Modzik a rencontré Wesley Keith Schultz, dit Wes, le leader du groupe The Lumineers juste avant leur concert à la mythique salle Pleyel. L’occasion de revenir sur la raison de leur succès, les années passées sur la route et le dénouement d’une campagne électorale américaine intense.

Salut Wes, j’étais censé rencontrer Neyla, j’avais donc préparé des questions pour elle, mais tu peux certainement y répondre ?

Pas de problème ! Je vais faire mon possible pour y répondre !

Elle a été la première à postuler à votre annonce pour un violoncelliste. Pourquoi l’avoir choisi sans en rencontrer d’autres au préalable ?

En fait on avait parlé à un autre candidat, par téléphone, et il se trouve que cette personne était déjà d’un âge moyen donc on ne le pensait pas capable de partir dans de si longues tournées. Et Neyla était donc l’autre personne a répondre aussi rapidement, et de manière si enthousiaste. Elle nous a expliqué qu’elle venait de décrocher son diplôme de prof de musique, et qu’elle avait une offre d’emploi sur la table pour enseigner la musique à de jeunes enfants. On s’est dit que ce serait intéressant d’avoir une fille avec nous, donc on lui a proposé de partir sur les routes avec nous, pour tenter le truc. Et il se trouve qu’elle nous a apporté beaucoup.

C’était une rapide mais sage décision donc. Est ce que ça a été difficile pour elle d’intégrer votre relation artistique ?

Jeremiah et moi écrivons, composons, enregistrons, tournons, jouons et sommes très bons amis depuis 6 ans maintenant, donc je peux aisément imaginer à quel point débarquer dans une relation aussi exclusive peut être compliqué. Il y a eu un temps d’adaptation, elle a eu beaucoup de patience, elle s’est rendue utile et c’est tout naturellement qu’on a commencé à se comporter comme un groupe. 

Qu’est ce que cette histoire à propos du nom de votre groupe, The Lumineers ?

Avec Jeremiah on devait jouer dans un club de Jersey City , le Lucky Seven, et il y avait un MC, chose assez rare à l’époque, et le mec monte sur scène le calendrier à la main, pour nous annoncer. Sauf que le bougre s’est reporté à la semaine suivante pour annoncer le nom du groupe. Il nous a donc appelé Lumineers. Ces mecs là avaient piqué le nom a une entreprise de cabinets dentaires. On a trouvé le nom assez cool et on y a ajouté le préfixe quand on allait signer notre premier accord pour un album. On a vérifié que Lumineers n’avaient jamais rien sorti et le nom est devenu le nôtre.

Vous avez donc lancé votre carrière, engagé Neyla, puis continuer vos shows. Et ce bon vieux Michel Gondry a décidé d’utiliser votre morceau Ho Hey pour son film l’Ecume des Jours. Vous le connaissiez ?

Jeremiah était assez fan de ses clips, il m’avait même montré un DVD avec pas mal de clips. On était content qu’il l’utilise pour l’un de ses films et pas pour une publicité, car ces morceaux perdent tellement de leur essence quand ils sont matraqués. C’était un honneur, vraiment.

Ça a changé quelque chose pour votre notoriété ?

Oui, on ne s’y attendait pas mais même aux Etats-Unis les gens ont commencé à beaucoup parler de nous, à nous trouver grâce au référencement. Ça nous a permis de faire encore plus de shows, des shows plus grands, plus loin. Et nous voilà ici ce soir par exemple, dans ce beau théâtre.

 

Vous connaissiez la salle Pleyel avant de venir ?

Non, pas du tout. Mais je suppose qu’elle était dédiée à la musique classique avant d’accueillir des groupes comme le nôtre. L’acoustique a l’air vraiment exceptionnelle. On a pensé chanter un ou deux morceaux sans les micros ce soir d’ailleurs. (ce qu’ils ont fait, avec brio, ndlr)

Revenons à votre carrière, vous tutoyez le succès grâce à Gondry, et puis consécration, votre titre Gale Song est utilisé dans le volet 2 des Hunger Games. Ça a du tout changé cette fois.

A la base on nous avait seulement demandé de participer à l’écriture de Hanging Tree, le morceau chanté par Jennifer Lawrence dans la BO du film. On a écrit la mélodie, et les paroles avec Suzanne Collins (l’auteure de Hunger Games, ndlr), et ils ont décidé de nous laisser faire un autre morceau par la suite : Gale Song.

Comment vous avez ressenti la différence entre votre premier et votre second album ?

On a écrit notre premier album comme un petit groupe de rue, sans toute la pression des tournées, des festivals et des gros concerts. Pour le second, on sonne comme un vrai groupe avec des moyens, il y a plus d’instrumentalisation électrique.

Et du point de vue de l’écriture ?

Le premier album est définitivement plus personnel dans les thèmes. Avec quelques exceptions. Le second est bien plus storytellé, on parle bien plus de ce qu’on a vécu ces derniers temps. Il y a ce morceau, Cleopatra, qui parle de cette chauffeuse de taxi qu’on a rencontré en Géorgie. Elle a eu une sale vie, très difficile. Le morceau et le clip lui sont dédiés.

 

C’est ton morceau préféré sur votre album ?

Ah non ! Mon morceau préféré change tout le temps, mais j’avoue avoir une affection particulière pour Angela, parce qu’il a été écrit dans un pur style morceau-studio. Sur les 11 morceaux de l’album, 10 étaient déjà écrits avant l’entrée en studio, et plus on passait de temps dans le studio, plus les idées fusaient. Et ce morceau, Angela, est un peu sorti de nulle part. On s’est choqués nous même pour tout te dire. C’était très méditatif comme conception, presque mécanique en fait. Pour en revenir à ta question précédente, sur le premier album on a voulu donner tout ce qu’on avait, on voulait montrer qui on était. Quand on a eu la chance de faire le second album, on s’est dit qu’il fallait qu’on prenne notre temps et qu’on continue à chercher l’émotion. Beaucoup de groupes qui percent grâce à leur premier album se font manger par la machine. Entre deux tournées inhumaines, ils sont poussés en studio dans un laps de temps très court et repartent en tournée. Tu ne trouves pas l’émotion comme ça. On a voulu éviter ça.

Votre tournée risque d’être longue ?

Moins longue que pour le premier album, mais beaucoup plus compacte oui. Je pense qu’on est prêts. On aime tourner, car on présente le travail qu’on a fait. Si tu veux réussir en tant que groupe, tu dois faire les bons compromis, gérer ton temps et ta créativité.

Grand jour pour les Etats-Unis. Tu as voté par procuration ? 

Bien sûr, j’ai surtout passé mon temps à regarder les infos à l’hôtel. Je suis confiant. Hillary Clinton est le choix le moins pire, elle va gagner. Je suis tellement effrayé, même si ce mec n’est pas un vrai leader, et que je ne crois pas une seule seconde qu’il sera président.


L’album Cleopatra est toujours disponible (avec un joli t-shirt).