La cérémonie à laquelle nous convie le septet écossais The Joy Hotel est un voyage musical dans l’âme humaine. Ceremony se présente comme la bande-son d’un film imaginaire, offrant une expérience immersive, à la fois auditive et visuelle. Chaque morceau, allant des dynamiques relationnelles complexes de I Decline à l’épic et noisy Small Mercy, est une aventure unique, mais profondément universelle.
L’Énergie de Jeremiah et l’amertume de Twentry Three (Comedy)
Le premier single, Jeremiah, capture parfaitement le style unique de The Joy Hotel, mélangeant de genres musicaux allant du psych rock à la country, en passant par l’indie pop moderne avec des sonorités psychédéliques. La chanteuse Emme Woods décrit Jeremiah comme une réflexion sur l’approche de l’inconnu et la confrontation avec la mort, vue à travers des perspectives opposées : l’une optimiste, croyant en la miséricorde divine, et l’autre, plongée dans une anxiété existentielle.
Twenty Three (Comedy) en deux parties reflète l’essence même du groupe. Luke Boyce, guitariste, explique que ce titre « est plein d’harmonie, de changements de rythme et de signature temporelle, et s’est construit en permettant à la chanson de changer au fur et à mesure que nous l’écrivions. Elle contraste la structure plus traditionnelle des autres chansons de l’album avec quelque chose de plus libre ».
Une alchimie sonore
Enregistré en 2021 en douze jours au légendaire studio Rockfield au Pays de Galles, The Joy Hotel a saisi l’essence de leur son, avec des arrangements rappelant la scène psychédélique des années 60. Derrière la console de Chris McCrory, Ceremony possède une qualité cinématographique unique. Le chanteur Luke Boyce explique « Nous voulions nous rapprocher le plus possible de la façon dont nous sonnions réellement et ne pas passer une tonne de temps à gommer les défauts de la musique. À travers cet album, nous avons voulu résumer la quête de sens dans les rituels quotidiens et la célébration de la vie. Chaque chanson est une pièce du puzzle, formant une œuvre continue et cohérente ».
La genèse créative de The Joy Hotel
Le duo fondateur, Emme Woods et Luke Boyce, se rencontrent à l’été 2018. Emme, avec sa voix puissante et doucement éraillée, balade sa musique délicieusement retro dans divers lieux de Glasgow. Malgré la chute de MyPledge, elle publie un album, It’s Ma Party, en 2019, accompagné d’un court-métrage. Luke Boyce, quant à lui, a commencé la guitare à l’âge de dix ans et joue dans un groupe qu’il a monté en 2013 avec son frère Jack, batteur, nommé Vagabond Poets.
L’amitié entre Emme et Luke se transforme en un solide partenariat d’écriture, enrichi par un amour commun pour la pop vintage et les arrangements. Le duo a donc beaucoup écrit avant d’entrer en studio, d’autant que la pandémie est passée par là. Six autres membres les rejoignent : Jack, le frère de Luke, Juan Laforet multi-instrumentaliste, et auteur de trois albums, Jack Borrill bassiste, Jenny Clifford, guitariste qui délaisse pour un temps le jazz et Scott Flanagan, à la guitare acoustique formant une véritable usine à créativité. « Nous travaillons toujours en amont avec Emme les titres, puis nous les amenons en studio et nous laissons le groupe l’interpréter et la faire évoluer vers ce qui se trouve sur l’album. Notre collaboration n’a fait que s’intensifier au fil du temps », explique Luke.
Une célébration visuelle et musicale
En plus de l’album, The Joy Hotel a documenté l’ensemble du process de l’enregistrement de Ceremony. Un film intitulé Come The Ringing Bell capture la création de l’opus dans la campagne écossaise, où l’on peut croiser chats et chevaux. Cet enregistrement est à l’image du visuel de l’album, inspirée par la pochette d’Underground de Thelonious Monk, encombré comme l’est le studio, mais qui, au-delà de cela, reflète surtout l’encombrement organisé de la vie quotidienne, chaque objet représentant les aspects de la vie recueillis en chemin de cet album.

Un avenir déjà bien engagé
C’est lors de leurs performances fiévreuses que The Joy Hotel prend toute sa dimension. Avec des prestations remarquées au Royaume-Uni, notamment au Great Escape, et en Europe, le groupe se forge une solide réputation sur la scène musicale européenne. Véritable évasion de la banalité et de la mélancolie, leurs performances se veulent un exutoire curatif.
La signature chez So Recordings (Placebo, Band Of Skulls) leur permet de donner une importante visibilité à Ceremony. Le deuxième album semble déjà bien engagé voire terminé. « Tout est si désinvolte avec l’industrie de la musique. C’est tellement éphémère, les gens ne font que défiler. Nous voulions faire un vrai corpus de travail » explique Emme.
Passionnés et passionnants, The Joy Hotel, en explorant des thèmes profonds et universels, célèbre la vie avec une passion indéniable.
Ceremony est disponible via So Recordings.
Texte Lionel-Fabrice Chassaing