Le Pitchfork Festival a de nouveau sorti le grand jeu. Pour sa troisième année, toujours sous la nef de la Grande Halle de la Villette, ce ne sont pas moins de 33 groupes qui se sont succédé pour notre plus grand plaisir. Modzik y était et vous parle de cette édition haute en couleurs. Analyse.

Les Coups de coeur
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L’électro sombre de Darkside était une des prestations les plus attendues de cette première journée de festival. Le cadre est mystique. Un écran géant noir et un énorme disque métallique tournant sur un axe vertical sont installés sur scène. C’est dans un climat électrique que Nicolas Jaar, et Dave Harrington font leur entrée. Passée une introduction calme et inquiétante, les beats s’affolent soudainement quand une pluie d’étoiles fait son apparition derrière le duo new-yorkais. Le set fera la part belle aux morceaux de leur premier album Psychic, en alternant sans cesse entre électro futuriste et mélodies stellaires.

Le projet de Trevor Powers avait déjà franchi les murs étroits de sa chambre d’adolescent avec Wondrous Bughouse, son fabuleux second album. Sur scène, la communion avec l’artiste est peut-être encore plus intense : les compositions du groupe s’épaississent, prennent de l’ampleur et s’épanouissent, faisant naître chez l’auditeur béat mille émotions. Youth Lagoon a prolongé ce plaisir en fin de set avec une version étirée et fort prenante de Dropla dont les multiples répétitions de You’ll never Die résonnent encore dans nos têtes.

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Groove incendiaire tout en retenue, solos de guitares addictifs et pas de danse bien à lui : aucun doute là-dessus, Blood Orange nous a ébloui de toute sa classe lors de la première journée du Pitchfork Festival. Accompagné sur scène de son full band et de la choriste Samantha Urban du groupe new-yorkais Friends, Devonté Hynes a enchaîné tube sur tube avec une décontraction étonnante en piochant aussi bien dans son premier album Coastal Grooves, que dans le très riche Cupid Deluxe à paraître en ce mois de novembre. L’avenir de la soul futuriste est assurée. Et vive les cols roulés.

Le retour de nos Australiens favoris Jagwar Ma ne nous a pas déçus. Après avoir retourné la Flèche d’or il y a quelques semaines, le groupe faisait cette fois face à un public beaucoup plus large et une salle bien plus vaste. Habitués à jouer les premières parties de concerts de Foals, les comparses sont très à l’aise avec ce type de configuration. C’est flagrant et ils s’en donnent à cœur joie pour faire bouger la foule. Jono Ma aux machines nous laisse une nouvelle fois apprécier ses rythmiques imparables, tandis que le chanteur Gabriel Winterfield sa lâche totalement, torse nu, sur les deux derniers morceaux Four et The Throw pour un final épique.

Les Révélations
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Bienheureux ont été les festivaliers qui sont venus tôt en ce samedi et dernier jour du Pitchfork Festival. Empress Of, nouvelle sensation venue tout droit de New-York, nous a livré une prestation charmante et fort excitante pour leur premier concert sur le sol français. Sous des faux airs de Grimes, la chanteuse Lorely Rodriguez a pris un plaisir non dissimulé à enchainer ses chansons pop luxuriantes, avec un bon nombre de titres inédits qui feront certainement l’objet prochainement d’un premier album pour lequel on trépigne déjà d’impatience.

Le duo Majical Cloudz joue quant à lui haut et fort la carte de la sincérité. Le Montréalais Devon Welsh nous fait part de remarques décalées et souvent grinçantes entre chacun des titres, qui font tous preuve d’une sensibilité et d’une puissance déconcertante. On est emporté et captivé par les moindres mots prononcés à travers sa voix profonde. Ça nous prend par les tripes, surtout quand le chanteur se lance a capella. Le mélancolique Bugs Don’t Buzz et le saisissant This Is Magic feraient chavirer les plus endurcis. Le set est un petit bijou de grâce cinglante.

Les Déceptions
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Noah Lennox, membre d’Animal Collective et artisan de son projet solo Panda Bear, est un musicien qui n’a plus rien à prouver. Néanmoins, la retranscription sur scène des compositions studio peut rencontrer des fortunes diverses. Cela s’est confirmé sous nos yeux et nos oreilles pourtant attentives. Il a ainsi été difficile de suivre l’Américain dans toutes ses expérimentations à la cohérence parfois trop bien cachée.

La prestation de Baths commence pourtant fort avec le délicat et pourtant dansant Miasma Sky, qui faisait d’ailleurs office de bande-originale de la vidéo promotionnelle du festival. Mais par la suite, la voix légèrement criarde du chanteur et les rythmiques poussives nous laissent un peu froids. On aurait apprécié plus de nuances dans ces morceaux bien trop saturés.

Une nouvelle fois organisé avec brio, le Pitchfork Festival brille comme chaque année par la qualité et l’exigence dans les choix des artistes programmés. La Halle de la Villette sied parfaitement à ce magnifique événement qui le lui rend bien. On attend avec impatience la prochaine édition.

Par Arthur et Benjamin Mauries

Crédit photo Pitchfork Festival Paris 2013 et Jeanne Hancock