Au détour d’un week-end bruxellois, je tombe sur une écharpe oversize toute douce, épurée et de qualité. Coup de cœur… et coup de chance, car la créatrice se trouvait-là. Deux minutes après, son associé-amoureux débarque accompagné de leurs deux huskies adorables, Léo et Laica : “la famille est au complet”. L’Atelier Nålebinding, c’est pour les accros du tricot, mais pas que. C’est aussi pour les soucieux de l’Humain, d’une mode cocooning, contemporaine et écologique. Je vous laisse lire par vous-mêmes !

Qui se cache derrière cette marque au nom viking ? 
Moi (Marie Herlin) designer textile et maille, et Maxime Gandon qui était en architecture. Il est tombé dans le textile mais aussi amoureux.

Vous travaillez justement en amoureux. Comment répartissez-vous les rôles ?
Je gère toute la partie “créative” passant par les prototypes des points maille, le choix des coloris et matières et bien sûr du thème. Je travaille avec mon styliste Quentin Lamock pour les coupes, mais je commence de plus en plus à prendre le pas vers le dessin et à exprimer mes propres envies sur les formes.
Maxime gère toute la partie administrative et marketing mais il est de plus en plus présent sur le terrain de la création par son regard avisé sur mes choix. Il s’occupe aussi désormais des bains de teintures home made car c’est un travail précis et ingénieux qui le passionne. Ayant prit pas mal de connaissances avec notre industrielle en bonneterie, il m’aide sur le choix des designs des points maille.

Nalebinding modzik

Qu’est-ce qui vous a donné envie de créer Nålebinding ? Vos parcours n’étaient pas destinés à être dans la mode si j’ai bien compris ? 
Je venais tout juste de finir mes études de design textile aux beaux arts de Bruxelles, avec une spécialisation d’un an en Master Knitting Design. Mes professeurs étaient unanimes pour que je lance ma marque suite à mon travail de fin d’études. J’ai dans un premier temps intégré le MAD in Situ, qui est une sorte de laboratoire créatif pour designer et qui met à disposition un espace/atelier pour pouvoir travailler sur nos projets.
Nålebinding est né juste avant ma rencontre avec Maxime. J’avais le nom en tête, je savais ce que je voulais faire mais de là à partir dans la mode, je n’en n’étais pas certaine car je suis avant tout designer textile et pas styliste. Et la forme est une toute autre histoire.
Au départ, l’idée était de faire des écharpes uniques et de qualité. Puis on a lancé des pièces faites à la main avec un fil qu’on avait retravaillé grâce à l’investissement d’une machine à bande industrielle… et c’est là que tout a démarré… et que ma peur de la mode s’est effacée petit à petit.
Pour Maxime c’est tout nouveau. Lui il venait d’un monde plutôt technique lié à l’univers de l’architecture et du bâtiment. Mais il a été passionné par mon univers et mes obsessions pour le Denim (thème de ma première collection) au point de reprendre à zéro des études dans le design textile. Aujourd’hui, il désire prendre en main la collection Homme qu’on lancera dans l’année. Je n’aurai pas mon mot à dire sur le choix des matières et coloris… mais c’est aussi normal que je lui laisse un peu de place dans notre univers créatif.

 

