Il n’aura fallu qu’une poignée de remixes et maxis pour que les deux frères Guy et Howard Lawrence donnent le la du renouveau house « made in UK ». Une nouvelle vague dont ils sont les fers de lance, place confirmée par un premier album émaillé de tubes où brillaient les voix de Sam Smith ou celles de London Grammar. Nous retrouvons nos deux têtes bondes pour leur second opus, un exercice toujours périlleux surtout après pareil succès. Et leur nouveau projet s’intitule Caracal et compte de nombreux nouveaux invités comme Kwabs, The Weeknd, Miguel ou encore Lorde.

Quand avez-vous décidé de donner un successeur à Settle, votre éminent premier album ?

Guy : À vrai dire, nous n’avons jamais vraiment arrêté d’écrire et de composer. Mais c’est en septembre l’an dernier que nous avons commencé à plancher sur notre second album.

Howard : Je pense que c’est lorsque nous avons écrit « Willing & Able » (chanté par Kwabs) que nous nous sommes dit : ça y est, ce morceau sera pour notre prochain album.

Quelle était votre envie avec ce nouvel album ?

Guy : On voulait écrire de vraies chansons avec une structure pop, style couplet-refrain-couplet.

D’où tirez-vous votre inspiration lorsque vous écrivez vos chansons ?

Howard : C’est un mélange de beaucoup de choses, des événements personnels mais aussi dans notre entourage. Et comme on tourne beaucoup, on rencontre beaucoup de monde. Et on se remémore certaines situations et émotions. On veut raconter des choses qui touchent les gens, des situations auxquelles tout un chacun peut s’identifier.

Comment travaillez-vous avec les artistes que vous invitez à participer à votre musique ?

Howard : En fait, nous travaillons à l’ancienne, on se rejoint en studio autour d’un piano et on travaille ensemble. On ne pourrait pas imaginer envoyer des instrus et que les chanteurs enregistrent de leur côté comme cela se passe souvent aujourd’hui. Créer de la musique ensemble, ce sont des moments rares et on adore collaborer.

Quel est le processus dans ces collaborations ? Vous vous parlez en amont ?

Howard : Cela dépend des artistes. Avec certains, nous nous connaissons bien et ce sont des amis, comme Sam Smith par exemple. Pour d’autres comme The Weeknd, nous nous sommes parlés avant, nous avons échangé des idées au préalable. Cela débute avant tout avec beaucoup de respect et l’appréciation mutuelle de notre travail.

Qui a été le premier nom parmi les nouveaux venus sur l’album ?

Guy : On avait réalisé un medley de « Royals » et « White Noise » avec Lorde (et AlunaGeorge) lors des Brit Awards en février l’an dernier. Comme on aime ce qu’elle fait et qu’on s’était bien entendus, on s’était dit qu’on aimerait concrétiser cela avec un morceau. Et c’est chose faite sur l’album avec le morceau « Magnets ». Il a juste fallu attendre qu’elle ait un peu de temps libre !

Howard : Gregory Porter a été aussi un des premiers invités que l’on voulait embarquer sur notre projet. D’ailleurs, lors de l’enregistrement il s’est passé quelque chose de spécial : on terminait d’enregistrer le morceau et on voulait ajouter des « ad libs » et des chœurs. Gregory s’est mis tout naturellement à chanter avec sa voix puissante en tenant la note pendant presque une minute : c’était la voix la plus forte et longue qu’on n’ait jamais entendue. On était littéralement scotchés. Et lorsqu’il s’est arrêté de chanter, il nous a lancés tout naturellement : « Ce sera vos “ad libs” d’accord ? » On ne pouvait qu’acquiescer. On n’avait pas imaginé vivre un truc pareil !

Votre nouvel album semble s’éloigner un peu des dancefloors pour une approche plus mélodique, c’était conscient de votre part ?

Guy : Notre volonté était d’écrire de vraies chansons et d’avoir une meilleure qualité de production. D’ailleurs, nous avons produit et mixé l’album nous-mêmes.

Howard : On voulait définitivement parvenir à quelque chose de plus musical et plus complexe à la fois.

Howard, sur le premier album tu chantais sur deux titres mais cette fois tu chantes sur cinq titres : tu te sens vraiment plus à l’aise comme chanteur aujourd’hui ?

Howard : En fait c’est venu avec nos prestations live. On voulait vraiment établir une connexion plus directe avec notre public et c’est difficile lorsque le vocaliste n’est pas présent.

Guy : On voulait ajouter des chansons que l’on pourrait interpréter complètement en live.

Et pour ce faire, as-tu pris des leçons de chant ?

