C’est en feuilletant le premier tome d’ Intern Magazine, qui permet à des créatifs à travers le monde de parler de leur expérience en tant que stagiaire, que nous sommes tombés sur le travail de Monica Lek. Cette photographe et réalisatrice espagnole a collaboré avec des photographes de renom, qui lui ont permis de développer son “journal photographique”. Rencontre.

Modzik : Peux-tu nous parler de ton parcours ?
Monica Lek :
J’ai travaillé comme photographe et filmeur depuis mon Espagne natale et à New-York pour différents magazines et des projets personnels. C’est ce qui m’a permis de collaborer avec des photographes comme Richard Kern, Francesco Carozzini and Juan Carlos Alom. Mon travail a été largement mis en avant dans des magazines tels que Le Monde, le Washington Post, et TVE, la principal chaine de télé en Espagne.

Modzik : Tu as eu l’opportunité de travailler avec Richard Kern, peux-tu nous en parler ?
Monica Lek : Ce fut un vrai plaisir de travailler avec lui. Comme tu le dis, c’était L’OPPORTUNITÉ. Il a été un des pionniers dans les années 80, ses films ouvertement érotiques ont influences toute une génération.

Modzik : Tu as l’air d’avoir été beaucoup influence par les lieux dans lesquels tu as vécus… C’est essential pour toi ?
Monica Lek :
Ma volonté de découvrir de nouveaux horizons est ce qui m’a amené à New-York, et à photographier mes voisins pour une série photo qui a duré environ 2 ans. C’est là que j’ai compris l’impact que les individus ont dans ma vie.

J’ai grandit dans une petite ville au bord de la Méditerranée, là où tout le monde se connaît, être arrivée à New-York où personne ne vous connaît, ce fut un challenge, le début d’un nouveau cycle. Durant cette période, j’ai développé un besoin de dépeindre deux idées assez contrasté : authenticité vs l’artificialité.

Ces photographies montre un New-York nu, une ville sans maquillage. J’ai voulut montrer à la personne qui les regarde des individus qu’on ne voit pas normalement à l’écran. J’ai essayé de faire de cette série un témoignage de la vérité nue du monde et de sa beauté cachée. Rechercher et observer la lumière de mes voisins, leur dignité en tant qu’être humain ainsi que leur sens de l’honneur. J’ai photographié mes voisins selon mon expérience, à travers la vision de qui je suis. Avec ces captures, je fais mien la mémoire collective, un miroir dans lequel la société se reflète de manière continue et dans lequel j’espère être une voix.

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MODZIK : Tu fais aussi de la vidéo, qu’est-ce qui t’as attiré ?
MONICA LEK :
J’ai toujours voulu faire des films, c’est la raison pour laquelle j’ai commence la photographie, raconteur une histoire en utilisant une esthétique/poésie visuelle.

MODZIK : Tu travailles actuellement sur ton premier long métrage, « Lou Lou », peux-tu nous en parler un peu ?
MONICA LEK : Le but de ce film est de confirmer la vision d’Istanbul comme une passerelle entre l’occident et l’orient. Cette vision entre en dissonance lorsqu’il s’agit de la culture LGBT qui est un sujet tabou. C’est une sous-culture qui a été marginalisée par une société musulmane largement conservatrice. Le film suit la vie quotidienne de Lou Lou, de ses rêves, et des costumes qu’il se crée à l’aide son grand-père. L’évolution culturelle et sociale agit comme une dynamique pour le personnage de Lou Lou dont la vie et l’histoire ouvrent une fenêtre unique sur l’émergence de la nouvelle génération turque.

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MODZIK : Dernièrement la question du genre a été mise en avant dans les medias, est-ce de là qu’est né ton envie de travailler sur ce film ?
MONICA LEK : Premièrement, ce qui m’a attiré c’est qu’il s’agissait d’un univers qui m’était inconnu, puis à force de poser des questions dans la rue, j’ai réalisé que personne à Istanbul n’avait entendu le terme “drag queen”. C’est une petite sous-culture là-bas. La religion, l’idéologie et les traditions sont très fortes en Turquie. Fait intéressant : il y a 10 ans, 30 personnes ont organisé une parade pour la gay pride, l’année dernière plus de 30 000 personnes y ont participé.

Vous pouvez voir dans mes images, tous ses costumes extravagants, son maquillage…. Mais c’est la présence d’une religion extrême qui les crée. Un de mes amis gay rencontré à Istanbul m’a dit un jour qu’il se sent obligé de s’habiller de cette manière. Si il ne peut pas en discuter avec sa famille à cause de leur attachement à la religion, alors il doit trouver un autre moyen d’expression, et c’est ce besoin rébellion qui montre la manière d’être des drag queens. Ils perdent leur propre nature, l’ego doit agir, les forçant à parader de manière à dissimuler leur propre nature. Oui il y a un énorme contraste entre la religion et les drag queens, mais ils partagent la même dévotion pour quelque chose qui vous donne la foi, vous permet de supporter le quotidien.

Lou Lou teaser from Monica Lek on Vimeo.


MODZIK : Hormis Lou Lou, tu travailles sur un projet photo ?

MONICA LEK : Woman is a Woman, est le projet que je développe en parallèle de Lou Lou, il s’intéresse aux différents aspect de la femme. Je trouve que la psychè féminine et l’idée de femme comme créatrice de vie très fascinante. J’étudie constamment mes propres émotions en tant que femme. J’aime photographier le corps féminin, ses émotions, son essence instinctive, pour moi c’est un exemple de passion créative et de sagesse éternelle.

MODZIK : Quel style de musique écoutes-tu en travaillant ?
MONICA LEK : Tout dépend de mon humeur, mais si je travaille j’écouterais probablement de la minimal ou du post-punk.

MODZIK : Quelle question j’aurais du te poser ?
MONICA LEK :
Crois-tu en la réalité ?

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