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Tout commence à l’Université de Buffalo, section média, en 1989, lorsque six étudiants décident de monter un groupe pour composer la bande originale des films de leurs congénères. « Nous étions six membres, six à penser le contraire des autres. Musicalement, c’était enrichissant, mais dès qu’il a fallu s’astreindre à une discipline, ça s’est aussitôt transformé en cauchemar. Ce groupe ressemblait à un asile d’aliénés. » En tout, ce ne seront pas moins de seize membres qui se relayeront autour du duo indéfectible Jonathan Donahue et Sean Thomas Mackowiak, alias Grasshopper. Leur musique s’inspire beaucoup du travail de Tony Conrad, également à l’origine du nom du groupe fondé par Lou Reed et John Cale, The Velvet Underground, mais aussi de Robert Creeley, poète, alors professeurs à leur université. Nous passerons sur leurs premiers pas, notamment avec David Baker, le chanteur d’origine, qui apportait les tonalités sombres et expérimentales du groupe, pour nous concentrer sur leur chef-d’œuvre Deserter’s Songs (1998) et ce nouvel opus Born Horses (2024) qui marque une étape significative dans leur évolution musicale.

 

De gauche à droite : Jesse Chandler, Grasshoper, Marion Genser et Jonathan Donahue © Joe Magistro

Deserter’s Songs : l’album d’un nouveau départ

Exit les fuzz incontrôlables des guitares, place aux hautbois, harpes et autres instruments organiques. Cet album a représenté une renaissance pour le groupe, mêlant influences de rock, folk et musique orchestrale, créant une atmosphère à la fois rêveuse et mélancolique. Jonathan Donahue décrit cet album comme un point de non-retour pour le groupe : « Nous étions à un moment de notre carrière où nous ne savions pas si nous allions continuer. Deserter’s Songs est né de ce sentiment d’incertitude et de la nécessité de réinventer notre musique. Ce qui importait avant tout, c’était de faire un disque intemporel, que les gens puissent écouter dans trente ans sans se pincer le nez ou piquer un fou rire. » Vingt-six ans plus tard, cet album de récits intimes et romantiques, inspiré par les montagnes Catskill et la vallée de l’Hudson dans le nord de l’État de New York, reste un monument de pop psychédélique et d’indie-rock immersif.

 

Born Horses : une cascade de sonorités et d’émotions

Le départ de Dave Fridmann a laissé Donahue et Grasshopper seuls aux commandes. « Nous l’avons enregistré dans notre propre studio prés de l’Hudson avec Grasshopper, Jesse Chandler (piano et saxophone) et Marion Genser (claviers) », explique Donahue. On peut d’ailleurs entendre le bruit des bateaux à vapeur et des chiens qui aboient. Martin Keys (basse) et Jeff Lipstein (batterie) complètent le line up. Mixé par Peter Katis (The National, Interpol), Born Horses marque une nouvelle rupture tout en perpétuant l’esprit de Deserter’s Songs. Ici, Donahue nous raconte ses histoires au lieu de les chanter : « Ce sont les éclaboussures et les ondulations qui vous troublent avant que votre étang intérieur ne revienne enfin au calme », dit-il. Grasshopper ajoute : « La création d’une musique autour des textes en prose de Jonathan s’apparente à un truc à la Brecht ou à la Kurt Weill, les mots suggérant des images et les images suggérant des ambiances. »

 

Cover

 

C’est au son d’une trompette semblant tout droit sortie d’un paysage désertique mexicain que débute le voyage dans l’esprit de Donahue. Mood Swings, morceau le plus long de l’album, avec ses sept minutes et quatorze secondes, s’écoule comme une pensée fugace. Une pensée chassée par une ode à l’amour éternel, Ancient Love, qui poursuit ce voyage musical dédié au temps qui passe. La chanson-titre, Born Horses, est « basée sur les fragments d’un rêve que j’ai fait et c’est un clin d’œil à moi et à Grasshopper qui se sentent différents de la plupart des gens depuis plusieurs décennies maintenant. Parfois, nous nous sentons très seuls en faisant ce que nous faisons, mais à d’autres moments, nous avons l’impression que c’est le meilleur cadeau possible », confie Donahue. Ce voyage poignant et lumineux se consumera dans l’up-tempo There’s Always Been A Bird In Me.

Vous l’aurez compris, ce Born Horses est une merveille aux multiples sonorités, allant du rock psychédélique au jazz, du folk à la pop, du baroque à l’ambient.

 

 

Born Horses disponible le 6 septembre 2024 via Bella Union.

En concert à Paris (Maroquinerie) le 13 novembre 2024.

 

 

Texte Lionel-Fabrice Chassaing