À seulement 23 ans, James Baker, qui inaugurera le premier Modzik Talents Live, façonne une musique hybride où se croisent indie pop, électro, rock et rap. Autodidacte et passionné de cinéma, il conçoit ses morceaux comme des courts-métrages auditifs, tissant des récits où l’imaginaire dialogue avec l’introspection.

 

 

 

Son nouveau projet, Les monstres ne se cachent plus sous mon lit, est une plongée dans les méandres de la conscience, oscillant entre mélancolie et lucidité. Inspiré par l’esthétique des Backrooms, le cinéma de Tim Burton et l’art brut de Basquiat, James Baker transforme ses tourments en matière artistique brute et sincère.

 

@Florencia Potter

/

Quand tu écris, tu préfères le calme ou l’agitation autour de toi pour t’inspirer ?

Un peu des deux en fait, j’aurais tendance à nuancer. J’aime beaucoup être dans un contexte assez calme, mais j’aime bien aussi… C’est un peu excitant quand il y a du monde autour et qu’il n’y a pas trop le temps. Ça donne des choses un peu dans l’urgence. Je dirais que j’aime un peu des deux, du moment que je suis un peu seul dans ma création.

 

Si tu devais comparer ton parcours à un film, ce serait lequel ?

Un film qui décrit vraiment bien mon prochain projet, c’est Eternal Sunshine of the Spotless Mind

 

Tu parles beaucoup de monstres dans ton projet, mais est-ce qu’il y a un monstre que tu as déjà dû affronter dans ta vie ?

Complètement. En vrai, je pense que le plus gros monstre que j’ai affronté dans ma vie, c’est moi-même : vis-à-vis des réseaux sociaux, mais aussi de la drogue, la procrastination, la confiance en soi, le jugement de soi-même et des autres, le regard des autres aussi.

 

C’est quoi l’élément déclencheur pour sortir de tout ça ?

Je pense que la première étape, c’est d’en prendre conscience. Je ne considère pas en être totalement sorti, mais justement, écrire sur cette thématique et y réfléchir a un effet thérapeutique. Ça permet de prendre du recul, de se poser des questions sur le bien et le mal, de se demander si j’ai été une mauvaise personne dans certaines situations et pourquoi. Parce que ce n’a jamais été dans une intention malveillante, mais parfois, mes réactions ne sont pas les plus justes.

 

(c) @james_bkr @josephinezaudig

 

D’où vient cette fascination pour les Backrooms et les creepypastas, et comment ça influence ton art ?

En vrai, je ne dirais pas que c’est une fascination, mais j’ai découvert un peu ce monde-là avec Internet, dans mon adolescence, quand j’ai eu accès à YouTube et que des vidéos sont apparues. J’ai repris un peu goût à ces choses-là avec Feldup, j’adore ce mec. Quand j’ai vu ses vidéos sur les Backrooms et l’univers du réalisateur qui a aussi apporté ça sur YouTube, ça m’a donné énormément de contexte visuel. Comme je suis très inspiré par le cinéma et les courts-métrages, ça m’a donné envie de mettre cette niche d’Internet dans un art qui ne s’y prête pas vraiment. Comme le cinéma, ça s’y prête limite plus que la musique. Et j’ai voulu faire un truc qui touche à ça.

 

Tu es cinéphile, tu regardes beaucoup de films. Comment ça impacte ta façon d’écrire ?

Moi, de base, je voulais faire du cinéma. Je voulais être réalisateur, même scénariste, acteur, etc. Depuis tout petit, c’est ma vraie passion. J’appelle ça ma vraie passion parce que tout ce que j’ai fait dans mon enfance, c’était pour faire ça. La musique, ça a toujours été une passion, mais une passion moins consciente. J’aimais en faire, mais je ne me suis jamais posé aucune question vis-à-vis de la musique. À partir du moment où je me suis lancé dedans, ce fut une autre histoire. J’ai voulu fusionner mon amour pour le cinéma avec la musique. Donc effectivement, j’ai des images qui me viennent, surtout quand je compose, plus que quand j’écris. Je sais que je fais des instrumentaux très cinématographiques. Je ne compose pas seulement pour mon projet personnel, je compose aussi pour mes potes qui sont dans la vidéo et aussi pour mon propre plaisir. Ce qui va vraiment lier les deux, c’est que par exemple, pour mon prochain projet et celui qui est sorti juste avant, j’ai vraiment réfléchi à une histoire. Je ne dirais pas que c’est un scénario, mais c’est une histoire avec un début et une fin. Il y avait vraiment une approche scénaristique et j’essaye aussi de faire des transitions entre les morceaux. Ce qui donne l’impression que c’est un seul morceau et du coup, j’aime bien comparer ça à des courts-métrages auditifs.