Howard : Oui, j’ai pris des leçons mais c’est surtout un long apprentissage. Je me suis mis à chanter tout le temps !

Guy : Ça oui, il chante vraiment tout le temps ! [Rires !] Moi, il n’y a que « F For You » que je peux chanter correctement !

Vous êtes frères et vous travaillez ensembles, êtes-vous toujours d’accord ou cela vous arrive-t-il d’avoir de vrais désaccords ?

Howard : En fait, il y a beaucoup de choses sur lesquelles on n’est pas forcément d’accord, mais on est honnêtes l’un envers l’autre : on se dit les choses sans animosité. La seule chose c’est que lorsque l’un de nous deux veut changer quelque chose dans un morceau, cela doit être forcément pour le mieux.

Cela vous est-il arrivé que la collaboration en studio ne fonctionne pas avec un artiste ?

Howard : Étant donné que l’on parle beaucoup en amont et que l’on échange des idées avant, cela évite que ce genre de désagrément se produise. Mais oui, on n’est jamais à l’abri de ce type de déconvenue.

Guy : Parfois il y a trop d’ego dans le studio et trop d’idées qui partent dans tous les sens.

Avez-vous eu des demandes d’artistes qui vous ont approchés pour avoir un morceau produit par vous sur leur album ?

Guy : Nous n’avons jamais eu à refuser directement, mais notre management l’a fait pour nous : ils sont là pour ça après tout ! [Rires !]

Puisque ce nouvel album s’affranchit de la scène club, vous allez reconnecter à l’aide de remixes et de versions taillées pour le dancefloor ?

Guy : Oui bien sûr, pour le titre avec Gregory Porter on a déjà des remixes signés Julio Bashmore, Armand Van Helden ou Gus Pirelli. Je pense qu’on aura des remixes sur tous les morceaux de l’album !

Lors de votre dernier passage à Paris, vous avez littéralement retourné La Cigale à tel point que le sol en vibrait, quand revenez-vous avec votre nouveau show ?

Guy : On a déjà incorporé cinq nouveaux morceaux à notre live mais ce sera plus élaboré et complet à partir de septembre et en octobre, on sera en tournée aux États-Unis. Je pense que ce sera un peu plus tard pour les autres dates européennes.

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Depuis cette année, vous avez votre propre festival, un peu comme Groove Armada a créé Lovebox en son temps. Pourquoi avoir créé ce festival ?

Howard : En fait, notre management avait une petite soirée à Londres et celle-ci n’a fait que croître de plus en plus, en même temps que notre propre notoriété. Alors nous nous sommes associés avec le groupe Rudimental pour monter un festival qui nous ressemble. La première édition a eu lieu les 6 et 7 juin derniers près de l’aéroport de Brighton et cela s’appelle Wild Life, avec nous mais aussi notre ami Sam Smith, le rappeur Nas, George Ezra, Mark Ronson, le Wu-Tang Clan, Jamie xx… On a mêlé les artistes rap et soul avec les artistes électroniques et ça a été génial !

Du nom de votre festival « Wild Life » au titre de votre album Caracal, il n’y a qu’un pas : pourquoi ce titre ?

Guy : Lorsque tu fais un album personnel, tu peux trouver un thème ou un concept mais lorsque presque chaque chanson est interprétée par un chanteur différent, c’est difficile de lier tout cela sous un seul nom… Alors nous avons opté pour le nom de notre chat préféré, le caracal ! Un animal assez peu connu d’ailleurs. Un animal assez sauvage. Et puis, effectivement, il y a une cohérence avec le nom de notre festival : bien vu !

Vous deux qui êtes d’éminents producteurs, qui sont les artistes ou producteurs que vous appréciez ?

Guy : En ce moment j’aime beaucoup ce qui se passe sur la scène de Montréal comme Kaytranada, Pomo… En terme de songwriters on aime beaucoup Kwabs, qui est sur l’album d’ailleurs ! [Rires]

En guise de mot de la fin, qu’aimeriez ajouter au sujet de votre album ?

Howard : On espère qu’avec cet album on va pouvoir se démarquer un peu de l’étiquette house qu’on a eue à nos débuts, on ne veut pas se limiter à un genre, sur cet album on mêle la pop, le R’n’B, le disco lent, la house sans distinction.

Guy : On veut juste être Disclosure, on a un son à nous mais on ne peut pas être étiqueté sous un style particulier. Et je citerais une phrase extraite de notre chanson : « Willing & Able, cards on the table » (Vouloir et pouvoir, cartes sur table).

Disclosure

“Caracal”

(Barclay/Universal)