On ne présente plus Serge Gainsbourg, génie pour les uns (la grande majorité) ou imposteur pour les autres (ils sont bien peu) : il a marqué la chanson française de manière indélébile, par ses chansons surtout mais aussi par son attitude provoc et ses frasques. De l’autre coté de l’Atlantique, Gainsbourg est souvent comparé à Andy Warhol, avec juste raison, ceux deux-là étant tous deux des touche-à-tout, des opportunistes mais aussi de brillants artistes dont l’influence se fait toujours sentir aujourd’hui. 

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Il y a 25 ans, le 2 mars 1991, disparaissait Lucien Ginsbourg que tout le monde appelait communément Gainsbourg. Ce fils d’immigrés russes juifs qui voulait être peintre aura réussi dans la chanson : de ses débuts difficiles en raison de son physique, il en fera une force et une attitude qui feront tomber les plus belles femmes dans ses bras, de Jane Birkin (qui sera sa muse et compagne durant de longues années) en passant par Brigitte Bardot jusqu’à Bambou, sa dernière épouse.

Coté musique, c’est en écoutant Boris Vian qu’il aura le déclic (ce dernier à sa mort le comparera à Cole Porter) et qu’ il signera ensuite des classiques, comme “le poinçonneur des Lilas” mais aussi “Douze Belles Dans la Peau”, “Ford Mustang” ou “Requiem Pour Un Con” (musique du film “Le Pacha” de George Lautner en 1968 dans lequel il fait une apparition dans son propre rôle). Son premier album il l’enregistrera en 1958 avec Alain Goraguer, l’arrangeur musical de Vian. Il collaborera avec Juliette Gréco et lui écrira le fameux “La Javanaise” en 1962.

Mais c’est avec les yéyés et notamment Françoise Hardy (“Comment Te Dire Adieu?”) et France Gall (“Laisse Tomber Les Filles” mais surtout “Poupée de Cire”, lauréate du grand prix de l’Eurovison de 1965) qu’il aura vraiment de grands succès : tout le monde se souvient du délicieux “Les Sucettes à l’anis” (1966). Il Enchaîne ensuite avec Bardot (Harley Davidson, Bonnie & Clyde..) mais c’est en 1968 que le tournage du film Slogan qu’il rencontre Jane Birkin qui deviendra sa muse et sa femme (“69 Année Erotique” mais aussi “Je t’aime, Moi non plus” longtemps le seul titre français à être parvenu à s’être classé aux plus hautes places des charts anglais). Il est connu notamment pour réutiliser de manière régulière et très intelligente des mouvements de musique classique comme Beethoven pour “Poupée de Cire”, Chopin pour “Jane B”, Brahms pour “Baby Alone in Babylone”, Dvorak pour “Initials BB” ou encore Chopin pour son mythique et controversé “Lemon Incest” avec sa fille Charlotte.

Ses albums ne seront pas toujours des succès commerciaux mais néanmoins encensés par la critique comme Histoire de Melody Nelson ou encore L’homme à la tête de chou mais c’est avec sa “Marseillaise reggae” qu’il retrouve le succès. Durant les années 80 il se métamorphosera en Gainsbarre et poussera la provocation encore plus loin : il signera aussi deux albums aux accents funk et hip hop : Love On The Beat et You’re Under Arrest. En 1990 il écrit les paroles du second album de Vanessa Paradis avec notamment “Tandem”.

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Dans l’ouvrage “Gainsbourg, le génie sinon rien” (aux Editions Textuel), Christophe Marchant-Kiss nous montre à travers les 248 pages de son livre comment la vie et l’oeuvre de Serge Gainsbourg sont inextricablement liés, et ce grâce à pas moins de 150 documents iconographiques : il revisite le répertoire d’un artiste hors du commun évitant le sensationnel et la mythologie saillante du personnage public. Avec l’aide de la famille Gainsbourg / Birkin, on comprend mieux l’artiste mais aussi l’homme, avec des souvenirs personnels ds parents de Serge jusqu’au dessins de sa fille Charlotte jusqu’à sa dernière demeure de la rue de Verneuil.

Serge Gainsbourg & Friends - Visuel Définitif

Coté musique, la compilation Serge Gainsbourg & Friends (4 cd – Wagram Music) est un petit bijou qui reprend les premières années de l’artiste de 1957 à 1962 avec des titres cultes sur 3 cd comme “Le Poinçonneur des Lilas”, “Ronsard 58”, “Du Jazz dans le ravin”, “L’eau à la bouche”, “La chanson de Prévert”, “Douze Belles dans la peau”, “Sois Belle et tais-toi”, “La recette de l’amour fou”, “Baudelaire” ou Requiem pour un twister” (près de 50 morceaux en tout). Quand au quatrième et dernier cd, il est consacré aux plus grands interprètes de Serge dont certains surprenants) comme Juliette Gréco, Petula Clark, Brigitte Bardot, Hugues Aufray, Isabelle Aubret, Alain Goraguer, Jean-Claude Pascal, Catherine Sauvage, Michele Arnaud, Philippe Clay et bien d’autres. Voilà le plus beau résumé des premières années d’un artiste qui était en passant de révolutionner la chanson française : un must !

Ce 25ème anniversaire de la mort de Gainsbourg est l’occasion de s’immerger un fois de plus dans l’univers d’un artiste majeur. Et comme il est mentionné dans le Larousse : “Doué d’un humour grinçant et subtil, il a su imposait au public un personnage désinvolte, désenchanté et sardonique qui cache une très vive sensibilité.” Gainsbourg est ici, hors du temps, de tous les temps.