Le travail de Parker Day a été comparé à celui de nombreux artistes confirmés, de Cindy Sherman à David LaChapelle en passant par David Lynch. Comme eux la jeune photographe, qui vit à Los Angeles, brouille les limites entre réalité et fantaisie et nous propose une galerie de portraits plus surréalistes les uns que les autres. Se jouant des notions préconçues de beauté et de genre, sa série ICONS est aussi séduisante que déroutante, à la fois ultra-saturée et sombre, drôle et inquiétante. Rencontre.

Tu travailles actuellement sur un projet intitulé ICONS. Est-ce que tu as justement des icônes personnelles ?
Étonnamment, je n’ai pas d’icônes, d’idoles ou de héros. J’ai appelé mon projet ICONS parce que les icônes sont des représentations symboliques, des archétypes de personnes. Je pense que cela permet de découvrir quelque chose de plus universel que simplement photographier une personne comme on la voit, de façon factuelle.

Quand as-tu commencé à prendre des photos ?
Quand j’étais une petite fille, ma mère m’achetait des appareils jetables et je mettais en scène mes animaux en peluches et mes poupées Barbie dans le jardin. C’était des vrais photoshoots avec des mannequins inanimés. Ensuite, j’ai assisté à mes premiers cours de photographie au lycée : c’est à cette époque que j’ai pris conscience que c’était une carrière que je pouvais poursuivre.

Tes modèles ressemblent plus à des personnages qu’à de vrais êtres humains. Qu’est-ce qui est réel et qu’est-ce qui sort de ton imagination ? Est-ce que tu discutes du stylisme, de tes idées avec eux avant de les photographier ?
C’est un mélange des deux. La fusion de la fantaisie et de la réalité est le but de mon travail. Je vois la réalité comme un élément très fluide, ouvert à toute interprétation et c’est cette idée que je veux mettre en avant dans mes œuvres. Mes mannequins collaborent souvent avec moi, ce qui apporte plus de vie dans ces images.

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Ton travail a été comparé à plusieurs artistes : Cindy Sherman, John Waters, David LaChapelle… Comment le décrirais-tu avec tes propres mots ? Que penses-tu de ces comparaisons ?
J’ai un respect immense pour eux et ils m’ont définitivement inspiré. Avant que je considère la photographie comme une carrière ou que je connaisse le nom de certains photographes, les murs de ma chambre étaient remplis d’images de David LaChapelle, arrachées dans des numéros de The Face. Ces artistes et d’autres comme William Eggleston, Weegee ou David Lynch expriment différentes facettes d’une mythologie américaine en plein développement, et j’essaye de me diriger dans cette direction.

Les modèles avec qui tu collabores sont souvent des amateurs. Comment les trouves-tu ? Qu’est-ce qui peut t’attirer chez une personne ?
Je les observe sur internet et je me faufile dans leurs DM. Je suis attirée par ce que je vois dans leurs yeux : quelque chose de sauvage, de brut. Je veux des personnes créatives, folles, qui ont fait un tour en enfer et n’ont pas peur de l’obscurité.

On retrouve des éléments dramatiques, sombres dans tes portraits, qui contraste avec les couleurs vibrantes que tu utilises. Tu aimes travailler cette dualité ?
Bien-sûr ! L’œil est attiré par le contraste et l’esprit veut faire sens de ce qu’il voit. Je veux attirer les gens et leur offrir quelque chose à se mettre sous la dent.

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Si tu n’étais pas photographe, quel métier exercerais-tu ?
Si je n’avais pas pu être photographe, par exemple si j’étais aveugle, je pense que je serais écrivaine. Comment exprimer les histoires et les images que j’ai dans la tête, sinon ?

Tu laisses de côté tout ce qui est perçu comme « joli » et tu crées une esthétique nouvelle. Ça doit être déroutant pour certaines personnes…
Je l’espère.

Quelle est la différence entre travailler sur ton projet et répondre à l’attente de clients, par exemple pour une série mode ?
Si je travaille pour un client, alors il faut que je pense à ce qu’ils veulent de moi, je dois visualiser leurs idées à travers mes propres yeux. Cela peut-être positive vis-à-vis de ma notoriété, de mes créations, mais aussi négative car il peut que je doute de moi-même ou que je m’auto-censure. Mais c’est à chaque fois un défi que je suis prête à relever.

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Quoi de prévu pour la suite ?
La publication du recueil de photographie ICONS et l’exposition des cent portraits finaux dans une galerie à Los Angeles.

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