Le Trabendo, 11 juillet 2024, nous arrivons dans une salle bondée. Nous trouvons donc refuge à la régie lumière. Le public, majoritairement très jeune, est prêt à immortaliser D4vd dès son entrée en scène, téléphones en main.

 

À seulement 19 ans, D4vd est un pur produit de la génération Z. Gamer devenu artiste par la force des choses, il se souvient : « J’ai commencé à jouer à Fortnite en 2017, dès la sortie du jeu. Je voulais devenir pro et gagner de l’argent, alors je jouais environ douze heures par jour et postais mes vidéos de gameplay sur YouTube. » Cependant, ses vidéos sont rapidement supprimées pour atteinte aux droits d’auteur. David Burke, de son vrai nom, est un solitaire. À l’école, il volait des cahiers pour pouvoir écrire quand il le voulait, tout en téléchargeant des mangas japonais page par page sur son Motorola.

 

LFC

 

Fin 2021, David, scolarisé à domicile à Houston, réalise que ses amis d’école ne lui donnent plus de nouvelles. « Aucun de mes amis ne me tendait la main. Ils ne m’envoyaient pas de messages. Ils ne m’ont pas demandé « Yo, pourquoi tu n’étais pas à l’école aujourd’hui ? ». On dirait que les gens ne s’intéressent à vous que si cela leur profite ». Durant cette période, ses journées sont rythmées : un travail chez Starbucks, Fortnite, quelques cours à domicile et l’écriture de poèmes.

Sur les conseils de sa mère, il commence à composer sa propre musique pour accompagner ses vidéos. Mais D4vd ne connait pas la musique. Qu’à cela ne tienne, il composera sur son téléphone avec BandLab. Bien lui en a pris, car en juillet 2022, Romantic Homicide, un titre indie-rock déchirant, atteint un milliard de streams dans le monde, certifié Or aux États-Unis et Platine au Canada. Il créé dans la vidéo un alter ego, directement inspiré des mangas japonais. « Le personnage que vous voyez ici aujourd’hui s’appelle IT4MI, ce qui signifie douleur en japonais. Inspiré par les mangas et les animes, il est le principal antagoniste de tout mon projet. Il porte un bandeau sur les yeux dans le seul but de ne pas être tenu responsable de la douleur qu’il cause », explique t-il.

 

 

Un contrat avec Darkroom Records (le label de Billie Eilish) lui permet de sortir son premier EP Petals to Thorns, entièrement créé sur son téléphone. Depuis, tout le monde se l’arrache. My House Is Not A Home, titre d’un de ses derniers singles, donne le nom à sa tournée.

Après un passage remarqué à We Love Green l’an dernier, le voilà de retour en tête d’affiche à Paris, grâce à AEG . Le noir s’installe, les neuf cent fans se mettent à crier. Devan Monroe, qui a étudié auprès de grands noms de la musique tels que Patrice Rushen, prend place derrière ses toms. Mike Zara saisit sa guitare prés de son MD. Les deux musiciens  entament alors une intro musicale. Le public est en liesse lorsque D4vd, en pantalon baggy et hoodie, entre sur Take Me To The Sun, provoquant presque l’hystérie et un raz de marée de portables. Le jeune artiste occupe la scène de long en large, effectuant deux saltos arrière devant des fans captivés. Les titres Bleed Out, This Is How It Feels et Feel It s’enchaînent, souvent chantés en chœur par le public, avant de conclure la soirée avec Romantic Homicide. Deux moments touchants : sa petite sœur qui chante et danse avec lui sur un titre, et le nouveau single There Goes My Baby, interprété avec Scott James à la guitare acoustique. Sorti le 12 juillet dernier, ce titre est également produit par James, qui assurait l’ouverture du concert et produit l’album en préparation.

 

D4vd live et setlist © LFC

 

D4vd interagit constamment avec son public, les ambiançant, leur demandant d’allumer leur torche et de lever les bras en l’air, empruntant même des téléphones pour se filmer pendant le live. Même si le show est très cadré et ne déroge pas à celui de la veille, D4vd est une vraie boule d’énergie, en communion avec son public. Il finira la soirée sans hoodie, lancé dans la foule, en partageant un moment d’échange et de dédicaces.

Sa capacité à se connecter avec les fans, combinée à son talent brut et à son énergie, a démontré qu’il n’était pas seulement un talent émergent, mais une véritable force dans le paysage musical actuel.

There Goes My Baby disponible via Darkroom/Interscope Records

 

Texte Lionel-Fabrice Chassaing