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La sélection Modzik pour sonoriser ton weekend.

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TOMORA – RING THE ALARM

Dès les premières secondes de Ring The Alarm, TOMORA frappe fort. Le duo, fusion de Tom Rowlands des Chemical Brothers et AURORA, dont le nom naît de la combinaison de leurs prénoms, nous plonge dans un univers où euphorie et panique cohabitent. « Nous voulions que TOMORA soit un groupe, et non deux individus. C’est notre sentiment musical qui prend vie », expliquent-ils, et le morceau incarne parfaitement cette volonté de créer une entité sonore unique. L’alarme numérique qui ouvre le titre sonne comme un avertissement : attention, quelque chose de brut et de captivant arrive. Puis la grosse caisse explose, et la voix cristalline d’AURORA s’élève. Le chaos rythmique signature des Chemical et la délicatesse de sa voix crée un contraste fascinant. Le clip, signé Adam Smith, collaborateur historique des Chemical Brothers et d’AURORA plonge dans un psychédélisme noir et rose fuchsia. AURORA, figure centrale, répète le refrain éponyme comme une incantation hypnotique. La réalisation renforce cette sensation de vertige, oscillant entre transe et urgence. Le duo, qui collabore depuis 2019, connaît déjà une longue histoire artistique. AURORA avait prêté sa voix sur l’album No Geography des Chemical Brothers, et Rowlands a produit certains morceaux de son album What Happened To The Heart? (2024). Cette alchimie, patiemment forgée au fil des années, se ressent dans ce titre, qui devient un champ de tension où euphorie et panique se répondent sans cesse. Plus qu’un coup musical et médiatique, TOMORA esquisse la naissance d’un groupe à part entière. Un album est en chemin et une tournée semble se mettre en place. Pour les amateurs de rock électro et d’expérimentations sonores, TOMORA frappe un grand coup et annonce que l’ère de leur fusion musicale ne fait que commencer.

Ring The Alarm est disponible via TOMORA.

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GABRIEL JACOBY – BOOTLEG (FEAT. TOM. G)

Dans gutta child, l’EP dont est extrait bootleg, Gabriel Jacoby, 27 ans, avance comme un boxeur qui connaît le poids de ses gants. Il serre les jointures, souffle, observe son adversaire, son passé, puis avance pas à pas. Né dans la pauvreté et aîné de sept enfants, il sait ce que signifie encaisser sans possibilité d’abandon. « Je viens d’un milieu difficile… J’ai toujours voulu être quelqu’un sur qui les gens peuvent compter. » Un an de prison a mis sa résilience à l’épreuve. Les conditions de détention, en tant que jeune homme noir aux États-Unis, étaient particulièrement difficiles, mais Jacoby a transformé cette période en force créative, composant de nombreux morceaux qui nourrissent aujourd’hui l’EP. Ce moment a renforcé son endurance personnelle, sans jamais définir sa créativité. Autodidacte total, Jacoby est un multi-instrumentiste. Il écrit, produit, enregistre, mixe et masterise sa propre musique. Ses influences sont éclectiques : Prince pour le groove, Nina Simone pour la profondeur, Lil Wayne pour l’énergie, et bien d’autres, du funk au southern hip-hop. Bootleg, avec Tom. G, originaire de Tampa, est le direct du gauche. La production, rythmique est souple et nerveuse, inspirée des premiers Justin Timberlake / Timbaland. Les paroles posent le cadre : « Je ne suis pas venu jusqu’ici pour que tu me dises qui je suis ». Et ailleurs : « Je ne suis pas la version pirate d’un artiste quelconque, je suis la première et unique version de moi-même ». Le morceau alterne refrains relâchant la pression et pont final dansant, tout en reflétant Tampa et sa chaleur. Autour de bootleg, l’EP fonctionne comme un programme d’entraînement : chaque morceau est un exercice, certains rapides, d’autres mélodiques, tournés vers l’amour ou la montée en puissance personnelle. « Chaque chanson représente une partie différente de moi-même, de mon passé et de ma musique. » Notre titre préféré, The One, très princier, mêle guitare électrique, basse funky, voix rauque et falsetto, chœurs soul improvisés. La palette musicale, funk, soul, blues, R&B, dirty-south, folk, devient un ensemble de mouvements : jab, pivot, uppercut, esquive. La prison et l’autodidaxie sont deux forces complémentaires : endurance et concentration d’un côté, liberté créative de l’autre. gutta child révèle un artiste complet, capable de conjuguer technique, émotion et sens du groove. Chaque morceau témoigne de sa maîtrise instrumentale et de sa sensibilité artistique. La vision de Gabriel Jacoby est déjà claire, et l’avenir s’annonce prometteur : premier album et venue en Europe en 2026. (LFC)

bootleg est disponible via Bourne Recordings/Pulse Records/Concord.

