24 heures après avoir brûlé les internets du côté de Berlin, le duo le plus punk de France décidait de réitérer l’exploit en annonçant un concert gratuit du côté du 18ème arrondissement ce 19 octobre. Il n’en fallait pas plus pour littéralement affoler les enfants parisiens de l’électronique. Modzik a réussi à en être, même si la tâche était tout ce qu’il y a de plus ardue.

justice paris modzik

C’est cette photo, publiée à 15 heures, qui nous a fait nous masser, parqués comme des bœufs, sur le square face à l’Elysée Montmartre dès 18h30 (on a même entendu des gens dire qu’ils étaient là depuis 17h). Toujours est il que nous étions donc bien sagement en train de patienter, la canette à la main et le bracelet bleu floqué Elysée Montmartre au poignet, luttant contre le froid de ce milieu d’automne et bouillonnant intérieurement d’excitation à l’idée de faire partie des heureux élus qui verront le retour de Justice à Paris. Le temps passant et l’alcool aidant, les discussions devinrent de plus en plus audibles et il est à souligner que la fan-base de Justice tenait alors toutes ses promesses : nous étions entourés de grossiers beaufs du 16ème (oui, ça existe) en manteau de cuir et sentant l’eau de cologne, la blague potache facile et le regard vide, leur présence se justifiant certainement plus pour leur amour inconditionnel de leur Instagram, et la gloire que leur apporterait ladite présence, que leur amour de Justice. Leur Instagram qu’ils ne manquèrent d’ailleurs pas d’abreuver durant la longue attente qui nous était imposée tout en oubliant pas de chanter la célèbre chanson qui parle de sardines et d’aromates ou je ne sais plus très bien (eux mêmes ne connaissant pas tout à fait les paroles)

21 heures tapantes, des cris se font entendre devant nous et la foule semble faire un bond de 15 mètres, bond qui sera répété toutes les 5 minutes une demie-douzaine de fois avant notre entrée. Nous étions fort heureusement positionnés à la fin du premier tiers de la très très longue file d’attente. La partie délicate de “l’opération bond” était d’éviter précautionneusement les cadavres de bières, de packs de bières, de Mc Donald’s, de kebabs, de parapluies, de manteaux, j’ai même enjamber une paire de chaussures. 20 minutes à peine auront été nécessaires depuis le premier bond de foule pour que nous accédions à la ceinture de vigiles positionnée en bout de course.

Une fouille minutieuse plus tard, nous sommes guidés comme des ados en colonie de vacances par l’un des vigiles qui nous fait sagement traverser le boulevard afin d’entrer dans la salle fraîchement rouverte de l’EM. Parquet flambant neuf, marbre et moulure, on a du mal à croire être dans le 18ème, coincés entre Pigalle et Barbés. Trêve rapide de visite, nous nous dirigeons vers le bar où les consommations et leurs prix sont à l’image de l’esprit colonie de vacances susmentionné dans la partie attente de cet article, bière pas chère, vin milieu de gamme, cocktails abordables. De quoi ravir tout le beau monde qui commence doucement à s’entasser.

Les platines sont investies assez vite par l’indéboulonnable de l’écurie Ed BangerSo Me, accompagné en b2b par Jackson and His Computer Band mais sans sa bande d’ordinateurs. Digne d’un warm-up, voilà la meilleure manière de résumer l’heure passée derrière les platines par les deux grands hommes flanqués de hoodies blancs floqués Tennessee. C’est impatient, et on vous l’avoue soulagé, que nous accueillons Chloé comme il se doit pour un set techno minimale rudement efficace d’une petite heure et demie. La salle est comble, mais bizarrement respirable, un bon quart des gens étant occupés à souiller le salon à l’étage ou leurs narines aux toilettes.

Et grand bien leur fasse puisque le set de Chloé a joué avec nos montres et il est déjà l’heure d’accueillir le duo punk français touffu (et pas casqué, c’est comme ça qu’on les reconnait) pour un set magistral de 2 heures chrono. Si l’éclectisme devait se trouver une nouvelle définition, une bonne idée serait d’aller fouiner du côté d’un DJ set de Justice : imagé, cinématique et passant en revue tout le spectre des musiques actuelles et d’antan, le set fut sans conteste un voyage, pas tout à fait maîtrisé certes, mais efficace sans nul doute. Débutant de la pire des manières en débranchant la mauvaise clé USB en clôture du set de Chloé, c’est avec un flegme très british que les deux allumés haranguent la foule, qui fait de même, avant de relancer la turbine électro. N’oubliant évidemment pas de jouer les singles de leur album, Randy, Safe & Sound et le dernier qui n’est pas encore sorti Alakazam (qu’on a cru discerner en début de set, et on avait raison!), et les succès de leur carrière, les deux copains nous servent sur un système son réglé au millimètre et un jeu de lumières admirablement bien maîtrisé (bravo aux ingés) des classiques de 90 à 140 BPM, passant du disco au hard-rock, de la drum’n’bass à la soul et générant une transe imparable et une absence de répit qui mettra le feu à l’Elysée Montmartre. On aime, ou pas, mais il reste une certitude : ces deux gars-là sont des génies.


Le meilleur moment de la soirée, c’était ça (mais ces cons l’ont joué 30 secondes) :

Leur album, Woman, sortira le 18 novembre, d’ici là ils seront ce soir à l’Under Bron de Stockholm, un concert gratuit qu’ils ont annoncé dans les mêmes dispositions que pour Berlin et Paris. Alors, à qui le tour demain ?