Les vrais assassins n’évoluent pas en bande. Ils aiment faire le travail eux-mêmes. Choix des victimes, méthode de meurtre et disparition des corps, tout se doit de passer par leur cerveau enflé par le mal. Spaceghostpurrp est de ces mecs là.

  

Même s’il est soutenu par une clique de cinglés nommé le Raider Klan, c’est en solo que le rappeur a commis son dernier méfait : Mysterious Phonk. Unique producteur et quasiment unique rappeur de l’album, Spaceghostpurrp vient de signer un disque dont la folie sèche et sanguinaire ne peut même pas être excusée par un quelconque effet de groupe. Froid comme le baiser d’un Glock, Muney Jordan (dans le civil) remue les ténèbres les plus visqueuses du hip-hop avec un sadisme qu’on avait pas vu depuis le premier album de Three 6 mafia, sa référence ultime. Samples porno, cloches funèbres, textes à la limite du snuff movie et codéine plein la cervelle, le rappeur de Morgan City en Floride récite ses psalmodies outrageantes sur un disque maîtrisé de bout en bout qui a même réussi à séduire 4AD, label habituellement plus porté sur les guitares brumeuses .

 

Mais le plus impressionnant dans cet album reste encore la qualité des productions qui oscillent entre violence sourde (Tha Black God), atmosphère fumeuse (Mystikal Maze ou Raider Prayer) et beats Dirty South en pleine mutation (Don’ Give A Damn ou Paranoid). Dans cette génération de rappeurs de moins de 25 ans, Spaceghostpurrp est désormais le chevalier noir qui signe des disques fascinants sculptés à la batte de baseball. A la manière de Lil Ugly Mane, autre rappeur dingo avec qui il n’est pas conseillé de traîner, Spaceghostpurrp ramène le hip-hop dans les bas-fonds, loin des Maybach rutilantes et de la course aux diamants les plus brillants, d’où son clash avec le crew d’ASAP Rocky. Ici, que du sombre et du poisseux, comme sur les meilleurs Wu-Tang Clan ou Mobb Deep, l’exagération sudiste en plus.

 

Nul doute que si cet homme meurt un jour dans un drive-by, lors de l’autopsie, le médecin légiste ne trouvera dans son cadavre qu’un amas rampant de haine et une odeur d’entrailles infectées depuis trop longtemps.

 

Par Simon Clair