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ZÉLIE – IL L’A DIT.

Après un premier album en 2024, IL L’A DIT. signe le deuxième single de l’année pour la chanteuse, qui semble prendre un virage incisif assumé. Après JE NE SERAI JAMAIS., manifeste de son indépendance, Zélie continue dans sa lancée et délivre un nouveau morceau grinçant, témoignage de son émancipation personnelle. Elle explore ses relations passées, s’interrogeant sur les attentes collectives et les injonctions sociétales adressées aux femmes. À travers cette mise en perspective, Zélie exprime son désir de liberté, refusant l’idée de se reconstruire par la présence d’une figure masculine et réfutant indéniablement un discours « man spread ». Pour ce faire, l’artiste use de nappes synthétiques et d’un autotune prononcé, régnant sur une sonorité pop énergique, aux couplets à l’allure presque rap. Le clip est signé Leanda Heler, dont on reconnaît la patte néo-gothique, intensifiant la dimension sombre et dramatique du titre. L’ensemble chorégraphié et les jeux de lumière soulignent le trouble et la nervosité : IL L’A DIT. se transforme en un morceau subversif, motivé par la volonté de renverser les mœurs, à l’image de l’évolution musicale de la chanteuse. Ce dernier se clôture par un monologue parlé, déclaration explicite de sa nouvelle ligne de conduite. Un message en émane : « Le cœur et sa dictature ». Un intitulé qui ressemble grandement au titre d’un nouveau projet… Il faudra donc s’armer de patience avant de découvrir ce qui s’y cache et ce que Zélie nous réserve (peut-être). (AC)

IL L’A DIT. est disponible via LABEL & LA Z/Sony Music Entertainment France.

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JEAN CASTEL – BOUT DE COURSE

Jean Castel a grandi à Bordeaux, violon à cinq ans, guitare à neuf, les doigts qui apprennent à faire vibrer les cordes autant que le cœur. Entre Paris et Los Angeles, entre pop, R&B et groove, il trace son chemin, auteur, compositeur, producteur, parfois pour lui, parfois pour d’autres Mosimann, Léa Paci, Grand Corps Malade, Lewis Capaldi, toujours avec ce goût du détail et de l’émotion qui saute aux oreilles. Au début de l’année, il publie A Whole Lot Of Overthinking (Archives), 25 morceaux gardés au secret, enregistrés dans ses moments de doute, de réflexion, de questionnement. Chaque chanson est un fragment de sa vie qui attendait son heure. Puis viennent les singles. Bout de course commence en piano et voix seuls, fragile et intime. Puis des synthés, une batterie discrète, montent doucement, comme une respiration qui retrouve sa puissance. La ballade est un exutoire, un moment où le doute se dissipe et où le cœur reprend le rythme. On sent l’épuisement d’hier s’éloigner, la lumière revenir, la vie devenir douce. C’est intense et sensuel. Avec Adrénaline, le décor change. Tout se fait psychédélique, vaporeux, très Tame Impala. Les textures tourbillonnent, l’envie devient brûlante, presque douloureuse. Le désir s’en mêle, l’amitié se trouble. Castel confesse, il se consume, et on tombe avec lui, pris dans la spirale. Puis Overtime arrive comme un rayon de soleil. Inspiré par Stevie Wonder, le groove s’installe, la voix s’affirme. Castel lâche la peur, le doute, la sur‑réflexion. « Give me the crown for it is mine / Watch me skip the line. » Il revendique sa place. Ce morceau est un antidote, une libération. On entend la peur du temps qui passe se transformer en énergie. On entend la vulnérabilité devenir force. « Ce morceau est un remède contre mes peurs de l’échec et du temps qui passe. J’ai mis en musique ce que j’ai du mal à exprimer dans la vie de tous les jours. » Ce triptyque raconte un chemin : chute, respiration, affirmation. Il se mêle à l’album d’archives pour dessiner un portrait complet : un artiste qui se relève. Jean Castel expose ses doutes, ses désirs, ses peurs. On ne sort pas indemne de cette écoute. On respire avec lui. On tombe avec lui. On se relève avec lui. (LFC)

Bout de course est disponible via Jean Castel.

