Ludovic Houplain, fondateur du
collectif de création graphique H5, nous parle d’HELLO™ H5, une marque
simulacre dont les affiches au petit aigle n’ont pu vous échapper, tellement
elles ont envahi Paris. Jusqu’au 30 décembre, découvrez un univers marketing à
la fois ludique et effrayant qui a pris possession de l’espace à La Gaîté
Lyrique dans une exposition à ne manquer sous aucun prétexte.

 

Comment H5 a-t-il utilisé la
carte blanche donnée par la Gaîté Lyrique pour envahir ses espaces ?

 

Le premier sujet qu’on avait
proposé s’appelait « Occupation », celle du numérique sur le réel,
l’espace public, celle de l’image dans le monde contemporain. Mais le terme
était trop guerrier. On a opté pour quelque chose de beaucoup plus gentil… qui
ne l’est pas du tout en fait. D’où le choix d’un symbole assez simple, l’aigle,
hyper sympathique à l’extérieur avec son côté ludique à la Hello Kitty. Mais
très vite, quand on pénètre dans le hall de la Gaîté Lyrique, on se rend compte
que ce qui était joli et gentil au dehors peut avoir un autre visage. On joue
toujours sur ce double décryptage. De plus, le musée attire la jeunesse. Et
souvent, les enfants qui viennent avec leurs parents posent des questions du
style « pourquoi l’aigle n’est pas sympa ? », ce qui permet
d’instaurer un dialogue intéressant. Moi j’ai grandi au moment du fascisme. Je
sais de quoi parle un aigle, je sais qu’il n’est pas forcément sympa.

 

Combien de temps a-t-il fallu
pour concevoir l’exposition ?



Un an et demi. On n’est parti de rien.
Il y a quatre films, des jouets qui ont été fabriqués en France, en Chine, en
Pologne. On n’avait jamais fait ce genre de projets auparavant.

 

Pourquoi Alex Gopher, avec qui
tu travailles depuis les débuts du collectif en 1996, était-il le candidat idéal
pour écrire la musique de l’expo, déclinée en plusieurs versions ?

 

Avec lui, le dialogue est facile,
la compréhension, naturelle. Et puis cette fois, on se trouve dans un rapport
inversé. D’habitude, on me demande de l’image pour une musique. Mais de
concevoir une musique pour illustrer nos images, c’est une autre affaire, car
je ne suis pas calé en son. Mon but était de faire un single duquel on allait
extraire des morceaux pour les différentes installations, tout en employant le
thème en jingle à la radio et le sound design pour les jeux. Cette constante
répétition, cette litanie de mêmes accords, donnent une impression
d’omniprésence oppressante qui mène à l’écœurement. Cela reflète bien le
contenu de l’exposition, ainsi que le réel, avec la répétition des McDonalds,
par exemple, ou encore cette uni-marque catastrophique qu’évoque notamment le
film WALL-E.

 

Que deviendra Hello à
l’avenir ?

 

Après la Gaîté Lyrique,
j’aimerais bien que l’expo tourne car en soi, notre rapport à l’aigle est très
européen, il nous rappelle le fascisme. Mais les Américains ne le considèrent
pas du tout de cette manière. Ils pourraient se dire qu’on parle d’eux
directement. Ce serait donc intéressant de l’envoyer aux USA, voire en
Allemagne ou en Russie. Des pays où l’aigle est l’icône nationale. On n’est pas
dans une critique frontale de leur symbole mais plutôt du  symbole de puissance, qui est un mix
entre la politique et le commerce.

HELLO™ H5

Jusqu’au 30 décembre à la Gaîté Lyrique (Paris)

www.gaite-lyrique.net/hello

Au passage, une petite vidéo du collectif H5, qui a fait le buzz du temps de sa sortie et ouvert les portes à la carrière riche et prolifique qu’on lui connait aujourd’hui : “The Child”, d’Alex Gopher.