Les avant-premières de cinéma ont toujours été de grands moments de mode. Elles sont l’occasion pour les stars du grand écran de se montrer dans des tenues glamour et pour les grandes maisons de couture, qui leur prête ces tenues, de faire connaître leurs pièces au travers de la notoriété d’une célébrité ou simplement du succès d’un film.

Les Fashion Week n’ont pas le monopole de la haute couture. Yves Saint-Laurent habillait Catherine Deneuve, Givenchy sublimait Audrey Hepburn, Dior immortalisait Grace Kelly. Les collaborations entre les maisons de haute couture et les personnalités du grand écran sont nombreuses et ne datent pas d’hier. L’avant-première est une occasion privilégiée pour ces grands moments de mode.

Mais si l’avant-première d’un film est depuis toujours l’occasion de mettre en lumière des vêtements, un phénomène s’installe depuis quelques années : les tenues portées par les stars sont faites sur mesure pour les films, elles participent activement à sa promotion, jusqu’à en éclipser, parfois, le film lui-même.

Accorder la tenue au ton et au thème du film n’est pas rare. Bien souvent, les tenues du tapis rouge respectent la colorimétrie du film. Ainsi, les actrices de la série Hunger Games arboraient des robes rouges lors de la première du film, pour rappeler le feu, au centre de l’histoire. À l’avant-première mondiale, le casting de Black Panther: Wakanda Forever arborait des tenues aux couleurs assorties : noir, blanc, et surtout le violet, emblématique de la série de films. 

Mais ces dernières années, on observe un tournant. Les tenues ne sont plus l’accessoire des tapis rouges, mais les pièces maîtresses, transformant ainsi des événements cinéma en véritables moments mode. Celle qui est au centre de ce phénomène n’est autre que l’actrice est mannequin Zendaya. Depuis la série de films Spiderman, produit par Marvel, l’actrice, ne cesse de faire sensation avec des tenues non seulement splendides, mais surtout entièrement pensées pour faire écho au film.

L’actrice, qui s’est faite connaître dans la série Euphoria, est aujourd’hui considérée par de nombreux internautes comme la championne des avant-premières, les surprenant chaque fois davantage avec ses tenues. Qu’ils s’agissent de ses looks ultra travaillés pour la promotion des films Dune ou plus récemment de l’esthétique « tennis » lors de la promotion de Challenger, l’actrice, habillée par son inséparable styliste Las Roach, déchaîne les réseaux sociaux à chaque apparition.

Ses apparitions sur les tapis rouges cinéma sont si remarquées que le public, habitué à ce jeu des couleurs et des textures entre le vêtement et l’esthétique du film défendu, se trouve déçu lorsque l’actrice porte une robe simple pour la cérémonie des Oscars. On se dit : « c’est joli, mais encore… ? »

L’inventivité des tenues de certaines stars en pousse d’autres à faire de même. Cependant, cette course à l’ingéniosité n’échappe pas à la loi des tapis rouges qui veut que les femmes soient hautes en couleurs et les hommes toujours très sobres. Cela peut créer un certain déséquilibre. On se croirait à une fête d’Halloween où une seule personne n’a pas eu le mémo précisant que ça ne serait finalement pas costumé. C’était le cas lors de la promo de Furiosa, nouveau volet de la série de films emblématiques Mad Max, lorsque Anya Taylor-Joy arborait des tenues audacieuses aux côtés d’un Chris Hemsworth en costume gris… Si les hommes ont bien souvent des tenues plus simples sur les tapis rouges – éternel costume, quand ton règne prendra-t-il fin ? – le dépareillage ici est criant.

« Qu’il s’agisse d’un simple code couleur ou d’un travail au niveau des formes et des textures, le vêtement devient un outil de communication primordial lors des avant-premières. »

Le phénomène de mode au service de la promotion d’un film peut aller jusqu’à presque éclipser le film lui-même. Pour Barbie de Greta Gerwig, porté par Margot Robbie, actrice principale et membre de la production du film. La promotion du film lors des avant-premières, durant lesquelles les actrices et acteurs portaient des tenues à l’effigie du monde rose de Barbie, a fait tant de bruit que son succès en salle lui doit beaucoup. Plutôt que de parler du scénario, chaque semaine, les internautes se demandaient : « quelle sera la prochaine tenue de Barbie ? Pardon… de Margot Robbie ? »

En parlant de Barbie, dans la bataille qui a fait s’affronter le film de Greta Gerwig et l’Oppenheimer de Christopher Nolan, on remarque la différence des tenues sur les tapis rouges. Si l’un a déployé de grands moyens pour mettre en avant les tenues des acteurs et actrices – car après tout Barbie est une poupée que l’on habille – le second a joué le jeu de l’élégance sobre, respectant tout de même un code couleur, comme pour dire que la substance du film se trouvait ailleurs que dans les vêtements.

Qu’il s’agisse d’un simple code couleur ou d’un travail au niveau des formes et des textures, le vêtement devient un outil de communication primordial lors des avant-premières. Si le message politique a déjà été employé sur les tapis rouges, c’est aujourd’hui au service d’une stratégie marketing pour le film que les stars et leurs équipes sélectionnent les tenues portées. Il semble que chaque détail compte et les théories foisonnent à chaque apparition. Margot Robbie a-t-elle réellement porté du noir aux Oscars, au lieu du rose habituel, pour protester contre la mise au banc de son film ? Plus que jamais les yeux du public sont rivés sur les vêtements des célébrités lors des avant-premières, avides de découvrir l’ingéniosité des stylistes ou, peut-être, un message caché à leur intention.

Texte Anouk Ait Ouadda