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KABEAUSHÉ – WE HAVE OURSELVES A SHEKDOWN

On appuie sur play et soudain les tambours grondent, martelés. on est projetés dans un empire en train de vaciller. La voix de Kabeaushé, alias Herr Iggy, le roi vacillant, clame l’urgence : « I need to hear those drums… hit them harder, scream louder ». Il exige qu’on marche, qu’on lève les bras, qu’on crie. Derrière le rythme primal, les « claps », les cris, c’est l’angoisse d’un souverain en déroute, un cri de survie. Les percussions résonnent comme des battements de tambour de guerre, l’atmosphère s’alourdit, se tend, ce royaume imaginaire ne se relèvera sans doute pas sans ravages. Herr Iggy, autrefois maître de cérémonies éclatantes, voit son univers se fissurer. Kabeaushé, l’artiste derrière le masque, ne nous invite plus à la fête mais à l’implosion. La musique baroque, carnassière, se transforme en rituel d’effondrement. Kabeaushé érige la pop en théâtre déchaîné, en cauchemar baroque, inspiré du cinéma allemand des débuts. Quand les voix s’élèvent, quand la tension musicale s’emballe, le morceau devient une transe presque tribale. Né à Nairobi, élevé entre gospel, rythmes africains, radio et rêves d’ailleurs, l’artiste, de son vrai nom Kabochi Gitau, a toujours flirté avec l’hybridité : hip‑hop, électro, soul, funk, extravagance visuelle. Mais cette fois, il bâtit un décor sans vie et y installe sa créature, Iggy. Ce qui vacille sous nos yeux, c’est un empire imaginaire. On sort de l’écoute essoufflé·e, ébranlé·e, mais paradoxalement vivant·e. We Have Ourselves A Shekdown, extrait de son 3e album KABEAUSHÉ PRESENTS: I.S.U.I.L.P (03/02/26) est sans doute une allégorie. Le royaume d’Herr Iggy, c’est le miroir de toutes les dominations politiques, sociales, identitaires qui reposent sur le spectacle, l’apparence, la peur, l’illusion. L’appel de Iggy ressemble à ces appels au secours que poussent des institutions, des élites, des systèmes quand leur base vacille. Derrière ce faux flamboyant, ce qu’on entend c’est une crise de confiance, une remise en cause, la chute d’un ordre factice. Kabeaushé ne propose pas une révolte frontale mais préfère le symbolisme et le théâtre. Et c’est ce choix ambigu, subversif, qui rend son art pertinent. Parce qu’il invite chacun·e à regarder ce qui dort sous les lumières. (LFC)

We Have Ourselves A Shekdown est disponible via Kabeaushé.

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ANNIE BURNELL – UNDERSTAND

Installée à Paris, Annie Burnell s’est déjà fait remarquer avec son premier EP en 2022, dont certains titres ont été largement diffusés et intégrés à des séries HBO Max. Avec Leaning In, son nouveau projet de six titres conçu avec le producteur Arnaud Gavini, elle explore des territoires encore plus personnels et sensoriels. L’EP mélange folk, soul aux réminiscences jazzz et R&B, avec des guitares acoustiques subtilement enrichies de textures électroniques. Chaque morceau dévoile une facette différente de son univers : Understand ouvre sur un cheminement intérieur, où elle accepte ses parts de doute et de vulnérabilité avant de trouver un équilibre. Comme elle le dit elle-même : « Cela a été très spécial de partager ces chansons pendant ma grossesse. C’est drôle de les revoir aujourd’hui et de réaliser à quel point les choses ont changé ». Body se concentre sur le corps et l’affirmation de soi. L’artiste explique : « Body, le premier single, a été écrit à une période où je ne me sentais pas du tout connectée à moi-même. Je voulais avoir davantage confiance en moi, me pardonner, m’aimer et m’accepter telle que je suis, y compris les aspects que j’essayais de dissimuler ». Le morceau traduit cette démarche avec force et sensualité : « Now I feel like a woman… I want to love you like a woman ». Girl, teinté de jazz-soul, nous enveloppe dans une atmosphère plus douce et élégante, reflet de la sérénité retrouvée pendant sa grossesse. Burnell résume cette évolution : « Aujourd’hui, grâce à tous ces changements, je me sens plus connectée et en phase avec moi-même que jamais. Les difficultés de la croissance peuvent nous apprendre beaucoup si nous savons les écouter ». La douceur de Girl et la sensibilité de l’EP reflètent ce mélange de fragilité et de maturité. Leaning In est un EP qui se vit autant qu’il se ressent : sensuel, bourré d’émotions. Annie Burnell confirme sa capacité à transformer l’intime en expérience universelle. Chaque morceau est une étape de son parcours, une exploration de soi. Annie Burnell prouve qu’elle peut faire de l’intime un terrain universel. (LFC)

Understand est disponible via Annie Burnell.

