Jeudi 22h50. Le rendez-vous était donné au W Hotel dans le 9ème arrondissement. Nous sommes en avance, ce qui nous permet de boire un verre de Proseco à l’espace Lounge, pour la modique somme de 12€. Chaque lampée à son prix. Un décor loin du Détroit dans lequel Angel Haze a grandi. Venue pour un show à l’occasion de la soirée Stan Smith à la Gaîté Lyrique, on la retrouve dans sa chambre d’hôtel, Air Force 1 montantes aux pieds et sourire aux lèvres.

Modzik : Tu es à Paris pour l’event Stan Smith, tu possédais une paire ado ?
Angel Haze :
Non. Je ne sais même pas à quoi les Stan Smith ressemblent. Ce sont des Adidas non ? Je n’ai jamais porté de chaussures de marques, je n’avais que des marques un peu fake comme Fubu et Fila. (rires)

Modzik : Et tu portes beaucoup de sneakers ? Quelle est ta paire favorite ?
Angel Haze : 
Pas vraiment. Pour être honnête, je viens de recommencer à en porter vu que je peux customiser mes paires de Nike. Mais à la base, je porte surtout des bottes. Pour moi, ce sont les chaussures rêvées car je fais beaucoup de moto.

Modzik : En ce moment, il y a un retour du “old school’, autant en mode qu’en musique…
Angel Haze : Tous les jeunes qui se lancent dans le rap, aiment retrouver une vibe old school dans leur musique. Ce n’est pas forcément mon style musical mais je trouve ça vraiment cool.

Modzik : Ce n’est pas forcément ton style, mais tu as fait des covers de quelques tubes des 90’s. Je pense au ‘Doo Wap’ by Lauryn Hill et au Cleaning my Closet’ d’Eminem présents dans ta mixtape Classik…. 
Angel Haze : J’adore ces chansons. J’aime beaucoup celle de Lauryn Hill, mais ma préférée reste le Gossip Folk de Missy Elliot. Ce titre est un putain de Classique.
 

Modzik : Comme nous, tu attends un retour de Missy ?
Angel Haze :
À fond. Même si cela n’arrive jamais, je vais continuer d’y croire jusqu’à ma mort. (rires) C’est une rappeuse géniale, une productrice incroyable, et avec un véritable talent pour l’écriture et le chant. Elle devrait revenir sur scène.

Modzik : Tu as poussé ton label à sortir ton album fin décembre.
Angel Haze :
Mon label l’a mal pris au début, et puis ils ont fini par me dire : ” Tu sais quoi ? Si tu sais ce que tu fais pas de soucis. Aucun nouvel artiste n’ose sortir d’album la dernière semaine de l’année, où seulement des artistes majeurs parviennent à vendre. Mais tu vas te sentir plus embarassé qu’autre chose et surtout tu vas devoir bosser à fond si tu veux réussir à vendre cet album”. Alors je leur ait dit de le sortir. Pour moi, quand on croit en quelque chose, il ne faut rien lâcher. Et c’est ce que j’ai fait.

Modzik : Tu penses que grâce à internet, les artistes redeviennent les vrais maîtres de leur musique ?
Angel Haze : Oui je pense. Mais c’est étrange, car le monde est vaste. Donc, lâcher l’album sur Twitter était une bonne idée car il a pu être vu rapidement. Mais quelque part je n’ai pas touché tout le monde, il y a des millions de gens qui n’ont pas internet, ou même la télévision. Certaines personnes n’écoutent que la radio. Donc oui, internet est un outil génial, mais en même temps, tu ne t’adresses qu’à une partie du monde… 

 Modzik : Dernièrement, il y a beaucoup d’artistes féminines qui font du hip-hop. Ça semble créer quelques rivalités…
Angel Haze : Je pense que cette compétition entre les femmes est  un problème qui se ressent autant dans la musique que dans la vie courante. Les femmes entrent en compétition pour avoir un mari, pour un job… Mais ce n’est pas nécessaire ! On met au monde les enfants, nous sommes les reines du monde et rien ne devrait nous séparer. Pour moi, ça n’a aucun sens. C’est la raison pour laquelle j’aime autant Beyoncé. (chante Drunk in love)

Modzik : Sur ton album, il y a morceau avec Sia et un autre avec Jason Mraz. Tu aimerais bosser avec d’autres artistes dans le futur ?
Angel Haze : Hayley Williams du groupe Paramore…. J’ai aussi envie de dire Kanye West. Ce serait incroyable de l’avoir ne serait-ce que pour produire un morceau. Travailler avec King of Leon serait cool aussi. Et puis j’adore Pharrell. Si l’opportunité se présente je foncerais directe. Mais je l’épouserais d’abord (rires). Il est tellement beau, le plus black du monde… Ah non, il y a aussi l’acteur de Grey’s Anatomy, Jesse Williams.

Modzik :  Ce serait quoi pour toi un bon artiste ?
Angel Haze :
Pour moi, c’est une personne qui me touche personnellement. Il faut être un génie pour que les mots parviennent à atteindre quelqu’un. C’est cela un artiste. Le hip-hop vient du story-telling, et les artistes les plus talentueux sont ceux capables de décrire leur sentiment et les faire ressentir à quelqu’un d’autre. Comme Kendrick Lamar. Son album est unique, ça faisait longtemps que je n’avais écouté un album aussi bon. Kanye fait de la bonne musique également mais on sent qu’il trace sa propre voie. J’espère qu’on va découvrir plus d’artistes du genre de Kendrick Lamar.


Modzik : Qu’est-ce qui t’effraies le plus en tant qu’artiste ?
Angel Haze : 
Ne pas réussir à faire ce pour quoi je suis venue au monde. J’ai des objectifs tu sais. Merde, je ne fais pas seulement ce job pour le fun (rires). Pour moi, c’est aussi de la philanthropie. Je vois tant de personnes qui souffrent et qui traversent des périodes difficiles. J’ai l’impression que la raison de ma présence sur cette planète est de partager mes expériences, et j’ai appris de ce que j’ai pu traverser. Donner aux gens de l’espoir et les inspirer car c’est ce dont le monde à besoin tu vois. Une raison de vivre. Il faut aspirer au véritable altruisme, il faut pouvoir se mettre à la place des autres. C’est ce que je fais.

Modzik : Ça a été difficle de faire cet album ?
Angel Haze : 
Bizarrement non. Au début, c’était bizarre car à la base, je fais seulement des freestyles sur les chansons d’autres artistes. Je n’avais aucune idée de comment écrire une chanson. Je n’ai pas grandi en me disant qu’un jour je sortirai un album. L’an dernier encore, je me disais “Putain cet album ne va jamais sortir” (rires). C’est une expérience incroyable. Et puis il y a eu comme une évidence, et tout est devenu facile. Enregistrer pendant 8h par jour en studio et proposer des visions différentes de chaque moceau. Il m’a fallut passer au-dessus de mes incertitudes et finalement j’ai réalisé que j’avais ça en moi.

Modzik : Si le paradis existe, que voudrais-tu que Dieu dise à ton arrivée ?
Angel Haze : 
Un truc cliché du genre “Bien joué” (rires). Ce serait hilarant, je mourrais une seconde fois mais de rire. Ou alors, “What’s up nigger ?!”. Un truc cool et drôle.