Deux groupes, huit albums, et beaucoup de points communs. Les deux groupes ont commencé leur carrière sur un album sombre et plaintif, d’un côté Turn On The Bright Lights pour les Américains Interpol, et de l’autre Funeral pour les Canadiens Arcade Fire. 

Avec Turn On The Bright Lights en 2002, Interpol signe un album à la fois froid, fragile et sous tension. Le climax est atteint dès la deuxième chanson Obstacle One, probablement la plus longue lamentation de l’album qui sera plus rythmé, une fois NYC (troisième titre) passé. On leur a reproché à cette époque une filiation trop audible avec Joy Division, même s’ils ne revendiquent pas cette influence. Et aujourd’hui, on se dit qu’on aurait préféré qu’ils se laissent aller à cette inspiration, étant donné que la suite de leurs albums sera plus du côté U2 que du côté Joy Division. Lyriques, épiques et pompeux, les deux albums suivants Antics et Our Love To Admire ressemblent plus à de grosses machines qu’à des plaintes sincères. Finalement, ils reviendront à leurs sources pour leur dernier album Interpol, qui n’égale pas un Turn On The Bright Lights mais qui se réconcilie un peu avec le concept d’humilité.

 De la même façon, Arcade Fire ouvre le bal sur un très bel album, Funeral. Plaintif aussi, mais plus violent et plus intense parfois que celui d’Interpol, notamment sur Rebellion (Lies). Suivent ensuite deux autres bons albums sur la même lancée, bien que plus apaisés, particulièrement sur The Suburbs. L’urgence semble avoir fait place à la sagesse, et à une certaine résignation. Si Funeral était adolescent, ceux-là sont plus adultes et plus mûrs. Tout récemment, on a eu à faire à Reflektor, single et album. Sur ce titre, on ne peut pas leur reprocher d’avoir cherché à draguer les grands publics avec un titre de plus de 7 minutes, mais de s’être laissé séduire par une certaine mode plus électro. Et l’album, produit par James Murphy porte davantage la patte LCD Soundsystem que celle d’Arcade Fire. D’autres, moins adeptes du « C’était mieux avant » y verront sûrement un renouvellement, un nouvel accent moderne pour cet album, peut-être plus dans l’ère du temps.

Difficile de départager ces deux grands groupes, qui, quelles que soient leurs évolutions respectives, ont de toute façon marqué la dernière décennie. Et l’avantage que présentent de tels changement de direction, c’est qu’il devient difficile de ne pas trouver son compte entre ces huit albums. Mais finalement, c’est Arcade Fire qui semblent tirer leur épingle du jeu, et cherchent à se renouveler avec Reflektor, empruntant des chemins que l’on ne leur connaissait pas.