Oeuvrant pour la visibilité de toutes les femmes noires, la fanfare a défilé à la Villette ce weekend. Empowerment et flamboyance étaient au rendez-vous.

« FUCK YOU, FUCK YOU, FUUUUCK YOU ». C’est le refrain scandé par 30 nuances de noires, les deux pieds bien ancrés au sol et le regard dirigé vers le public. Habillée d’or et d’argent, tout en cuivres, en percussions et en voix puissantes, la formation détonne sur les pavés de la Grande Halle à Paris. Pendant plus d’une quarantaine de minutes, la formation s’est illustrée sur les mélodies de Fela Kuti (musicien nigérian, pionnier de l’afro-beat), les titres “La Vie en Rose” et “Pep Rally”.

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Composée d’une fanfare et d’une troupe de danse, elle performait dans le cadre du festival Freestyle. 

Sandra Sainte Rose Fanchine, chorégraphe explique l’origine du projet, qu’elle a crée : “j’ai ressenti l’urgence d’agir sur l’invisibilisation des femmes noires dans l’espace public”, avant d’ajouter “danser prend un sens politique en interrogeant le regard des spectateurs, tout en créant un espace de réappropriation de l’image de nos corps”. En effet, qu’il s’agisse de représenter une identité plurielle souvent méconnue — queer ou autre — ou de se défaire de l’exotisme, 30 nuances s’impose au public, que ce dernier le veuille ou non : “cette diversité vise à défier un idéal féminin étriqué, qui nous exclut de la société française”, analyse la chorégraphe.

Et par la force et la puissance visuelle et sonore de la formation, on ne peut pas y échapper.

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Tout a commencé en 2016, en recrutant ici et là des danseuses professionnelles et amateures. Pareil pour le groupe de musiciennes, provenant du cercle plus ou moins proche de la chorégraphe. 

D’origine martiniquaise, Sandra Sainte Rose a grandi en Côte d’Ivoire. Influencée par l’émission Soul Train qu’elle regardait petite, elle mêle locking et waacking (composantes du hip-hop dansées sur de la funk ou du disco) au sein de 30 nuances de noires : “J’ai choisi des gestuelles […] de valorisation de soi mais aussi de l’orientation sexuelle, notamment avec le waacking, une danse beaucoup pratiquée par les communautés gay latinos et afro-américaines”. Par ailleurs, l’idée de la formation lui vient des carnavals des Antilles et des fanfares afro-américaines (notamment à la Nouvelle-Orléans).

Après de longues répétitions, c’est à Barbès, au mois de Mars — le long du quartier de la Goutte D’or — que 30 nuances a battu le pavé pour la première fois. Après avoir été de plus en plus médiatisée (Bondy Blog, BET, Afropunk etc) la formation s’est imposée à la Villette. On a hâte de les voir revenir pour une quatrième explosion de flamboyance.