Avec un record de vente de 800 000 albums en trois jours et une sortie non-marketée de son album, qui en fera l’un des plus gros buzz de l’année, Beyoncé a fait fort. Mieux encore, elle sort un “visual album” comprenant dans un double CD/DVD qui sortit le 20 décembre en physique, ses 17 vidéos et 14 titres. Des clips tournés entre New York, Los Angeles et Paris… où elle a recruté des skinheads parisiens pour pogoter avec elle dans son clip Flawless ! L’envers du décor? la Maison de l’Architecture dans le 10 ème près de Gare de l’Est. Nous on était en vacances à ce moment-là, mais Evelyne et Alice elles, ont sauté sur l’occasion pour se faire un petit paquet de pognon. On a rencontré ces “skinheads bitches” qui ont donné la réplique en boots et booty shake à Beyoncé, des meufs qui au contraire de notre stagiaire de 3ème adoré, ne se raseraient jamais la tête pour voir la Queen B en vraie…même si chez les Birds, skinheads girls ndrl,  c’est déjà fait!

Habillées en Fred Perry bleu marine et chemisier à carreaux, Evelyne et Alice ont vu leur quotidien se transformer ces derniers temps. Outre un gros pactole qui leur permet de booker de futures vacances (merci Queen B.!), les filles se retrouvent critiquées de par leurs pairs pour être apparues dans un clip de Beyoncé : Flawless. “Nous on avait aucun intérêt à être vues avec Beyoncé, même si elle chante très bien.” expliquent-elles. Alors que certains y voient une sorte de médiatisation “fashion” voire une façon de vendre ce mouvement  musical et engagé,  Evelyne et Alice, les deux jeunes filles recrutées pour le tournage du vidéo-clip de  Flawless de Beyoncé se sont un peu retrouvées là…par hasard ! Ni fan de la reine du hip hop, ni accros aux passages TV, c’est simplement pour se faire de l’argent “facile” qu’elles et leurs copains ont décidé de prêter leur image dans ce clip. Ni vendus, ni déguisés, ces “vrais” skinheads ont choisi d’en être fiers et de participer à une vidéo où l’ont voit les skinheads non racistes comme à leurs origines dans les années 60: multiculturels. ” Je ne comprends pas la réaction de certains comme s’il fallait absolument que ça reste caché! Moi je suis fière de ce que je suis. Tous les jours je suis habillée comme ça“. Même si à première vue le rapport est loin d’être explicite entre Beyoncé et les skinheads, l’expérience aura mis sous le feu des projecteurs un mouvement mal connu…Et deux jeunes skinheads girls parisiennes à l’identité bien assumée. “Franchement c’est vrai que pour nous c’était étrange ! Par exemple on nous a proposé d’aller tous ensemble en boîte avec Beyoncé à la fin du tournage. Tout le monde était super contents…mais nous, on s’en fichait. On avait juste envie de rentrer chez nous en fait“, raconte  Evelyne. “Mais on s’est bien amusés même si quand la vidéo est sortie, je pensais juste être en fond comme les autres !” confie-t-elle. La rencontre improbable entre Beyoncé et nos skinheads girls parisiennes.

BEYONCE FLAWLESS SKINHEAD GIRL

“Bow down Bitch ! “

Cette bande de potes s’est retrouvée il y a quelques mois à postuler à une annonce de l’agence New Untouchables sur les réseaux sociaux : “On nous demandait juste d’envoyer quelques photographies de nous, ils cherchaient clairement des skinheads, Mods etc…” explique Evelyne, “mais jamais il n’a mentionné à qui était destiné le clip. Tout était secrètement bien gardé. On ne l’a su que le jour du tournage“. En effet, ce jour-là on leur confisque leurs portables et fait signer une clause de confidentialité car rien ne devait filtrer. “Pour nous c’était simplement de l’argent facile !” ajoute Alice, jolie skinhead blonde de 21 ans qui apparait aux côtés de Beyoncé sur un vieux canapé déchiré, déposé dans le couvent où a été tourné le clip de “Flawless”, près de la Gare de L’est. Le tournage lui, s’est déroulé mi-octobre, la boite de production recherchait spécifiquement des jeunes gens lookés Skinhead anglais. “Il fallait apporter également quelques vêtements supplémentaires et nos vêtements portés sur les photographies envoyées, on avait été sélectionné là-dessus. Pourtant quand on est passé au stylisme à notre arrivée le samedi après-midi, on avait l’impression que la production n’avait rien compris à notre identité !” s’offusque Evelyne. “C’est vrai que ça faisait bizarre d’être parmi des mannequins, des danseurs et des figurants habituels !” réalisent les deux filles, nous on est venues habillées comme tous les jours et les autres passaient au stylisme pour devenir des sortes de punks ou skinheads haute couture“. Au total, une cinquantaine de figurants participent au tournage mais seulement 4 skinheads parisiens et un couple venant de Brighton, venu pour l’occasion. Personne n’est au courant qu’il tournera dans le clip du prochain album de Queen B. Une chose est sûre une fois qu’elles y étaient les filles n’allaient pour autant pas se laisser faire : ” On ne voulait clairement pas être déguisé” raconte Alice. Un look pas très skin mais plutôt punk 80’s assez cliché. “Du coup c’était du sexy punk !” ajoute Evelyne. “Alors que j’étais dehors, les habilleuses pensant que j’étais anglaise parlaient de moi sans gène en disant ce qui n’allait pas dans mon look, et je me suis dis qu’ils n’avaient en réalité aucune idée de ce qu’était réellement un skinhead…” Et pourtant ce qui aurait pu vite tourner en parodie de ce mouvement sérieusement underground est issu d’une passion farouche du réalisateur; Jake Nava. “Il avait un classeur entier de photographies de skinhead, il avait vraiment fait des recherches sur le sujet” confie Alice.

