2020, une année qui sonne comme une tornade de bouleversements dans notre société, des personnes noires meurent encore asphyxiées sous les corps de policiers blancs. Malgré l’interdiction de manifester en France, de nombreuses personnes se sont réunies sur ces dernières semaines pour demander que la justice s’applique de la même manière à chacun. Cet écho d’un ras-le-bol grandissant sonne comme un avertissement de la part de l’écrivain afro-américain James Baldwin, l’une des figures de la lutte pour la défense des droits civiques aux Etats-Unis dans les années 60. C’est en France qu’il écrira ses ouvrages les plus connus, ayant pris le “recul nécessaire” du racisme viscéral de sa patrie. Voici ce que nous enseigne James Baldwin du racisme français.
James Baldwin, remis au goût du jour par le documentaire de Raoul Peck, I Am Not Your Negro, et dont Gallimard a publié une nouvelle édition de Notes of a Native Son (Chroniques d’un enfant du pays, traduit par Marie Darrieussecq), a des choses à nous dire aussi sur notre époque et sur le racisme made in France. Tout commence dans le New Jersey. James Baldwin a 22 ans. Un soir, avec l’un de ses amis ils se font violemment refuser l’entrée de deux restaurants. Quelques mois plus tard, un autre événement, dramatique, fera monter la colère du jeune homme, son meilleur ami se suicide en se jetant du haut du George Washington Bridge. Une jeunesse “bouffé par la ville”, dira Baldwin, “bouffé” par l’impossibilité d’y être noir. Il se réfugie alors en France, à Paris.
Pendant plusieurs mois, le jeune écrivain arpente les rues de la ville. Pour Baldwin, la routine parisienne s’installe. Fauché, il parvient à vendre quelques textes et à se faire prêter de l’argent. Il s’installe aux Deux Magots, chez Lipp ou au deuxième étage du Flore. C’est dans ces cafés que l’écrivain rédigera La Conversion et amorcera l’écriture de Chronique d’un pays natal. À partir de 1960, l’écrivain devient un acteur majeur du mouvement pour les droits civiques. Compagnon de lutte de Martin Luther King, James Baldwin multiplie les prises de parole en public et commente le combat dans la presse.
Ce que nous enseigne James Baldwin sur le racisme, c’est que nous ne pouvons plus faire semblant. La littérature de Baldwin, permet de réaliser que l’on ne peut construire un avenir commun sans savoir d’où l’on vient. Il s’agit dorénavant de déconstruire le racisme en France en racontant son histoire et en analysant les arts et concepts de différentes disciplines. La récente vague de protestation pour Black Lives Matter prouve une fois de plus l’importance d’éduquer les personnes à ce racisme systémique.
D’ailleurs, récemment, le documentaire de Raoul Peck, I am not your negro, revisitant les années sanglantes de lutte pour les droits civiques à travers les textes de James Baldwin, est ressorti sur les plateformes Netflix et Arte. Film de cinéma à part entière, ce documentaire mobilise l’admiration, la terreur et la colère face à cette longue histoire qui va de la traite esclavagiste au mouvement Black Lives Matter.