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La sélection Modzik pour sonoriser ce weekend.
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LUJIPEKA – LA VIE D’ANTONIO
Dans La Vie d’Antonio, Lujipeka continue d’affirmer une direction artistique plus personnelle, entamée depuis la création de son propre label SWA au printemps 2024. Ce nouveau titre, livré en session live, conjugue un piano en boucle entêtante à une lourde rythmique. L’ensemble crée une tension constante, qui soutient un texte dense et introspectif. Le titre évoque une forme de dérive intérieure : celle d’un homme partagé entre souvenirs d’avant (sa précarité) et désenchantement du présent malgré des apparences de réussite. Les contrastes de statut, de lieu, de solitude s’y succèdent sans emphase. « Avant, c’était la vie sans pognon / Maintenant, c’est le même vide en terrasse sur Paname », le regard est lucide. La session live, captée sans effets superflus, sert ce parti pris. La Vie d’Antonio s’inscrit dans la logique de Brûler Paris (3 octobre 2025), album annoncé comme le plus brut de sa carrière (@brulerparis). Construit en collaboration avec Marty Bogo, Tony Seng (Nava), le rappeur SAM et le mixeur Clément Caritg, l’album veut documenter une année de vie, entre rupture sentimentale, excès, remise en question et reconstruction.
La vie d’Antonio est disponible via SWA/Sony Music. En concert à Paris (Accor Arena) le 7 novembre 2026.
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HAAI – STICHES
Cinquième extrait de HUMANiSE, son nouvel album attendu pour le 10 octobre, Stitches élargit encore le spectre musical de HAAi, DJ et productrice australienne née Teneil Laetitia Throssell. Loin de l’énergie brute de ses premiers sets ou de l’intensité expérimentale de Baby, We’re Ascending, ce nouveau disque privilégie une approche plus personnelle, introspective et incarnée. La grande nouveauté, c’est la place accordée à la voix – souvent la sienne – comme sur le banger incontestable Can’t Stand to Lose, morceau à la fois introspectif et indéniablement taillé pour le club, où elle aborde la perte et la vulnérabilité avec pudeur. Avec HUMANiSE, HAAi continue à dynamiter les formats. Le sublime Satellite, dévoilé en éclaireur, en est un parfait exemple : un morceau aérien, entre glitch-pop et poésie rave, qui témoigne d’un désir constant de réconcilier émotion et pulsation. Avant de devenir DJ, elle a d’abord été membre du groupe psyché Dark Bells, avec lequel elle explorait un univers proche du shoegaze et du rock atmosphérique. C’est à cette époque que naît son goût pour les textures denses et les constructions immersives. En 2016, sa résidence remarquée au Phonox, club de Brixton, lui permet de construire un son hybride, mêlant techno, breakbeat, transe et ambient. Les autres singles déjà sortis, comme HEY! ou Shapeshift, confirment cette volonté d’équilibre entre la danse et l’écoute, portés par une écriture plus directe et des collaborations (KAM-BU, ILĀ, Jon Hopkins…). HUMANiSE s’impose comme un disque hybride, qui cherche à faire coexister la chaleur humaine et la rigueur du son. « Pendant tout le processus, je pensais à une machine dotée d’un cœur humain. J’ai eu envie de revenir à mes racines de compositrice et d’utiliser davantage ma voix. C’est une démarche vulnérable, mais essentielle pour laisser parler ce cœur humain. » Composé dans un moment de repli et de recentrage, l’album traduit cette quête d’un équilibre fragile entre les machines et ce qu’il reste d’humain dans leur sillage.
Stiches est disponible via HAAI/Mute Artists/PIAS.
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CHARLOTTE CARDIN – TANT PIS POUR ELLE
Avec Tant pis pour elle, Charlotte Cardin délaisse la légèreté de Feel Good pour un terrain plus sombre. Et surtout, elle choisit le français. Un choix artistique qui donne un relief nouveau à son écriture. La chanson, coécrite avec Jason Brando, déjà à l’origine du tube Feel Good, reprend certains codes pop qui ont fait son succès : structure précise, production léchée, refrain efficace. Mais ici, l’énergie est moins euphorique. La colère affleure. Une jalousie froide, presque clinique, portée par une rythmique électro minimaliste qui laisse la voix de Cardin en pleine lumière. Ce passage au français change la donne. Le texte prend un poids nouveau, La maîtrise est là, indéniable. Mais cette élégance formelle, déjà très présente sur ses précédents titres, laisse parfois le sentiment d’un morceau trop poli pour sa propre intensité. On attendait peut-être un peu plus d’abandon. Reste que Tant pis pour elle marque une étape importante : une Charlotte Cardin qui s’affirme autrement, plus proche, dans sa langue première. Un morceau qui intrigue, et surtout, qui annonce peut-être une évolution plus profonde à venir.
Tant pis pour elle est disponible via Warner Music/Parlophone/Cult Nation. En concert à Paris (Accor Arena) le 30 avril 2026.
