo. Dès les débuts du groupe, et son logo en forme de shuriken, se monte un business lucratif de produits dérivés qui permettra le financement d’une partie des travaux du groupe. T-shirts, bonnets, stickers, ligne de vêtements à part entière, posters, feutrines pour platines. Un univers dédié est créé qui ne s’arrêtera jamais de grandir. Il faut dire que l’homme est une machine. Capable sur la seule année 1994 de produire 64 morceaux pour le clan et pour les projets solo de ses membres, RZA est surtout crédité en tant qu’executive producer sur chacun des projets. Un choix de tout contrôler qui mènera le groupe tant au sommet qu’à la ruine.
La réputation du clan n’est plus à faire, et même si la fan-base s’est étiolée, par déception, par lassitude, par un besoin de nouveauté ou tout simplement pour cause de friture sur la ligne de la transmission générationnelle, le groupe n’en reste pas moins précurseur dans tous les domaines qu’il aura effleuré de ses 18 mains.
L’exposition
Le travail mené durant deux ans par Olivier Annet N’Guessan rend un bel hommage au côté lumineux du groupe mythique. Les objets assemblés ici sont un savant mélange de photos grand tirage inédites du groupe, de masques créés par Parasite, d’un magnifique mais inutile bibelot serti par Swarovski, de peintures et de graphismes à la mine bleue.
L’exposition aura lieu jusqu’au 18 mai avec en temps fort demain, mercredi 10 Mai, un après-midi Kids’N Play spécial Wu-Tang : une visite de l’exposition et des ateliers pour les enfants. Puis le Jeudi 11 mai – en soirée, la présentation du livre de l’exposition WU LAB d’Olivier Annet N’Guessan (Serious Publishing).
Du 5 au 18 mai, La Place
10 passage de la Canopée, Paris 1er
(dans la Canopée du Forum des Halles)
1er étage – Entre le Sephora et le restaurant Champeaux
RER / Métro : Châtelet-Les Halles