C’est l’un des films les plus attendus de ce début d’année : Carol de Todd Haynes, met en scène une histoire d’amour complexe entre Carol Aird (Cate Blanchett) et Therese Belivet (Rooney Mara). La sortie nationale est prévue le 13 janvier prochain !

New-York 1952. Au cœur de l’Amérique puritaine et victorieuse d’Eisenhower. Deux femmes que tout oppose vont voir leurs destins se croiser un soir de Noël au milieu de nul part – dans un grand mall. Confrontées à leur propre adversité, les personnalités de Carol et de Thérèse s’entrechoquent. L’une élégante, sophistiquée, mariée et riche est au bord de la dépression. L’autre, spontanée et fragile déplore sa situation de célibataire, elle cherche une raison de vivre et une place dans cette société étriquée. S’ensuit une folle envie de quitter le monde et ses codes et de partir à travers l’Amérique profonde. Sans vraiment s’en rendre compte, les deux femmes partent en road trip pour l’aventure vers l’inconnu, la liberté et l’amour …

Adapté de la nouvelle de Patricia Highsmith, intitulée « Les eaux dérobées ou Carol », cette version cinématographique signée Todd Haynes fait se rencontrer deux âmes en perte de repères. Au moment même où l’Association des psychiatres américains ajoute l’homosexualité à la liste des maladies mentales, le jeune auteur publie sous pseudonyme cette histoire d’amour interdite entre deux femmes. Classée quasi-pornographique, cette nouvelle récolte pourtant beaucoup de succès et attire les réalisateurs de films qui s’emparent de cette romance hors du commun – on se souvient de Loin du Paradis et de la mini-série Mildred Pierce..

Todd Haynes, considéré comme le père des films mélodramatiques, signe un opus impeccable – reflet de sa personnalité obsessionnelle. Le réalisateur a tenu à adoucir les traits de cette histoire, à incarner la force de la passion et de la sensibilité tout en cultivant une certaine retenue. Les couleurs dominantes du rouge, jaune et vert renforcent la thématique du soap ainsi que l’ambiance très queer. La beauté esthétique est certes indubitable et rappelle le style de Stendhal… Cet aspect filmographique a été très critiqué par les tabloïds hollywoodiens. Pourtant cela n’a pas empêché à “Carol” d’être nominé aux Golden Globes 2016 dans la catégorie Meilleur film dramatique, Meilleur réalisateur pour Todd Haynes, Meilleure actrice pour Cate Blanchett et Rooney Mara, Meilleure musique de film pour Carter Burwell et aux Screen Actors Guild Awards 2016 dans la catégorie Meilleure actrice pour Cate Blanchett et Meilleure actrice dans un second rôle pour Rooney Mara !

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En effet, le point majeur de la réussite de ce drame se trouve sûrement dans le casting cinq étoiles mettant en face Cate Blanchett et Rooney Mara, deux actrices au physique totalement opposé mais à la fragilité émotionnelle touchante. La dualité déchirante tout au long du film entre la peine immense causée par la prohibition d’un amour impossible et le bonheur d’une passion nouvelle est magistralement bien menée. Passé maître dans l’art de la restitution d’une époque au cinéma, Todd Haynes cultive le mystère passionnel à travers des scènes filmées à travers des vitres obscurcies par la pluie, la saleté ou la buée.

Si Todd Haynes n’a pas reçu que des retours positifs, il est tout de même remarquable dans son travail. Son infinie délicatesse ne tombe jamais dans le piège de l’emphase ou de la langueur ennuyeuse. Au contraire, il creuse le fossé de la mélancolie et exacerbe les sentiments, l’ambiguïté d’une société en pleine mutation, à contre-courant de l’image idéale que les hommes de pouvoir comptent faire perdurer, vainement. Indéniablement, Todd Haynes rend honneur au cinéma d’auteur américain.

 

Sortie nationale le 13 janvier 2016