Le chanteur et musicien français aux trois millions d’auditeurs mensuel sur Spotify revient sur son « dernier bébé » : Pygmalion, album sorti en mai dernier. Après son album Galatée, délivré un an auparavant, Vacra se dévoile davantage et approfondi son univers musical, toujours plus varié et riche d’influences. C’est dans un long entretien qu’il nous parle musique, inspiration et doute.
Galatée et Pygmalion font référence à la mythologie grecque, est ce que tu entretiens le même rapport amoureux pour la musique ?
On peut dire que je suis amoureux de ma musique. J’aime le travail qu’on a fait en studio avec toutes les équipes. Mais je pense que la musique appartient aux gens une fois qu’elle est sortie, parce qu’on peut venir me voir dans un an et me dire « j’ai rencontré ma copine/mon copain sur ce morceau » et à partir de ce moment le morceau appartient à leur histoire. Je considère la musique que je fais comme une extension de moi, mais ensuite les gens y ajoutent leurs histoires, ça ne m’appartient plus.
Sur la pochette de Pygmalion, tu es de face et éclairé alors que sur la pochette de Galatée, tu étais de trois-quarts et dans l’ombre, est ce que cela signifie que tu te révèles au public ?
Pour Galatée ce que je voulais dire, c’est que ma musique parle bien avant moi, c’est pour ça qu’elle est mise en avant et que je suis dans l’ombre. Avec les concerts, la tournée, on a rencontré le public, on s’est plus montré donc c’est devenu plus personnel. Ça me semblait logique de me dévoiler, mais je compte quand même rester discret.
Comment on reste discret quand on passe à la télé et qu’on fait des interviews, des concerts… ?
Je m’affiche publiquement pour la musique, mais en privé, je ne veux rien dévoiler. Je pense que rester discret, c’est garder en tête qu’il y a Vacra, le personnage public et que derrière, il y a un humain.
Est-ce que tu redoutes le jour où les gens ne verront que Vacra, et plus l’humain derrière, et que marcher dans les rues deviendra peut-être difficile ?
Non, pas vraiment. Je n’y pense pas. J’ai un public bienveillant qui me laisse tranquille et s’ils viennent me voir, c’est pour parler de ma musique tranquillement. Pour l’instant, je peux encore me balader comme je veux dans Paris, prendre le métro… Et si un jour, je ne peux plus me promener tranquillement, on ira à la montagne, pas grave (rire) !
« Je fais les choses très à l’instinct. Ma méthode, c’est que je n’ai pas de méthode, je crois. »
Sur la pochette de Pygmalion, le mannequin te chuchote quelque chose à l’oreille, il dit quoi ?
Le mannequin ne me dit rien de précis, le geste est plus là pour symboliser la complicité entre l’artiste et la musique, comme des amis. Je fais souvent ma musique sur le moment. Je n’aime pas beaucoup le travail de fond, je préfère vraiment trouver mon inspiration en fonction de ce qui m’arrive. Si une rencontre me touche, si je vois un truc dans la journée qui va me parler, je vais peut-être m’en servir pour ma musique ensuite. Je n’écris pas en studio par exemple. Je rentre dans la cabine sans savoir ce que je vais faire à l’avance et je lance deux phrases et puis je ressors, je parle avec des gens et puis j’y retourne. Je fais les choses très à l’instinct. Ma méthode, c’est que je n’ai pas de méthode, je crois.
Comment la musique est entrée dans ta vie ?
La musique a toujours fait partie de ma vie. J’ai eu la chance d’avoir des parents qui m’ont introduit à la musique très jeune. J’ai commencé la guitare à neuf ans, mais je me suis vite ennuyé pendant les cours. On a eu la chance de grandir avec les tutos sur YouTube, je pouvais progresser de moi-même. Mon professeur nous faisait apprendre beaucoup de solfège, c’était très mathématique, ça devenait ennuyant. YouTube permettait d’avancer plus vite, c’est notre chance.
Quels sont les artistes qui ont changé ta vision de la musique ?
Il y a Michael Jackson, évidemment. Parce qu’il avait tout. Plus récemment, il y a Burna Boy, qui à chaque projet me gifle. J’adore Mylène Farmer aussi. J’aime vraiment de tout, c’est ce qui fait le mélange que j’ai dans la tête et qui donne corps à ma musique.
Dans Avec toi tu dis « Je sais que c’est cliché d’écrire sur ce que l’on ressent », est ce que tu avoues dans ta musique, des choses que tu ne dirais pas dans la vraie vie ?
Non, je suis très expressif dans la vie. Je ne garde pas trop mes émotions pour moi, je sors tout. Je n’ai pas de honte à dire ce que je pense. Je suis très spontané dans ma vie au niveau des émotions aussi. Parfois, ce n’est pas le bon moment, mais je préfère ne pas me forcer.
Dans une autre interview, tu disais « là, c’est un an de réussite, mais derrière, il y a quinze ans d’échecs », comment on persévère pendant autant de temps ?
Honnêtement, c’est passé super vite. Comme la musique, c’est ma grande passion, ma vie est encore plus triste sans elle. Et quinze ans d’échecs avec la musique, c’est quand même passé comme dans un rêve. C’est la seule vie que je veux avoir. Ces années m’ont servi à tout. Même si parfois, je me demandais si c’était le bon chemin, je ne pouvais pas croire que je n’étais pas fait pour ça.
Est-ce que dans les moments de doute ça sert d’entendre les encouragements des proches ou est ce qu’il n’y a que notre propre avis qui compte pour croire en soi ?
Bien sur les paroles des proches sont importantes et font très plaisir, mais je pense que la seule chose qui peut nous soigner, nous les artistes, c’est de se réaliser. Malgré tout, ce ne sont pas nos proches qui vont nous sauver. Le doute est normal pour un artiste. Et je pense que c’est ça qui nous fait avancer. Le jour où on ne doute plus c’est là que c’est fini. C’est important de se remettre en question, dans tous les aspects de la vie. Doutez ! Je vous le souhaite (rire) !
Vacra sera prochainement en concert au Delta Festival à Marseille, le mercredi 4 septembre. À la rentrée, sa tournée Pygmalion Tour, débutera le 10 octobre par un concert au Botanique à Bruxelles et se poursuivra jusqu’en fin novembre avec dix autres dates partout en France.
Texte Ait Ouadda Anouk
Photo Henrik Jessen