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MOKA BOKA – PARDONNER

Après un long moment d’absence, Moka Boka revient en force avec son single Pardonner, un morceau qui clame sa rédemption auprès de son entourage. Une demande de pardon dont on ignore l’origine, qui sonne aussi personnelle qu’universelle : le rappeur s’étend sur ses relations familiales et amicales, des relations dégradées progressivement par ses tourments et ses travers. Des obstacles non pas insurmontables, car le titre semble avant tout délivrer une quête de sens plutôt optimiste et une volonté d’avancer. Moka Boka arbore à nouveau une narration planante que l’on reconnaîtrait entre mille, la même qui nous a bercés dans son premier album (où l’on retrouve le formidable morceau Héracles), mise en relief par la douceur de l’acoustique. D’une voix suave, il y conte la vulnérabilité et la solitude qui le traversent, mais invite tout de même à accepter cette souffrance pour mieux renaître. Pardonner incarne donc cet écho poétique de l’éternel cycle de la vie, entre mélancolie fataliste et soif de renaître. Le clip, signé Léon Feroleto, met en lumière cette réflexion intime dans un décor de chambre désertée, reflet de la dimension introspective que revêt le single. Ce dernier nous donne très envie de réécouter la discographie du rappeur, idéale pour accompagner le blues hivernal de décembre. Et parce qu’une bonne nouvelle ne vient jamais seule, Moka Boka laisse entendre qu’il pourrait bien refaire surface très bientôt. Sur Instagram, il a dévoilé un message chiffré : « tbpv trpm », acronyme de « trop bizarre pour vivre, trop rare pour mourir » (réplique culte issue de Las Vegas Parano), une énigme qui ressemble fort à un signe avant-coureur. Autant dire qu’on attend la suite avec impatience… (AC)

Pardonner est disponible via Kwami Records.

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KELHANI – OUT OF THE WINDOW

Après le succès de Folded et une année rythmée par de nombreux remixes, entre collaborations inédites avec des artistes phares comme Toni Braxton, Brandy ou Ne-Yo, et réinterprétations instrumentales telles que (Un)Folded, Kehlani clôture 2025 en dévoilant le clip de son nouveau single : Out The Window. Un titre aux influences R&B des années 90, revisité avec une modernité résolument 2025. La voix intense et envoûtante de Kehlani évoque immédiatement les icônes de cette époque, notamment Aaliyah, une comparaison que beaucoup d’auditeurs ont soulignée dès la sortie du morceau. Quant à la mélodie, à la fois sensuelle et nostalgique, elle s’adapte aux codes actuels et est sublimé par le timbre unique et reconnaissable de l’artiste. La chanteuse R&B nous plonge visuellement dans son univers : entre plans serrés façon caméscope, effets vintage, lumières vaporeuses, chorégraphies précises et tenues multiples évoquant les années 90. Porté par une véritable storyline, le clip mêle sensualité et sensibilité, offrant bien plus qu’une simple succession d’images : une histoire. On retrouve Kehlani dans ce qu’elle fait de mieux c’est à dire mêler la vulnérabilité à une féminité affirmée et libérée, sur fond de mise en scène, certes travaillée, mais qui réussi à rester légère et naturelle. Musicalement, dans Out The Window, on retrouve la signature de Kehlani c’est à dire un R&B minimaliste qui laisse place aux émotions et à sa voix sensible et assurée. Les paroles, fidèles aux thèmes chers à la chanteuse, relations amoureuses, complexité des sentiments, quête d’émancipation, explorent des sujets universels. Elle parvient néanmoins à transformer chaque ligne en récits personnels et touchants, dans lesquels son public peut aisément se reconnaître. Ce nouveau single marque une étape importante dans son parcours artistique, mêlant hommage à ses influences musicales et esthétique contemporaine. Out The Window séduit autant par ses sonorités accrocheuses que par sa direction artistique visuelle marquante, laissant présager une année 2026 prometteuse pour Kehlani. (ML)

Out The Window est disponible via TSNMI / Atlantic.

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