 

Les monstres ne se cachent plus sous mon lit est un titre assez symbolique. À quoi il te fait penser ?

Ce titre est la symbolique du passage de l’enfance à l’âge adulte. C’est vraiment de conscientiser qu’il n’y a plus de monstres sous notre lit. En fait, c’est une phrase de Darwin qui a dit : « Les monstres ne se cachent plus sous mon lit depuis que je me suis rendu compte qu’ils étaient en moi ». Ça peut avoir plusieurs symboliques aussi. Ça ilustre un peu le passage du déni à la prise de conscience.

 

cover by @gab.veludo

 

Ton projet est très introspectif. Est-ce que tu écris aussi pour te libérer de quelque chose ?

Oui, complètement. Tout ce que j’entreprends de créatif a, d’une certaine manière, un effet thérapeutique. Je dirais même que c’est encore plus vrai dans la composition, ou même simplement dans l’imagination d’idées. Juste… « ah, j’ai une idée, potentiellement comment je peux faire pour la réaliser ? ». Si c’est lié à la musique, tant mieux ; si c’est pour le cinéma, encore mieux.

 

Est-ce qu’il y a une chanson que tu as écrite qui t’a fait ressentir des émotions et sorti de ta zone de confort ?

En vrai, il y en a plusieurs qui m’ont fait sortir de ma zone de confort notamment sur des questionnements comme « est-ce que ça va plaire ou non ? » et « est-ce que ça me plaît vraiment ou est-ce que ça me plaît parce que j’ai l’impression que ça va plaire aussi aux autres ? » Par contre, pour vraiment toucher les émotions les plus sincères, c’est compliqué, car je suis quelqu’un de très contrôlé, même dans ma création. Ça m’est arrivé récemment avec une musique qui n’est pas encore sortie, mais qui représente 90% de mon prochain projet. Elle aborde des sujets plus lourds que je n’ai jamais osé exprimer auparavant. J’ai pas encore de titre, mais ce que je peux dire, c’est que je parle de choses plus simples, comme ma relation avec ma famille. Et j’évoque, de façon pas abstraite mais avec des nuances éloignées, le fait que j’ai de la famille au Liban et en Israël. Donc j’ai le conflit dans le sang.

 

Est-ce que tu as un endroit particulier où tu te sens bien, tranquille ?

Je dirais que c’est chez moi, mais plus précisément chez ma mère. Même si j’ai déménagé il y a quelques mois, j’habite à Paris maintenant et ma mère est en banlieue. La chambre de mon enfance, je pense que c’est le lieu qui a été le plus créatif de ma vie. Donc je m’y sens vraiment bien. Après, chez mon nouveau chez-moi aussi, je me sens bien. À partir du moment où j’ai un cadre un peu introspectif et où je suis seul avec mes pensées, et que ce n’est pas un endroit oppressant, je me sens plutôt bien. Je suis dans le 18e, et c’est un quartier incroyable, je ne pouvais rêver mieux pour mon premier appart. Je suis en colocation avec mon meilleur pote, donc c’est sympa aussi. C’est un quartier très vivant et on a la chance d’être dans une rue où il n’y a pas trop de voitures qui passent. Donc on est dans une rue vraiment animée et en même temps assez calme.

 

James Baker participera à la première édition des Modzik Talents Live, un nouveau rendez-vous imaginé pour révéler les artistes qui feront la musique de demain. S’il ouvre ce tout premier chapitre, ce n’est pas un hasard : James incarne parfaitement l’esprit de cette soirée, un mélange d’audace, d’émotion et de liberté créative. Laissez-vous surprendre.

/

Modzik Talents Live, se déroulera le 24 avril 2025, à L’Archipel.

La billetterie juste ICI

Les monstres ne se cachent plus sous mon lit est disponible via Elletize Records.

 

Texte Boris Lemoine

Photo en couverture Florencia Potter