Parlons claque. Cette claque pas si aisée à attraper en pleine face et qui nous rend toute chose. Parfois la claque vient de loin, déterrée de tréfonds britanniques, australiens, et j’en passe… Mais cette fois-ci elle est gentiment française et bordelaise. Les Be Quiet, cinq mecs à la jeunesse redoutable parlementent certainement avec le diable et lance leurs sonorités cold avec cran. Démoniaque.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la jeunesse ne les dessert d’aucune manière. Au contraire, ils poussent le vice très loin en se fourvoyant volontairement sur ce qu’on est censé attendre d’une « bande de gamins ». L’équipée sauvage est composée de Benjamin Grenier (voix, guitare), Louis Mesnier (guitare), Pierre Graber (basse), Quentin Plantier (batterie), et Matei Convard (clavier), pour une sauvagerie assurée. Tout malin qu’ils sont, ils donnent du coude pour se débarrasser à l’occasion de l’autorité parentale et faire de la musique à l’arrachée. Plaisir qui devient drogue. Plaisir qu’ils transforment en véritable travail de perfectionnement. Formés depuis 2009, leur son est déjà indéniablement bien trempé et donne espoir pour la suite. De leur dégaine à leurs sonorités, on flaire la cold wave, le post-punk charbonneux empreint d’un son qui frappe fort. Indépendants à l’excès, ils ont sorti un premier EP Primal en avril dernier et y balancent quatre titres au son assuré, à la voix qui se violente et se torture. Ils savent trouver les tournures qui changeront la donne, des guitares souffrantes de Zelda aux débuts sur pad d’Infancy s’emballant et tissant sa toile autour d’un synthé grinçant et ricanant de sorcellerie.

Mais sans nul doute, c’est sur scène que les garçons sont au mieux, fougueux et engagés dans une suite infinie de déflagrations sur lesquelles Benjamin finit par poser sa voix, matière rocheuse donnant à la totalité une stabilité, prenant métaphoriquement le rôle de pierre angulaire. Ils jouent intensément, te menaçant d’une crise de tachycardie, et combine ce son à une mise en scène aux lumières profondes, un corbeau érigé sur clavier, un sérieux qui en décontenancerait plus d’un. Tels de véritables personnages de combats à guitare, à batterie. La quête de l’esthétique se retrouve ailleurs, notamment dans le clip d’ Infancy où des projections multiples défilent sur le groupe en plein jeu. Fignolé, soigné, l’obscurité prend les airs d’une grande dame en tenue de soirée.

 

Emilie Jouan