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Ce jeudi 3 avril, Les Étoiles vibraient d’une énergie particulière. On y célébrait la sortie d’Amour bandit, l’album d’Émilie Marsh, paru le 21 mars.

 

 

 

Une ambiance intimiste et un public de tous âges, uni par l’attente. Puis, Émilie Marsh est apparue, et la salle s’est électrisée au son saturé des guitares. Au-delà de cette énergie débordante, l’émotion. La chanteuse a partagé avec son public des instants de vie, parlant avec amour de sa compagne et évoquant avec une sincérité poignante sa regrettée amie, l’artiste Dani.

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Des mots simples et percutants, à l’image des confidences qu’Émilie Marsh faisait à la rédaction une semaine plus tôt. C’était au Rosa Bonheur, bar queer des Buttes Chaumont, dont la collaboratrice de Zouzou, la directrice, Cécile Erhard, est aussi l’heureuse élue du cœur de la chanteuse rock.

 

 

Amour bandit est décrit comme ton album le plus intime à ce jour. Comment as-tu trouvé le courage de te livrer aussi facilement ?

Ce n’était pas une question de courage, mais plutôt une nécessité. À l’été 2022, j’ai vécu deux événements marquants : la perte de Dani, une chanteuse avec qui je travaillais depuis sept ans, et une rencontre amoureuse intense. Ces deux expériences, le deuil et l’amour, se sont produites simultanément. Je ne pensais pas faire un troisième album à ce moment-là, mais ces émotions ont donné naissance à toutes les chansons du disque. J’ai tout écrit fin août, après ces événements. J’avais besoin de raconter cette histoire. Il y avait un lien symbolique entre un départ et une arrivée, et mettre cela en chanson était mon meilleur moyen d’expression. C’était nécessaire pour moi.

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« J’avais besoin de raconter cette histoire. Il y avait un lien symbolique entre un départ et une arrivée, et mettre cela en chanson était mon meilleur moyen d’expression. C’était nécessaire pour moi. »

 

Comment as-tu réussi à équilibrer ces émotions contradictoires entre le deuil et l’amour ?

Ces émotions sont opposées, mais elles sont tout aussi intenses et ont une racine commune : l’amour. Une des dernières choses que Dani m’a dite était qu’elle me tiendrait toujours la main. Elle savait que cet amour arrivait dans ma vie et qu’elle me laissait entre de bonnes mains. Son départ a pris sens dans ma vie, malgré sa brutalité. Paradoxalement, c’était très dur mais aussi très beau. Le dernier concert que j’ai fait avec elle était à Perpignan, devant la cathédrale de sa ville natale. Un mois plus tard, c’est là que nous l’avons enterrée. Ce moment a créé une boucle symbolique très forte.

 

Comment ton processus d’écriture a-t-il évolué entre Nevada et Amour bandit ?

Il y a clairement un avant et un après. Dans mes albums précédents, j’avais tendance à écrire de manière plus imagée, avec des détours poétiques. Dans Amour bandit, tout ce que je raconte est vrai. J’ai écrit de façon beaucoup plus frontale, brute et sensuelle. Cet album parle davantage du corps et est plus affirmé sur certains thèmes comme la sexualité. Je pense que cela vient aussi avec l’âge et la confiance acquise au fil des années. Dani m’a beaucoup influencée dans cette affirmation de soi, tout comme pour cet amour qui est arrivé dans ma vie.

 

Comment ta collaboration avec Dani a-t-elle influencé ton approche musicale et ton écriture ?

J’étais sa guitariste pendant sept ans avant de composer son dernier album. Notre collaboration était unique : nous n’avions pas besoin de parler pour créer ensemble. Elle m’a beaucoup appris sur l’interprétation musicale : elle avait cette distance ironique dans sa manière de chanter qui lui donnait une classe incroyable. Elle m’a aussi transmis son amour pour la nuit et son côté « bandit ». Cette confiance qu’elle m’a donnée continue même après son départ.

 

Tu abordes des thèmes comme le désir et la sexualité dans cet album d’une manière plus directe. Comment as-tu trouvé cette confiance ?

Cela vient avec le temps et les expériences personnelles. Dans cet album, j’affirme aussi mon identité en tant que femme aimant une femme. Nous avons réalisé un clip très queer pour que chacun puisse s’y reconnaître, quelle que soit son identité. C’est la première fois que je vais aussi loin dans le côté charnel de mes chansons, et j’en suis fière.

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« Dans cet album, j’affirme aussi mon identité en tant que femme aimant une femme. Nous avons réalisé un clip très queer pour que chacun puisse s’y reconnaître, quelle que soit son identité. »

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Ton expérience en tant que guitariste a-t-elle influencé ton approche de la composition ?

Absolument. Mon jeu de guitare s’est beaucoup exprimé sur scène ou dans mes collaborations avec d’autres artistes comme Dani ou Jil Caplan. Mais c’est la première fois que je mets autant en avant mon côté guitariste sur un album personnel. Amour bandit est très épuré : guitares, basse et batterie uniquement. Cela reflète davantage ce que je suis sur scène.

 

Enfin, la chanson Phoenix semble se démarquer thématiquement du reste de l’album. Peux-tu nous en dire plus ?

Phoenix est différente car elle date d’un peu avant les autres chansons de l’album. Elle parle du fait de se débarrasser des histoires passées pour vivre de nouvelles expériences. Elle avait du sens dans l’album grâce à son vocabulaire lié au thème du « bandit » et au côté symbolique du phénix.

 

 

Texte Tiphaine Riant

Image mise en avant Cécile Erhard