Depuis toujours, la femme au foyer américaine fascine. Des épouses (trop) parfaites du roman The Stepford Wives aux Desperate Housewives de Wisteria Lane, en passant par les vraies femmes au foyer désespérées des différentes déclinaisons de la franchise The Real Housewives, elles sont un sujet d’inspiration infinie. À la fois adorées, moquées et jalousées, elles sont aujourd’hui mises à l’honneur par l’auteur Helen Ellis, dans le bien-nommé American Housewife.

L’américaine Helen Ellis est une femme au foyer, mais pas seulement. Née en Alabama, elle est de ces southern woman qui connaissent tout des bonnes manières et des remarques assassines délivrées avec le plus charmant des sourires. Joueuse de poker émérite, elle vit depuis vingt ans à New York, dans un spacieux appartement situé dans l’Upper East Side en compagnie de son mari et de ses deux chats. Après un premier succès littéraire en 2000 avec le roman Eating the Cheshire Cat, elle publie aujourd’hui le recueil de nouvelles American Housewife.

La nouvelle qui ouvre celui-ci, « Ce que je fais de ma journée », donne le ton. Dans celle-ci, une femme énumère les différentes activités qui rythment son quotidien : se déhancher comme Beyoncé jusqu’au grille-pain, s’offrir dix minutes de plaisir devant Sixteen Candles de John Hughes, noyer ses chagrins dans le Chanel N°5… et le lendemain ? On ne sait pas, mais probablement la même chose. L’écriture d’Helen Ellis est mordante, drôle, grinçante. Moqueuse, mais pas méchante.
La vraie perle d’American Housewife, elle, arrive juste après… Dans « La Guerre des Lambris », deux voisines de palier se livrent une bataille sans merci par e-mails interposés. La cause de leur discorde ? La décoration d’un couloir commun. Une guerre des mots (mais pas seulement) jouissive et hilarante et qui laisse progressivement la place à un humour de plus en plus noir. Humour que l’on retrouve aussi dans « Les Portiers Morts », dont le titre en dit déjà beaucoup et dans « Bonjour ! Bienvenue au club des Lectrices » dans laquelle la petite nouvelle du club se rend compte que ses nouvelles amies sont plus intéressées par son utérus que par ses suggestions de romans.

Le reste des nouvelles va du très bon au passable, avec entre autres une mini-miss qui décide de changer d’identité, les règles essentielles de toute dame qui se respecte ou encore l’histoire du meilleur ajusteur de soutiens-gorge de tout le sud des États-Unis. Mais la vraie force d’Helen Ellis, c’est d’être capable de rire d’elle-même comme des maîtresses de maisons auxquelles elle s’en prend. De l’écrivaine ratée qui peine à faire publier ses nouveaux romans et tente une reconversion dans la télé-réalité de « Chine avec les Stars » à celle qui, par faute d’inspiration décide d’abandonner l’écriture pour créer son propre personnage de bienfaitrice des arts dans « Comment devenir une protectrice des arts », les parallèles avec la carrière de l’auteur sont évidents.
Heureusement pour nous, à la télévision ou à l’art contemporain, Helen Ellis a préféré Twitter, sur lequel elle a crée le compte @WhatIDoAllDay (en référence à une question qu’on lui a maintes fois posé : « qu’est-ce que tu fais de tes journées ? ») sans qui American Housewife n’aurait, probablement, jamais vu le jour.