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KINGFISHR – NEXT TO ME (HALCYON LIVE FROM THE FARM)
Next to Me, extrait du premier album de Kingfihr sorti au cœur de l’été trouve ici dans sa version live une simplicité bouleversante. Les trois garçons Eddie Keogh, Eoghan ‘McGoo’ McGrath et Eoin ‘Fitz’ Fitzgibbon faisaient tous un master en électronique et informatique, lorsqu’ils décident de lancer l’aventure Kingfihr entre leur quatrième et cinquième année d’études. Composé et enregistré en grande partie dans une ferme, Halcyon est le fruit de trois années de travail patient. Le groupe revendique cette filiation agricole et artisanale, chaque morceau semble respirer au rythme des saisons. Halcyon navigue entre folk celtique moderne, ballade pop contemplative et accents indie-rock. On pense parfois aux premières heures de Bon Iver, à la sincérité de Dermot Kennedy ou encore à Ben Howard. Au centre du disque, la voix d’Eddie Keogh, chaude, ronde, légèrement voilée, agit comme un fil rouge, au même titre que la présence du banjo. Même dans les titres plus rythmés, elle conserve une dimension chaleureuse. En associant un ancrage territorial fort, une écriture sincère et une production sobre, Kingfishr signe un disque profond et apaisant. Un champ de mélancolie, labouré avec amour et chanté avec humanité, par un groupe découvert au festival Eurosonic 2025.
Halcyon est disponible via B-Unique Recordings/Atlantic Recording/Warner. En concert à Paris (Petit Bain) le 5 novembre 2025.
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AMINE D1 – AMEEN (FT. TUERIE & YAKU)
Amine D1 poursuit son travail singulier de mise en dialogue entre les mondes du classique et du hip-hop avec Ameen. En collaboration avec Tuerie et Yaku, s’inscrit dans une esthétique profondément introspective. La production repose sur des accords de piano, comme joué dans un club de jazz enfumé et surtout sur des lignes de violons qui enveloppent littéralement le morceau. Leur intensité, leur ampleur, donnent à Ameen une dimension presque cinématographique, évoquant la musique d’une histoire familiale (de sang ou choisie) tendue écrite par Tuerie. Amine D1, violoniste de formation classique, continue ici à tracer une voie originale dans le paysage musical français. Révélé sur les réseaux par ses reprises sensibles de morceaux rap, il impose désormais un style propre : un langage instrumental délicat, organique, toujours au service de la narration. Son approche mêle précision technique et grande douceur. Ameen est un morceau qui repose sur une dynamique d’écoute et de retenue. Il s’inscrit dans une veine mélancolique, sans pour autant sombrer dans la noirceur. Ce titre confirme qu’Amine D1 n’est pas simplement un violoniste dans le rap, mais un compositeur à part entière, capable de créer des espaces où le texte et la musique dialoguent sur un pied d’égalité.
Ameen est disponible via DONE.
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DAMIANO DAVID – TALK TO ME (FEAT. TYLA, NILE RODGERS)
Avec Funny Little Dreams, Damiano David ne se contente pas de rééditer son premier album solo, il le réinvente subtilement, en ajoutant cinq morceaux inédits qui témoignent d’une phase nouvelle, plus apaisée mais toujours personnelle. Le changement de titre n’est pas anodin : il transforme ses « peurs » (Fears) en « rêves » (Dreams), comme une mue artistique et émotionnelle assumée. Premier titre de cette édition deluxe, Talk to Me ouvre le bal sur une note inattendue mais parfaitement maîtrisée. Exit les riffs nerveux, place à un groove solaire, porté par la guitare de Nile Rodgers et la voix sensuelle de Tyla, révélée par son hit Water. Damiano y trouve une justesse nouvelle, dansante, sans renier son identité rock. « J’ai ressenti une nouvelle vague d’inspiration inattendue », confie-t-il. Le résultat est à la hauteur de cette impulsion : un morceau hybride, où la nostalgie flirte avec la chaleur disco, et où la voix de Tyla vient compléter celle de Damiano dans un duo explosif. Deuxième titre inédit Cinnamon, coécrit avec Albert Hammond Jr. des Strokes, fait office de trait d’union vers la version initiale de Funny Little Fears, qui explorait déjà les recoins sombres de l’intime à travers un rock brut. Ici, le dialogue entre guitares s’inscrit dans une filiation plus classique, mais conserve une fraîcheur indéniable. Les autres titres inédits – Naked, Mysterious Girl, Over – creusent des sillons plus introspectifs. Ils parlent d’amour, de doutes, de vulnérabilité. « J’ai transformé mes peurs en rêves. C’est mon cadeau pour vous et pour tous ceux qui m’ont accompagné en tournée », écrit-il pour présenter cette réédition. Talk to Me est à la fois un virage et une extension naturelle, un pas vers une pop mature, nourrie de groove, d’émotions vraies et de collaborations choisies avec soin.
Talk To Me est disponible via Sony Music/Arista. En concert à Paris (Adidas Arena) le 26 septembre 2025 (Complet).
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