Le documentaire choc The True Cost avait mis le holà sur notre manière excessive de produire et de consommer la mode. En écho à ce constat, la marque Excess Only a vu le jour en mai 2018. Son objectif est clair: faire face au gaspillage dans la mode et rendre la qualité accessible à nouveau. Son arme ? La récupération de chutes de vêtements. Vous avez bien entendu, tout est possible quand on veut faire bouger les choses. Rencontre avec la créatrice de la marque, Viktoria de Chevron Villette, une optimiste de la mode responsable.

Raconte-nous un peu ton histoire, faire de la mode responsable était une évidence ? 

J’ai baigné dans la mode toute jeune puisque ma famille travaillait dans la vente de chaussures. La passion m’est naturellement venue mais ne s’est pas exprimée pleinement tout de suite. En effet, j’ai débuté ma carrière dans les domaines de la politique et de l’économie, rien à voir en apparence. J’ai animé une série de conférences sur la future génération de consommateurs appelée FUTR Today avec des partenaires comme Forbes. Nous avons fait le point sur  l’état d’esprit de la nouvelle génération concernant les différentes industries : la nourriture, le voyage , la mode…

C’est justement ce dernier point, l’état d’esprit sur la mode, qui t’a particulièrement interpellé ? 

Oui la connexion s’est ainsi faite.  La mode était à un point de rupture . Sur un panel de 80 personnes, la majorité a évoqué le fait que la “fast fashion” devait laisser sa place à  l’authentique. La “fast fashion” est une illusion du bonheur, tu achètes quelque chose et dans quelques semaines tu n’en voudras plus ou ce sera déjà bon à jeter. Je compare ça à une rupture amoureuse qui se produirait toutes les semaines. Pas très agréable n’est-ce pas ?

Avec Excess Only, tu as décidé de travailler à partir de chutes de vêtements. Que représente ses pertes de tissus en moyenne ? 

Il n’y a pas de chiffres exacts mais il est certain que ce gâchis est bien présent et qu’il va continuer à l’être car dans l’industrie du vêtement, chaque étape de production peut être synonyme de perte de matière: d’un simple excès de matière ou bien l’arrêt de la production de tel ou tel modèle. Cela  représente environ 6 tonnes de pertes par an , entre 12 est 15% de la fabrication mondiale.

Tu dois faire avec ce que tu as, composer en fonction des matières que tu trouves, c’est excitant comme travail mais c’est un réel défi aussi ? 

C’est un vrai défi à chaque création. Tu dois rapidement faire la connexion entre la matière récupérée et le design voulu. Drôle d’anecdote, l’une de mes inspirations a été une veste de Kanye West conçu avec des chutes de tissus d’une grande maison de luxe. Tout est possible !

Quel est l’histoire d’une pièce chez Excess Only? 

Petit à petit, on a développé un véritable réseau pour dénicher des tissus inutilisés, tout en nous dirigeant toujours vers des fournisseurs de qualité. On travaille sur du 100% cachemire, du 100% soie…  Nos recherches de tissus se limitent à l’Europe qui est l’épicentre de la mode. L’Italie est notre terre promise puisque le pays a encore beaucoup de producteurs de tissus de grande qualité.

 Nous sommes une marque qui entame le dialogue

Tu as décidé de lancer une marque exclusivement en ligne. Tu penses qu’internet est l’endroit où l’idée d’une mode plus responsable peut se développer au mieux ? 

Internet  permet de raconter des histoires car nous sommes une marque qui parle. Ce dialogue de la marque à l’acheteur à tendance malheureusement à se faire timide aujourd’hui.  Chacun de nos vêtements a une histoire que nous transmettons via notre site et notre page Instagram :  anecdotes sur le tissu et l’usine de fabrication, taille du rouleau récupéré et nombre de pièces produites dans ce dernier justifiant le caractère « limité » de chacune.

Tu viens d’ailleurs de lancer une collection capsule avec la plate-forme instagram ParisianVibe, peux-tu nous en dire plus sur ce dialogue 2.0. 

Le style de Excess Only est un chassé croisé entre style scandinave et style parisien. Parler directement avec les influenceurs de ces pays est primordial pour aller dans la bonne direction. Pour cette collection, nous avons voulu parler aux femmes françaises , la qualité est rapidement venu se placer au centre de nos discussions. Nous avons ainsi porté une attention particulière aux détails et matières, plus nobles que jamais, et proposé un vestiaire à la fois stylé et durable. 

Tu penses que c’est le devoir des grandes marques de véhiculer ce message écologique ou justement c’est grâce à de petites marques indépendantes comme la tienne que la « révolution » prendra forme? 

On a besoin des grandes marques pour parler mais c’est aux petites de questionner et de donner la direction. C’est la seule mécanique qui peut fonctionner à mon sens.

Comment vois-tu ton projet grandir? 

Il faut continuer à étendre notre carte de fournisseurs  et surtout continuer ce dialogue de la mode responsable à travers de nouvelles collaborations avec des artistes aussi et des marques de luxe pourquoi pas.

Pour shopper l’univers d’Excess Only c’est par ici