Qu’on l’aime ou qu’on la déteste, Asia Argento polarise, certes, mais fascine par son honnêteté et par la passion qu’elle porte pour tous les projets artistiques qu’elle entreprend : actrice, réalisatrice, scénariste, DJ et chanteuse. L’artiste italienne est une femme aux multiples vocations, accomplie et amoureuse de la vie. Entre deux projets – sa trilogie de performances au Salò avec l’agence D/S et son prochain court-métrage et LP Shadow réalisé par Pascal Greco et Philippe Pellaud qui sera dévoilé fin 2017 via Nuun Records – Asia nous a consacré quelques minutes pour une interview 100% amour.

Asia Argento par Flavien Prioreau

 

Parle nous de ta trilogie de performances que tu as réalisé au Salò à Paris au mois de juillet…tu en as gardé de bons souvenirs? 

C’était une culmination de l’amour que je porte pour tous ces gens et amis artistes qui ont participé à ces trois soirées au Salò – c’était comme avoir un orgasme. C’est la joie totale d’être créatifs ensemble, de partager autant de bonnes énergies, de faire palpiter tous les sens – c’est ça l’amour. Bertrand Bonello, Lydia Lunch et Joe Coleman étaient de la partie. Le choix de mes collaborations est très personnel, il s’agit là de moments partagés avec des gens incroyables, qui ne sont pas forcément très publiques, plus confidentiels et c’est justement à ce genre de personnes que je m’identifie le plus.

Est-ce que la célébrité ‘prostitue’ l’amour que l’on peut porter pour son art ?

Oui, c’est exactement ça. Je me méfie souvent des films trop connus, de la musique qu’on entend partout, des choses trop universelles. Je ne dis pas que c’est mal ou que la célébrité rend l’art moins important mais je pense qu’on trouve l’authenticité d’une forme artistique plus dans son ombre que dans la lumière dans laquelle elle est exposée. La célébrité implique beaucoup de contraintes et de jugements et, au sein de ce microcosme, on a tendance à ne pas toujours pouvoir exprimer librement l’amour qu’on porte pour son travail, pour son art.

Et concernant l’amour personnel…que penses-tu du mariage ?

L’amour c’est la vie. C’est comme le fait de respirer, c’est une rencontre avec une autre âme, un grand esprit, quelque chose et quelqu’un d’indispensable. En ce qui me concerne, le quotidien est un tue-l’amour et le mariage avec toutes ses règles et ses conventions a éteint l’amour que j’ai pu avoir pour mon mari de l’époque. Vivre la vie de tous les jours avec quelqu’un, pour moi c’est impossible, le quotidien ralentit le désir et finit par tuer l’amour.

Et concernant l’amour maternel ? Tu es maman d’une fille et d’un garçon. Anna Lou Castoldi a d’ailleurs joué dans L’Incomprise, ton troisième film en tant que réalisatrice. Elle joue également dans le court-métrage Shadow à tes côtés…

Notre relation en dehors et face à la caméra est extrêmement fusionnelle. Être mère est une expérience incroyable. Tu portes quelqu’un en toi qui t’appartient d’une certaine manière mais qui n’est pas toi. Tu mènes cette personne à bon port, tu es son lit, elle est ton fleuve. J’ai eu la chance d’avoir deux beaux enfants, de cultiver l’amour que je leur porte, de partager avec eux la vie quotidienne et tous les problèmes que celle-ci implique… C’est ça aussi l’amour, partager et vivre un quotidien qui peut être difficile mais qui est constamment sauvé par l’amour. L’amour des enfants me touche particulièrement. Il est pur, pas innocent ; il a une forme de pureté incomparable à toute autre forme d’amour.

A-t-on vraiment besoin d’amour pour vivre ?

Certo ! Et surtout quand on est enfant. Une vie sans amour est une vie difficile. Quand tu grandis sans amour, la vie te casse car tu n’as pas les bases émotionnelles et affectives pour te protéger. On a tous besoin d’amour, même si on ne veut pas toujours se l’avouer. Et puis, il y a l’amour pour sa ou ses vocation(s) : l’amour pour l’art, l’amour qui nous sauve du quotidien…

Quel est ton amour idéal ?

Un amour possible. J’ai longtemps cru que la passion déchaînée et conflictuelle était l’amour, le vrai. Je pensais que l’amour était la douleur alors que c’est exactement le contraire. À presque 42 ans, j’ai enfin trouvé le bonheur : je vois mes enfants tous les jours, mon mec quelques fois par mois et je me consacre à ce que j’aime. Je suis libre de faire ce que je veux. La liberté, c’est l’amour.

L’entretien original a été imprimé dans notre numéro 52, actuellement disponible en kiosque et sur notre e-shop