Vanity Fair annonçait hier l’interdiction pour les blogueurs d’assister à la Fashion Week new-yorkaise en février prochain. Une nouvelle qui remet en question le statut de ces acteurs du web et qui accentue le fossé, bien controversé entre “vrais” journalistes mode et blogueurs.

Comment déterminer la légitimité de tel ou tel acteur de la mode ? Faut-il avoir la carte de presse pour être à même de décrypter une collection ? Catherine Bennett, gérante de la Mercedes-Benz Fashion Week de New York déclare que seuls quelques journalistes professionnels et quelques blogueurs de renom, comme Garance Doré par exemple, seront autorisés à passer les portes très sécurisées des défilés. Les sièges seront donnés en priorité aux acheteurs (ceux qui achètent les pièces du défilé pour leurs magasins). Les blogueurs amateurs devront donc se contenter de suivre les shows sur Style.com, toujours en temps réel ou presque.

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Crédit Photo : Jak & Jil

Cette restriction soulève d’autres problématiques, notamment celle de la “starification” des blogueurs mode, sur l’exemple de certaines journalistes comme Anna Dello Rosso. Pour eux, il est devenu désormais commun de se faire photographier à l’entrée des shows. Un moyen de se faire connaître pour beaucoup, plutôt que de faire du business, comme le rappellent certains designers. Les entrées et sorties de défilés sont devenues de vrais cirques où chacun se pare de sa plus étonnante combinaison de vêtements et accessoires. L’idée est de se faire remarquer par les photographes (souvent eux-mêmes blogueurs) et de se retrouver sur les blogs de renom comme The Sartorialist ou Jak & Jil (pour ne citer qu’eux). On pourrait avoir peur que l’absurde spectacle se déroulant à l’extérieur, approuvé de tous, prenne le dessus sur celui à l’origine de ce raffut.

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Crédit Photo : Jak & Jil

Mais peut-on éviter cette réalité et ignorer l’impact des blogueurs mode ? La société étant désormais basée sur l’instantanéité et le m’as-tu-vu, est-il possible de revenir en arrière comme le fait la Fashion Week de New York ? Les défilés doivent-ils être réservés à un cercle d’initiés ? Et le veut-on vraiment ? Dans un monde où il est de plus en plus dur de se faire une place et surtout, en temps de crise, où décrocher un CDI est considéré comme l’eldorado, peut-on vraiment en vouloir aux passionnés mode de tout donner ? Pourquoi cette activité est-elle autant dénigrée par les professionnels ? Car le blogueur est souvent autodidacte et génère un réseau d’influents parfois autant qu’un magazine de renom. Les designers se plaignent de cette monopolisation de l’attention au détriment des acheteurs, alors que nous savons tous que les blogueurs sont de vrais outils marketing pour les marques. Souvent couverts de cadeaux, étant suivis par des centaines, voir des milliers d’internautes, ils ont une influence personnalisée sur les consommateurs, plus impactante qu’une publicité généraliste. Cette problématique, qui choque les uns et qui satisfait les autres est vouée à être controversée. La Fashion Week de Paris n’ayant, a priori pas adopté cette mesure, les blogueurs peuvent encore souffler le temps d’une saison.

Crédit Photo de couverture : Kamel Lahmadi de Style & the City