Du 6 au 13 octobre, à Paris et pour sa troisième édition: le Festival Viva Mexico confirma son rôle de dénicheurs de talents et fît rayonner la diversité culturelle et créatrice du Mexique. D’une sélection éclectique de courts et longs métrages, table-rondes ou ateliers: cette semaine riche en rencontres fut plus que jamais placée sous le signe de l’échange et de la découverte. Inconcevable donc pour l’équipe de Modzik de ne pas succomber au charme latin de Sofia Espinosa de passage dans la capitale pour nous parler de Gloria, le film événement du réalisateur suisse Christian Keller, en première européenne.

Sofia Espinosa Carrasco, née à Mexico en 1989 est actrice pour le théâtre et la télévision, scénariste et productrice. Après des études à Mexico, New York et en Argentine,elle obtient en 2011 une bourse du FONCA. Sofia apparaît dans plusieurs films «La niña en la piedra» de Maryse Sistach, pour lequel a été nominée aux Ariel pour la meilleure actrice ; «Vete Más lejos Alicia», de Elisa Miller, qui lui a valu le prix de meilleure actrice au Festval de Guanajuato en 2011; elle apparaît également dans plusieurs courts-métrages : «Ver llover», de Elisa Miller, Palme d’Or du Festival de Cannes 2007; « Beyond the Mexique Bay », qui côturait la Semaine de la Critique à Cannes en 2009. Pour « Los Bañistas », de Max Zunino et montré à Viva Mexico: elle est non seulement actrice mais aussi scénariste et productrice.

.Gloria est le premier long métrage du réalisateur Christian Keller. Un projet accouché à l’évidence dans la douleur puisque il développe ce biopic depuis une dizaine d’années. Pourriez-vous nous raconter comment le metteur en scène vous a proposé ce premier rôle qui, au regard de la popularité de Gloria Trevi dans votre pays, à dû vous faire réfléchir à deux fois avant d’accepter telle responsabilité.

Tout est une question d’intuition. Je connaissais aussi le travail de Sabina Berma, la scénariste, que je savais très intelligente. J’étais donc tout de suite en confiance. Cette histoire est de toute façon tellement forte que j’étais très excitée quand j’ai appris que le metteur en scène souhaitait me rencontrer. Après avoir échangé, j’étais persuadé de son érudition et je considérais comme une chance le fait qu’il soit suisse est donc complètement étranger aux affects inhérents aux mexicains sur cette tragédie. Aucune contamination, de parti pris. Et puis il est suisse non, alors il est neutre (rires)?! Les mexicains, culturellement, ont un vrai penchant pour le mélodrame. C’était donc une chance qu’il tire le film vers quelque chose de différent.

Justement. N’est-ce pas ici le symbole le plus pertinent du visage du cinéma comme des gens? Un peu schizophrène, entre le divertissement assumé de la pop acidulé et une population qui souffre encore aujourd’hui d’avoir regardé ailleurs que dans la chambre… C’est une réflexion que nous avons eu ici il y a une dizaine d’années quand le groupe de rock le plus respecté de notre pays, Noir Désir, a explosé. Des amants maudits, la prison, la célébrité… Le parallèle me parait évident. Non pas au niveau des faits mais de la réception du public. Ici, tout le monde a sa version mais Détroit, son nouveau groupe connaît un succès énorme.

Je suis d’accord. Mais le public est friand de ce genre d’histoires. Quand les stars renaissent tel un Phénix. Pour me préparer, je suis allé voir un concert de Gloria Trevi. Toujours aussi trash, provoc et rock’n’roll, elle diffusait sur la scène des images d’elle en prison! Et elle a encore plus de succès qu’avant! Impossible de nier le voyeurisme mais c’est aussi une manière de surmonter ce passé noir.

.Par ailleurs, j’imagine que Gloria Trevi vous a accordé l’adaptation de son histoire et que vous l’avez rencontrée? Si oui, a-telle eu un droit de regard sur le film?

Moi je ne la connais pas. Mais Christian développe ce biopic depuis 10 ans! Il a multiplié les rencontres et les interviews. Petit à petit, mise en confiance, elle a accepté que le film se fasse et la vente des droits. A la première ébauche, elle refusait cette vision de son histoire. Chemin faisant et suite à une projection publique aux États-Unis, elle est revenue sur ses déclarations et valide aujourd’hui la vision du réalisateur. Elle a quoi qu’il en soit toujours fait partie du projet.

.Dernière question Sofia concernant votre interprétation. Gloria Trevi est une artiste controversée: propos anticléricaux ou pro-avortement au milieu d’un harem de mineures, fuite au Brésil, prison, sexe… Comment avez-vous abordé un personnage aussi dense et tenace. Une esclave moderne d’un homme qui la trompe avec des mineures, lui ment ou dilapide son argent alors que le monde est à ses pieds?

(Elle prend son temps). C’est surtout une histoire d’amour. Inconditionnelle, fatale, désordonnée, viscérale mais qui déborde… Elle s’abandonne totalement et finit à en perdre une part de son humanité… Avant de rebondir, de se ressaisir. C’était en tout cas l’intention du réalisateur. Gloria devant ses choix moraux et professionnels. Pour elle, il n’y avait pas de choix. Il lui était impossible de s’opposer à Sergio, son manager jusqu’à ses années de prison. C’est là que le «phénomène» reprend les rennes de sa vie et mais avant de renaître pour ne plus jamais s’éteindre.


Modzik remercie tout particulièrement les équipes d’Étoile Cinéma et de Inc France-Mexique, Barbara Caroll de Obeso, Ophélie Surelle, JuliaVillaseñor Bell et Sofia Espinosa pour leur disponibilité. A l’année prochaine et Viva Mexico!

Propos recueillis le vendredi 9 octobre par Deladerrière Jonathan au Festival Viva Mexico pour Modzik.

Rendez vous sur le site www.viva-mexico-cinema.org pour retrouver la programmation, les invités et toutes les informations pratiques.