“Elle a des racines qui viennent de la soul et qui nous touchent, après son album personnellement  je ne l’achèterai pas”

J’ai entendu dire qu’il rêvait en fait de réaliser depuis longtemps sur le mouvement skinhead et que quand l’opportunité du clip de Beyoncé s’est présentée, comme ils étaient pressé, il lui ont un peu laissé carte blanche! Voilà pourquoi, Beyoncé se retrouve entourée de Birds” raconte Evelyne. Un clip assez risqué à la base, au vu des clichés racistes qui entourent les skinheads. Le réalisateur ayant lui-même souhaité remédier à cela en ayant des skinheads black représentatifs de l’origine du mouvement anglais : le skinhead reggae des années 60. “Qu’on le veuille ou non, c’était un genre multiracial !” explique la jeune femme car entre deux scènes les langues se délient et les curieux posent quelques questions… “Beyoncé était assez curieuse aussi. A un moment, un ami à elle, une véritable armoire à glace est venu vers moi et m’a dit “c’est quoi ta coupe de cheveux, c’est super original !” Je lui ai expliqué que c’était une “Chelsea” la coupe des skinheads girl, il a trouvé ça génial et il m’a présenté à Beyoncé. Franchement, qu’on aime ou pas, ça reste une super star et c’est impressionnant” dépeint-elle. 

La styliste avait tout faux.

Alors que l’expérience avec les stylistes s’avère désastreuse, que le groupe hésite à larguer les amarres au premier jour de tournage, lorsque le réalisateur arrive et les repère, c’est la petite bande qui est choisie comme “modèle” côté stylisme. “Visiblement il n’était pas satisfait des looks. C’est seulement quand il a vu le couple de skinhead de Brighton qu’il a dit que c’était ça qu’il voulait. On avait des vêtements de rechange et on a dû en prêter aux autres figurants, avec la grande frayeur de ne plus les retrouver car ce sont des vêtements qui ne sont pas faciles à trouver, souvent vintage comme du Fred Perry, Merc, Ben Sherman du Levis, des Doc Martens, Monkey Boots.“, narre la jeune brunette. “C’était un peu notre petite vengeance face aux stylistes qui nous ont dévisagé dès le départ de la tête aux pieds (rires). On sait ce qu’on fait, on s’habille comme ça tous les jours, ce n’est pas un déguisement!“, s’exclame Alice. Le décor planté dans un ancien couvent voulait recréer un squat punk. “Ils avaient jeté des canettes et des trucs par terre” ajoute Alice, De la bière jetée sur le sol et des affiches “Oi” sur les murs suffiront à recréer une ambiance digne du film This is England. Et niveau musique tout est fait pour les mettre dans l’ambiance. “On dansait soit sur du ska soit sur du rocksteady, de la vrai musique de skinhead. Suivant les scènes on faisait des poses ou alors on se poussait les uns les autres avec Beyoncé“.

Pogoter avec Beyoncé

Quand Beyoncé est arrivée sur le tournage, tout le monde a retenu son souffle, narre Alice, peu estomaquée. On a eu un souci d’ailleurs pendant les scènes de pogo, elle se sentait mal à l’aise aussi qu’on n’ose pas la toucher ou la pousser ! Le réalisateur est même intervenu à ce sujet, poursuit Evelyne. Pendant une scène elle est tombée et là, idem tout le monde a retenu son souffle alors qu’elle s’est relevée et a rigolé ! Je pense qu’elle s’est bien amusée au final dans ce clip. Ca se sentait.” conclut-t-elle. La surprise finale réside dans ces gros plans sur les skinheads parisiens et toute l’attention qui leur a été portée. “On s’est rendues compte qu’on était  souvent en gros plan et on était un peu gênées d’ailleurs !’. Plusieurs scènes montrent en effet les deux skinheads parisiennes au premier plan (voir les photographies ci-dessous) :

Capture d’écran 2013-12-20 à 14.08.49

Capture d’écran 2013-12-20 à 14.10.43

“Cette scène où on est avec Beyoncé sur le canapé a été tournée en vitesse à la fin des deux jours car le réalisateur voulait des filles pour alterner avec la scène identique où ce sont  deux garçons. Beyoncé nous a demandé si on connaissait les paroles et quand on lui a dit “non” elle a proposé de nous les apprendre!” s’exclame Alice, étonnée par l’amabilité de la star.

Rencontre : des skinheads girls parisiennes dans le clip "Flawless" de Beyoncé

“Il y avait des meufs qui se déhanchaient comme des folles, qui avaient vraiment envie d’apparaitre à l’écran, nous on ne demandait rien et on était tout le temps à l’image ! “, livre Alice dont les regards de bad girls dans la vidéo contrastent avec sa douceur naturelle.

Même si la première réaction de celle-ci à la vision du clip a été de crier “au secours!“, avouera-t-elle en rigolant, le côté féministe du titre n’est pas sans les soulager un peu.  “Tant mieux si le message est qu’on est pas des femmes faites pour être cuisinières ou autre et qu’on a envie d’être ce que l’on veut être.” confie Evelyne qui espère, sans trop y croire, que les plus intrigués iront chercher un peu plus loin sur ce mouvement qu’une chemise à carreaux et des Doc Martens sur Ebay.