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Vous vous inscrivez dans la tendance de la transparence. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre manière de voir la mode d’aujourd’hui ?
Quand on est jeune, on se rend pas compte de tous les enjeux que subit notre monde. Ni que certains de nos actes sont nocifs pour notre futur. Nous avons décidé de privilégier la qualité à la quantité. D’avoir une production locale afin de renforcer l’économie mise à mal de notre pays, mais aussi de perpétuer un savoir faire belge qui nous est cher.
Certes faire le choix d’une production belge ou même française est un coût mais nous avons la chance de travailler avec des gens qui ne demandent pas de quantité excessive (ce qui est un risque quand on se lance) et dont on est sûrs des conditions de travail.
Pour ce qui est de l’assemblage nous favorisons les ateliers de réinsertion sociale (atelier Muelieris dans notre cas) aussi localisé dans notre pays. On aime travailler avec un petit groupe de personnes, de confiance et motivés. Le côté humain est quelque chose de très important pour nous. On aime savoir avec qui on va/veut travailler. C’est pour ça que le « face to face » est une de nos priorités.
Pour les matières notre choix se porte en grande majorité sur le naturel avec un tracing certifié et un besoin d’être sûr que l’animal (exemple les moutons lors de tonte) a été bien traité. C’est peut être un peu « baba cool » mais ce sont des choses essentielles pour nous. On prend de plus en plus conscience des actions contre notre environnement et on veut améliorer les choses en prenant un pas différent, sans pour autant faire une mode « hippie » ou altermondialiste. L’idée c’est d’utiliser le moins de chimique possible, et d’aller vers tout ce qui est naturel, d’intemporel et d’unique avec tous les attraits de la tendance mode de nos jours.

 

Nalebinding Modzik  Nalebinding modzik

 

Comment procédez-vous à la fabrication de votre textile ? (fournisseurs, confection, origine etc.)
Pour les cônes de fil on commande en Italie car ce sont les seuls qui ont de la laine de qualité – idem pour le coton. On a des filatures réputées qui se doivent d’être transparentes de A à Z. On aimerait à l’avenir trouver des filateurs belges mais la laine du mouton belge est plutôt épaisse et rêche, ce qui n’est pas agréable pour la peau. Il faudrait alors agir avec des traitements, donc pas mal de chimique…
Pour la fabrication des matières nous produisons chez un industriel en bonneterie près de Mouscron. Petite entreprise familiale avec un savoir faire digne d’un ingénieur.
Accessoirement c’est un de mes anciens professeurs en maille, donc l’idée de continuer à garder contact et qu’il comprenne au mieux mon travail, on ne pouvait pas trouver mieux !
Pour la confection nous travaillons avec l’atelier Mulieris à Bruxelles. Des femmes et hommes extraordinaires et talentueux. Des personnes courageuses et travailleuses.
Pour tout ce qui est pièce main, je travaille avec Sigita. Je l’appelle un peu la femme aux mains de fée. Je trouve qu’on se complète très bien. Elle a une technique qu’aucun mot ne pourrait décrire. Mais son travail créatif est aussi très intéressant et j’espère qu’un jour, elle aussi se lancera.

Quelle mode trouve-t-on en Belgique de nos jours ? 
La mode belge est particulière. On aime ou pas. Je dirais que les Belges se caractérisent par des formes très amples, limite oversize. On aime le coté chaud (vu nos températures) et doux.
Niveau coloris le jaune moutarde et le vert canard associé à un bordeaux c’est un peu les couleurs locales, je dirai. On aime beaucoup ce style mais on s’inspire surtout de la matière avant tout, gardant ainsi nos origines remixées avec d’autres univers.

 

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Quelles enseignes vous inspirent ?
Essentiel, une marque anversoise géniale, Bellerose & Maison Blanche aussi traduisent très justement le style belge. Et mon coup de cœur du moment c’est Jean-Paul Lespagnard, juste fantastique. Je n’oublie pas Christian Wijnant pour le talent indescriptible de la maille.

Je vous ai découverts à l’Atelier en Ville. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce concept-store ?
L’Atelier en Ville c’est une histoire de famille. C’est un super concept-store qui nous a laissé notre chance pour nous vendre. Ce sont des acheteurs à la base avec un goût particulier. C’est un endroit convivial et unique. Je pense que ce n’est que le début d’une longue lignée de magasins pour eux. Mais ce que j’aime chez eux c’est que ce sont des bosseurs, tout le monde met la main à la pâte et c’est ce qui fait qu’ils arrivent aussi a fidéliser une clientèle parfois difficile en Belgique. N’est ce pas génial d’avoir un endroit où on trouve tout pour toute la famille et qui ne fait pas partie d’une grosse chaîne de concept-store où tu trouve toujours les même trucs partout ? Pour nous c’est la place to be de la Bruxelles !


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