Grâce à la renaissance de la dentelle, de nombreux jeunes talents de designers se sont fait une place dans l’univers de la mode. Parmi eux, une se distingue tout particulièrement : Gioia Segehers. Cette créatrice d’origine flamande a été découverte par Caudry lors de la Weekend Fashion Awards 2012 qui l’a encouragé à poursuivre sa passion pour la dentelle en lui offrant la possibilité de fabriquer du rêve ! Des robes du jour, du soir, de tous les jours, la jeune femme explore aujourd’hui la mode en dentelle sous différents aspects à travers des collections témoignant fidèlement son ancrage dans son époque et son style personnel. Rencontre avec Gioia Seghers.

Modzik : Tu as remporté beaucoup de prix ces derniers temps ce qui t’a permis de te faire connaître. Qu’est-ce que cette reconnaissance du public t’a aussi apporté ?

Gioia Seghers : Après être restée 5 ans dans cette « bulle d’étude » de la Cambre où l’on travaille beaucoup chez soi, renfermé et coupé de la réalité c’est sur que la rencontre avec le public et les journalistes était attendue même si un peu redoutée, de plus que nous n’étions que deux à terminer l’année. Ces prix m’ont évidemment touchée car ils m’ont permis de croire en mon travail, ils m’ont non seulement apporté plus d’assurance mais ont été le réel tremplin grâce auquel j’ai pu lancer ma première collection commercialisable. Depuis ça tout s’est enchaîné très rapidement.

Comment t’es venue cette passion pour le textile, la mode, la dentelle ?

Vers l’âge de 12 ans quand ma grand-mère, mon symbole de féminité et d’élégance, m’a appris à crocheter et à tricoter aux bords des côtes italiennes. J’étais fascinée par la patience et la minutie qu’elle avait pour réaliser des nappes semblables à de la dentelle. Je pense que c’est là que tout a commencé.

Pour toi, que représente la dentelle plus particulièrement ?

J’ai toujours été en admiration devant les dentelles et les guipures de qualité, ces matières m’évoquent raffinement et subtilité. Cela représente pour moi tout un savoir faire, qui se transmet au fil des générations.

Pour ma collection de fin d’études, lors de mes recherches, j’avais expérimenté des œillets métalliques sur une dentelle de moindre qualité. Je recherchais à confronter ce textile noble avec un matériau plus brut. Cette même semaine, le Musée de Dentelle de Caudry, m’a contactée pour réaliser une collaboration en me fournissant les plus belles dentelles de leur région. Ce fut une première et une aubaine d’avoir pu travailler avec autant de liberté ces belles matières.

Pourquoi continues-tu à vivre à Bruxelles ?

Bruxelles est ma ville natale, ma famille et mes amis y vivent, je m’y sens bien. La proximité de Paris est très pratique lorsque je dois me déplacer pour aller présenter mes collections. Bruxelles m’inspire confiance et sérénité. Je ne sais si Bruxelles est une capitale de la mode en devenir mais elle certes en évolution constante et ce à plusieurs niveaux (mode, architecture, arts de la scène etc…).Elle continue à me surprendre d’années en années. 

Quand tu viens à Paris, quelles sont tes habitudes ?

C’est l’occasion de passer surtout du temps avec mon amie d’enfance et jeune prometteuse artiste, Bianca Argimon, qui vit à Paris. Et profiter de faire des expositions notamment au Palais de Tokyo, Palais Galliera, Musée du Quai Branly, les Arts Décoratifs, … un renouvellement constant d’inspiration.

Le style de tes collections est très contradictoire. Reflète-t-il ta personnalité ou ta manière de travailler la matière, d’éduquer les formes du tissus,… ?

Je ne dirais pas qu’elle est contradictoire mais qu’elle est plutôt le reflet d’une constante évolution. Dans chaque collection je remets en question le vêtement, la façon de le porter. A partir de la matière que je choisis s’ensuit une recherche textile (détissage, superposition, développement des volumes…) qui guide le développement de ma nouvelle collection.

Quelle est ta plus belle rencontre dans le milieu de la mode ?

Une rencontre avec le créateur Haider Achkermann que j’admire depuis longtemps. J’étais émue et impressionnée par son humilité. Je souhaite que nos chemins se recroisent à nouveau.

Est-ce à travers des vêtements en dentelles que tu affirmes ton héritage flamand ? Y a-t-il d’autres signes, d’autres aspects dans tes créations qui illustrent ton patrimoine culturel ?

Les coloris noir et blanc reflètent peut-être mon côté belge plus austère, plus sobre, néanmoins j’attribuerai la féminité et l’élégance des mes collections à mon héritage italien.

Penses-tu avoir puisé toutes les ressources de la dentelle dans tes collections ?

Non, j’ai encore plusieurs pistes à parcourir. J’attends de retomber sur une dentelle qui me refasse envie, ce coup de cœur qui m’inspirera pour la travailler et l’intégrer dans mes collections.

Quels sont tes projets à l’avenir ?

La présentation de la nouvelle collection automne-hiver 2016-1017 que je présenterai à Paris durant la Fashion Week chez NoSeason et une belle collaboration avec Thierry de May : la réalisation de costumes pour son nouveau spectacle de danse pour Charleroi Danse prévu pour mai 2016.

Que pouvons-nous te souhaiter pour la nouvelle année ?

Que la marque prenne son envol.

Peux-tu nous dévoiler quel est le titre qui tourne en boucle en ce moment dans tes oreilles ou ta playlist lorsque tu prends le Thalys pour un Paris-Bruxelles !?

Who is it – Michael Jackson, reprise par Christine and The Queens.

http://www.gioiaseghers.com/