Les images du mauvais garçon de la photo helmut newton (1920– 2004) vont habiter le grand Palais du 24 mars au 17 juin 2012. Cette première rétrospective en France sera composée de plus de 200 tirages, quasi exclusivement originaux ou vintage, qui seront mis en scène et accompagnés d’un film : Helmut by June, réalisé par la photographe June newton aka alice springs, épouse de l’artiste pen- dant plus de 60 ans.

Né le 31 octobre 1920 à Berlin, enfant de l’entre- deux guerres, Helmut découvre très tôt sa vocation : « J’ai commencé à faire des photos quand j’avais douze ans. J’ai alors acheté mon premier appareil et mon activité de photographe débuta. Ma vie consiste à faire des photos ». Viré de l’école à douze ans, assistant photographe à 14, un premier job de photojournaliste à Singapour qui s’avère un échec, il s’envole pour l’Australie. Il a 18 ans. Il y rencontre son premier modèle, Alice Springs… Qu’il épousera.

1961, un autre coup de foudre, le Vogue France… La mode… C’est la révélation… Leur col- laboration durera plus de 20 ans.

Alors que la révolution des mœurs est en germe, il introduit la sexualité dans le cliché de mode : « La mode est quelque chose de très érotique », se plaît à répéter celui qui, à l’instar d’un Irving Peen, Richard Avedon ou Guy Bourdin, fait ainsi partie des happy few qui marquent de leur sceau l’imaginaire mode autant que l’histoire de la photographie.

Pourtant, si son approche de la photo s’impose à lui comme une évidence, elle a en revanche plus de mal à séduire une société encore empreinte d’une vision de la femme idéalisée. Son travail sophistiqué, ses lumières dures, sa mise en scène et sa réflexion sur le nu en dérangent plus d’un. Helmut Newton, avec sa vision singulière propose une représentation de la femme qui si très répandue et admise aujourd’hui – le porno-chic, c’est lui – fait à l’époque figure de subversion.

Jouant à l’envi de la nudité, du rapport du sexe et de l’argent, du rapport des classes et de l’argent, Hel- mut Newton signe sa différence sans contrainte ni langue de bois. Une différence qui gêne. Susan Son- tag, écrivaine, petite amie de la photographe Annie Leibovitz et surtout théoricienne du féminisme, qua- lifia son œuvre de « déplaisante » et « misogyne ». Des groupuscules activistes, qui veulent émanciper la femme selon des préceptes bien réglés, pointent du doigt son travail, l’assimilant à un manifeste rétro- grade et machiste…

La controverse aidant, Helmut Newton devient très vite un artiste « bankable » qui continue de poser les jalons d’un prototype qu’on appelle aujourd’hui la femme newtonienne : des portraits de mode déca- lés, brulants de sensualité et d’ironie, imaginés dans de nouveaux formats (des séries en taille XXL aux dyptiques nus-vêtus).

Fidèle à son approche, celui qui aime dire que

« la beauté de la photographie est une information parfaite que l’œil ne peut pas donner » capte mieux que quiconque la réalité. Une réalité ultra moderne, ultra contemporaine.

(Re)découvrir aujourd’hui le regard tantôt voyeur, tantôt confidentiel d’Helmut Newton, c’est admettre l’intelligence d’un grand artiste qui avait compris bien avant l’heure le.pouvoir du porno-chic et l’impact de l’argent et du sexe sur une société pervertie par ses vices refoulés.

Grand Palais, Paris
Du 24 mars au 17 juin 2012
Galerie Sud-Est, entrée avenue Winston Churchill